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Élection présidentielle : l'opposition dénonce une "mascarade"

Le dépouillement des bulletins de l'élection présidentielle burundaise a commencé, mardi en fin de journée, après un scrutin boycotté par l'opposition et précédé de violences. Aucune date n'a été donnée pour les résultats.

Au Burundi, l’élection présidentielle touche à sa fin, mardi 21 juillet, et devrait sans surprise donner lieu à une victoire du président sortant Pierre Nkurunziza. À 16 h (14 h GMT), le dépouillement des bulletins avait débuté dans l'essentiel des bureaux, sans qu'aucune date n'ait été donnée pour la proclamation des résultats. Quelque 3,8 millions de Burundais étaient appelés à se déplacer. Mais à Bujumbura comme en province, la mobilisation est en règle générale restée inférieure à celle des législatives du 29 juin.

Boycottée par l’opposition, qui considère que la candidature de Pierre Nkurunziza pour un troisième mandat non prévu par la Constitution est illégale, la campagne électorale a été largement ponctuée de violences. Alors que la crise a déjà fait au moins 80 morts et poussé plus de 160 000 Burundais à se réfugier dans les pays voisins, de lourdes interrogations subsistent à propos de l'avenir du pays.

Dans la nuit de lundi à mardi, deux personnes ont été tuées à Bujumbura, où explosions et tirs ont résonné plusieurs heures avant l'ouverture des bureaux de vote. Des "actes terroristes", selon le camp présidentiel, qui visent à "intimider les électeurs". Dans de nombreux bureaux de vote, les électeurs effaçaient en effet l'encre de leur doigt à la sortie de l'isoloir par peur de représailles de la part d'opposants appelant au boycott. Une crainte que confirme notre correspondant sur place, Nicolas Germain.

L'élection s'est poursuivie dans un calme relatif mais dans une ambiance empreinte de méfiance et d'inquiétude. La participation dans plusieurs bureaux de vote de la capitale a oscillé entre 15 et 20 %, a constaté l'AFP, et n'a pas dépassé 2 % dans le quartier de Musaga, hostile au président sortant, où les militaires et les policiers étaient les principaux votants.

"Une mascarade"

De son côté, le président Pierre Nkurunziza, 50 ans, imperturbable, a accompli son devoir électoral en affichant une certaine décontraction. Fan de ballon rond et protestant "born again" prosélyte, il s'est rendu en vélo au bureau de vote de son village natal de Buye (nord) et a glissé son bulletin dans l'urne vêtu d'un jogging bleu orné de l'écusson de son équipe de football.

Après la très large victoire - sans surprise - du parti au pouvoir, le CNDD-FDD, aux législatives et communales du 29 juin, déjà boycottées par l'opposition, celle de Pierre Nkurunziza à la présidentielle ne fait de doute pour personne.

Officiellement, Pierre Nkurunziza n'était pas seul en lice. Outre trois candidats issus de petites formations réputées alliées au pouvoir, il affrontait son principal opposant Agathon Rwasa, qui a contesté à l'avance la légitimité du scrutin, et trois autres candidats de l'opposition (dont les deux anciens chefs de l'État Domitien Ndayizeye et Sylvestre Ntibantunganya) qui se sont retirés de la course en dénonçant "une mascarade".

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Plusieurs bizarreries ont d’ailleurs été constatées dans différents bureaux selon un journaliste de l'AFP, des procès-verbaux vierges étant signés par les assesseurs avant même le début du dépouillement.

Les lendemains de victoire seront compliqués

Interrogé par France 24, Thierry Vircoulon, spécialiste de l’Afrique centrale au sein du think tank International Crisis Group, explique que "cette élection présidentielle qui, malgré les apparences, est à candidat unique, envoie à l’opposition le message qu’il n’y a plus rien à négocier et qu’il ne lui reste plus que la lutte armée".

Les lendemains de victoire risquent de fait d'être compliqués, avec un Burundi divisé, isolé sur la scène internationale et privé d'une aide extérieure cruciale alors qu'il figure parmi les 10 pays les moins développés au monde.

Les États-Unis ont estimé mardi que la présidentielle n'était pas "crédible" et discréditait encore "davantage" le gouvernement. Plus tôt dans la matinée, Didier Reynders, le ministre des Affaires étrangères de la Belgique, un important partenaire du Burundi, avait "regretté" l'organisation de ces élections et rappelé que la Belgique allait "réexaminer sa coopération" avec son ancienne colonie.

Avec AFP