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Journalistes tués aux États-Unis : le tireur disait être "un baril de poudre" prêt à exploser

Les motivations de Vester Lee Flanagan, l'homme qui a abattu deux journalistes en direct à la télévision américaine, mercredi dans le comté de Bedford, et qui s'est suicidé quelques heures plus tard, restent floues.

L'homme qui a froidement abattu mercredi en direct la reporter Alison Parker et le caméraman Adam Ward, de la chaîne de télévision locale américaine WDBJ7, a succombé jeudi 27 août en début d'après-midi à une blessure par balle qu'il s'est lui-même infligée.

Identifié comme Vester Lee Flanagan, cet ancien collègue des journalistes a justifié son geste dans un long manifeste de 23 pages envoyé à la chaîne ABC, disant avoir "souffert de discrimination, de harcèlement sexuel et de bizutage au travail". Ses propos décousus montrent de forts ressentiments à l'encontre de WDBJ7, affiliée à CBS.

"Juste en attente d'un 'boum'"

Sur son compte Twitter, utilisant son nom d'antenne Bryce Williams, il a accusé son ancienne collègue Alison Parker d'avoir "tenu des propos racistes" et s'est indigné du fait qu'elle ait été "embauchée malgré ça". La direction de WDBJ7 a rejeté ses accusations et dit l'avoir licencié en 2013 après plusieurs accès de violence.

Né en 1973 et diplômé de l'Université d'État de San Francisco en 1995 après avoir grandi à Oakland, en Californie, il dit avoir pendant toute sa carrière "avoir été attaqué pour le fait d'être un homme noir et homosexuel".

>> À lire sur France 24 : Deux journalistes américains tués en direct à la télévision

Toujours est-il que Vester Lee Flanagan a expliqué vouloir répondre au racisme dont est victime la communauté afro-américaine. "Ce qui m'a fait craquer, c'est la tuerie dans l'église", a écrit dans son manifeste l'homme de 41 ans, en référence à la fusillade survenue en juin dans une église de la communauté noire de Charleston (Caroline du Sud). Neuf paroissiens noirs avaient alors été abattus par Dylann Roof, un partisan de la suprématie blanche.

"En ce qui concerne Dylann Roof (...) Tu veux une guerre raciale ? Allons-y." Dans son manifeste, celui qui se décrivait sur les réseaux sociaux comme un témoin de Jéhovah, résume : "La fusillade dans l'église a été le point de basculement... mais ma colère s'est construite sur la durée. Je suis un baril de poudre depuis un bon moment. Juste en attente d'un 'BOUM'".

Plus loin dans sa note, il ajoute "admirer les tueurs de Columbine", ces deux jeunes tueurs qui avaient abattu 13 élèves de leur lycée en 1999 avant de se suicider. Il évoque aussi le tueur de l'université Virginia Tech, Seung-Hui Cho, qui en 2007 avait assassiné 32 personnes sur le campus avant de s'y donner la mort.

Vester Lee Flanagan avait d'ailleurs poursuivi en justice ses deux victimes de mercredi pour discrimination raciale, des accusations balayées par Jeffrey Marks, directeur général de WDBJ7. Ce dernier, qui qualifie le tueur d'"homme malheureux", affirme l'avoir viré "après de nombreux incidents liés à sa violence". Il avait rejoint la chaîne en mars 2012 et l'avait quittée manu militari en février 2013, raccompagné à la porte par la police.

Une réputation à double tranchant

Durant son court passage chez WDBJ7, il s'est forgé une réputation à double tranchant : d'une part celle d'un "perturbateur" avec lequel "il est difficile de travailler", de l'autre celle d'un reporter "qui avait du talent et de l'expérience", se souvient Jeffrey Marks.

Cela malgré un parcours professionnel haché, marqué par les allers-retours entre le journalisme et divers emplois. Avant d'être embauché par WDBJ7, il avait par exemple passé huit années sans faire de journalisme. Entre 1993 et 1995, il est passé par la chaîne KPIX, branche locale de CBS News à San Francisco.

Sur son profil du réseau professionnel Linkedin, où il est inscrit sous le nom de Bryce Williams, il explique avoir travaillé pour plusieurs chaînes de télévision à travers les États-Unis depuis le milieu des années 1990, mais aussi dans les domaines du marketing ou de la relation clients.

Il avait également été renvoyé de la chaîne WTWC, affiliée à NBC, où il était reporter entre 1999 et 2000, pour son "comportement bizarre". "C'était un bon présentateur, un plutôt bon reporter. Et puis les choses ont commencé à devenir un peu étranges", se souvient Don Shafer, qui l'avait recruté à l'époque. En quittant la chaîne, Bryce Williams avait, déjà à l'époque, poursuivi WTWC en justice pour discrimination, affirmant notamment avoir été traité de "singe".

Avec AFP