L'Indonésie a exécuté mercredi huit personnes pour trafic de drogue, dont deux Australiens et un Brésilien, provoquant la colère de Brasilia et Canberra. Le Français Serge Atlaoui est toujours en sursis, dans le couloir de la mort.
Huit condamnés à mort dont sept étrangers ont été exécutés mercredi 29 avril peu après minuit, heure locale, par les autorités indonésiennes. Il s'agit de quatre Nigérians, deux Australiens, un Brésilien et un Indonésien. Selon la procédure, ils ont été extraits de leur cellule à l'isolement, conduits dans une clairière, attachés à un poteau et fusillés par un peloton d'exécution de 12 tireurs.
L'Australie a dénoncé un acte "cruel et inutile", avant de rappeler son ambassadeur à Djakarta. Quant au Brésil, le gouvernement s'est dit choqué par l'annonce de
l'exécution d'un de ses ressortissants - la deuxième d'un Brésilien en Indonésie en trois mois -, malgré les appels à la clémence lancés personnellement par la présidente Dilma Rousseff.
Une Philippine qui devait faire partie de cette exécution n'a en revanche pas été fusillée. Cette domestique de 30 ans, mère de deux jeunes garçons, a toujours répété avoir été victime d'un réseau international de trafiquants de drogue. "L'exécution de Mary Jane (Veloso) a été reportée parce qu'il y a eu une demande du président philippin liée à une délinquante soupçonnée de trafic humain qui s'est rendue (à la police) aux Philippines", a expliqué Tony Spontana, le porte-parole du procureur général. "Il a été demandé à Mary Jane de témoigner", a-t-il ajouté.
L’annonce de ce report a provoqué des cris de joie et des applaudissements parmi les personnes qui organisaient une veillée devant l'ambassade d'Indonésie à Manille. "Nous sommes tellement heureux. Je n'arrive pas y croire. Je n'arrive pas à croire que mon enfant va vivre, a réagi Celia Veloso, mère de la condamnée, à la radio philippine DZMM. Les miracles se réalisent donc."
itBeaucoup de pleurs
Des ambulances acheminant des cercueils étaient arrivées la veille dans la prison de Nusakambangan, l'"Alcatraz indonésien", plantée sur une île isolée de Java. Les familles des condamnés ont également pu partager ces derniers moments douloureux. Les proches de deux Australiens, Myuran Sukumaran, 34 ans, et Andrew Chan, 31 ans, n'ont pas pu contenir leur émotion mardi en arrivant à la ville portuaire de Cilacap, avant de rallier l'île de la "prison de la mort". "Il y a eu beaucoup de pleurs, la sœur d'un des condamnés australiens s'est évanouie avant d'embarquer sur le bateau qui les a emmenés sur l’île de la prison", a décrit Marie Dhumière, la correspondante de France 24 en Indonésie.
Si les autorités ont accédé à la dernière volonté d'Andrew Chan d'épouser sa compagne indonésienne lors d'une cérémonie célébrée le 27 avril au complexe pénitentiaire, elles ont refusé aux deux condamnés australiens le choix du pasteur qui les a accompagnés dans leurs derniers instants. "Les familles sont furieuses, on leur refuse la dignité jusqu’au bout", a poursuivit la correspondante de France 24.
Fragile sursis pour Serge Atlaoui
Condamné à mort lui aussi pour trafic de drogue et incarcéré depuis 2007, le Français Serge Atlaoui, 51 ans, a été retiré au dernier moment de cette liste en raison d'un recours en attente devant la justice. Mais le porte-parole du parquet général indonésien, Tony Spontana, a réaffirmé mardi qu'en cas de rejet de sa procédure, il serait exécuté seul, et que les autorités n'attendraient "pas très longtemps".
"La cour administrative devant laquelle il a déposé son recours devrait rendre son jugement cette semaine ou la semaine prochaine. Il y a très peu d'espoir que ce recours soit accepté", note Marie Dhumière, rappelant que ce même recours avait été rejeté pour les deux condamnés australiens.
Intransigeant sur l'application de la peine de mort pour trafic de stupéfiants, le président indonésien Joko Widodo est resté sourd à tous les appels à la clémence et aux pressions diplomatiques contre les exécutions, notamment de la France, de l'Australie, ainsi que des Nations unies.
Avec AFP et Reuters