Le président français effectue une tournée de trois jours en Afrique, au cours de laquelle il se rend dans trois pays : le Bénin, l'Angola et le Cameroun. Un programme comme un éventail des intérêts français sur ce continent.
Cotonou mercredi, Luanda jeudi, Yaoundé vendredi. François Hollande a entamé le 1er juillet une tournée express en Afrique, dans trois pays où il ne s'est jamais rendu. Le président français complète ainsi sa connaissance du continent : depuis le début de son quinquennat, il s'est rendu dans une quinzaine de pays d'Afrique subsaharienne, surtout en lien avec la lutte contre le terrorisme au Sahel.
Le Bénin, l'Angola et le Cameroun ont cette fois des profils très différents - inutile de chercher une ligne directrice à ce déplacement africain. "C'est un savant dosage de toutes les facettes des préoccupations du chef de l'État", explique à France 24 Antoine Glaser, journaliste et écrivain, auteur d'"Africafrance" (2014, Fayard).
itSi le chef de l'État évoquera la lutte contre le terrorisme au Bénin et au Cameroun, il devrait aussi louer à son arrivée à Cotonou les progrès démocratiques de l'État béninois. Cette question sera plus difficile à aborder avec le président angolais José Eduardo Dos Santos, 72 ans dont 35 au pouvoir, et Paul Biya, 82 ans, qui dirige depuis 1982 le Cameroun.
Saluer les avancées démocratiques
La tournée s'ouvrira donc sur une étape consacrée à la démocratie, alors que le président béninois Thomas Boni Yayi a assuré, fin avril, qu'il ne briguerait pas un troisième mandat en 2016. Le dirigeant béninois a également marqué des points auprès de l'Élysée avec la nomination récente au poste de Premier ministre de Lionel Zinsou, un Franco-Béninois proche de Laurent Fabius et Lionel Jospin.
François Hollande marquera le coup, pour cette première visite d'un chef d'État français au Bénin depuis 1983, en s'adressant aux parlementaires locaux jeudi.
Après cette première escale en terrain ami, la tournée "va crescendo", relève Antoine Glaser, avec les enjeux économiques en Angola et le volet sécuritaire au Cameroun.
Tourner définitivement la page de l'Angolagate
"Avec l'Angola, on plonge dans le business", commente Antoine Glaser, qui souligne : "À part Total et quelques grands groupes, les entreprises françaises ont des difficultés à s'installer en Angola." Ce n'est donc pas anodin si une cinquantaine de dirigeants d'entreprises accompagnent le chef de l'État dans cette tournée.
Il s'agira aussi de tourner définitivement la page de l'Angolagate, ce scandale de ventes d'armes illégales qui a empoisonné pendant des années les relations entre Paris et Luanda. "Beaucoup de choses se sont normalisées, peut-être fallait-il le traduire avec un déplacement de dirigeants", analyse Roland Marchal, spécialiste de l'Afrique au Centre de recherches internationales (Ceri).
>> À lire sur France 24 : Quelle est la place de l’Angola dans la politique africaine de la France ?
Et cette incursion en Afrique anglophone a aussi son importance en vue de la conférence sur le climat (Cop21) que Paris organise en décembre prochain : François Hollande veut étendre son influence en dehors du pré carré de la diplomatie française. "Il va demander à Dos Santos de venir, pour ne pas avoir que des chefs d'État d'Afrique francophone", prédit Antoine Glaser.
L’auteur voit au Cameroun l'étape la plus délicate du voyage présidentiel : "Il y a actuellement un sentiment anti-français très fort [au Cameroun, NDLR], il ne s'agit pas d'apparaître en donneur de leçons", alors que le président camerounais Paul Biya a accédé à ses fonctions il y a plus de 30 ans.
Cette étape sera en partie dédiée au volet sécuritaire, le Cameroun, allié dans la lutte contre Boko Haram, étant aussi un point de passage obligé pour aller ravitailler les troupes françaises de l'opération Barkhane basée au Tchad.
Les droits de l'Homme seront également abordés, François Hollande devant plaider la cause de l'avocate franco-camerounaise Lydienne Yen Eyoum, condamnée à 25 ans de prison pour détournements de fonds. Le président doit également rencontrer des politiciens d'opposition et des membres de la société civile.
Cela ne suffit pas pour contenter les ONG, qui n'ont pas manqué de relever le caractère autocratique des pays visités. L'association Survie, critique envers la politique africaine de la France, dénonce "une tournée au service de l'influence et des intérêts économiques".