
Condamné à mort pour avoir manifesté contre la monarchie saoudienne, Ali Mohammed al-Nimr, risque d’être décapité le 24 septembre, alors que Riyad vient de prendre la tête du panel du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU.
En Arabie saoudite, pays qui paradoxalement vient à peine de prendre la tête du panel du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU, manifester contre le pouvoir peut vous valoir une décapitation. Le jeune Ali Mohammed al-Nimr était au lycée lorsqu'il a été arrêté en 2012, à l’âge de 17 ans, pour avoir participé à des manifestations du Printemps arabe à Qatif, dans l'est du royaume wahhabite. Mardi 22 septembre, des experts onusiens des droits de l'Homme ont appelé Riyad à annuler l’application de la sentence.
Ce neveu d’un haut dignitaire chiite et opposant inflexible, Nimr Baqir al-Nimr, - lui-même condamné à mort en octobre 2014 pour "désobéissance au souverain" et "port d'armes" -, est accusé par les autorités saoudiennes d'appartenir à une organisation criminelle et d'avoir attaqué la police. Condamné à mort en mai dernier, sa décapitation peut intervenir à tout moment, puisque son dernier recours en appel a été rejeté la semaine dernière.
Décapité puis crucifié
Dans leur communiqué, les experts affirment que le jeune homme a été torturé avant de passer aux aveux. Ils indiquent qu'il n'avait pu recourir à un avocat dans des conditions normales avant et pendant son procès. En outre, son interjection en appel a été traitée "dans le mépris total des critères internationaux". "Toute sentence infligeant la peine de mort à des personnes mineures à l'époque du délit, ainsi que leur exécution, sont incompatibles avec les obligations internationales de l'Arabie saoudite", est-il encore écrit dans le communiqué.
Les défenseurs du jeune homme, qui pensent que le sort brutal qui lui est réservé est lié à l’activisme de son oncle, craignent même qu’il ne soit exécuté jeudi 24 septembre, jour de la fête musulmane de l’Aïd el-Kébir. Son corps sera ensuite crucifié et exposé au public, selon l’ONG britannique de défense des droits de l'Homme Reprieve, qui milite, entre autres, pour l’abolition de la peine capitale. Une pratique barbare qui n’est pas sans rappeler les méthodes de mise à mort de l’organisation de l’État islamique (EI) notamment dans la ville syrienne de Raqqa, bastion des jihadistes.
Riyad et les droits de l’Homme
L’affaire d’Ali Mohammed al-Nimr intervient au moment où l'ambassadeur saoudien auprès des Nations unies, Faisal bin Hassan Trad, vient de prendre la tête du panel du Conseil des droits de l’Homme de l’ONU. Une décision aussi incompréhensible que choquante pour les ONG qui n’ont de cesse d'épingler les violations de ces droits dans le royaume.
Un comble pour ce pays qui, selon le dernier rapport d’Amnesty International, a procédé à l’exécution "en moyenne d’une personne tous les deux jours", entre août 2014 et juin 2015. La pétromonarchie sunnite, qui applique la charia, est également accusé par l’ONG de restreindre les libertés d’expression et d’association, de discriminer les femmes et la minorité chiite, d’avoir recours à la torture et d’infliger des peines de mort arbitraires.
Il serait illusoire de croire que la mobilisation sur la Toile, via une page Facebook demandant la libération de son oncle et le hashtag #FreeNimr sur Twitter, suffise à lui sauver la vie.
Droits de l’Homme à l’ONU ou pas, Riyad a déjà fait savoir par le passé que le royaume "jouit de l'indépendance et n'accepte aucune ingérence [dans son système judiciaire] et ses affaires internes d'une quelconque partie".