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Alors que les raids de la coalition saoudienne se poursuivent au Yémen, la population est en première ligne des violences des frappes. Le pays, classé 154e sur 187 en termes de développement humain, connaît déjà une crise humanitaire.

Au lendemain du début de l’offensive saoudienne au Yémen, visant à prévenir la chute du président Hadi, certaines ONG alertent sur le sort de la population yéménite. Alors que 39 civils auraient péri dans les frappes de la coalition menée par Riyad, selon des responsables du ministère de la Santé contrôlé par les Houthis, certains habitants ont préféré fuir leur lieu d’habitation.

Les Yéménites des deux grandes villes du pays - Sanaa et Aden - se trouvent livrés à eux-mêmes. Dans ces localités, les forces de sécurité loyales au président Hadi sont en effet parties se battre sur plusieurs fronts contre les rebelles chiites, délaissant les habitants.

Un contexte inquiétant pour l’ONG Action contre la faim. Entretien avec Vincent Taillandier, directeur des opérations.

France 24 : Quelle est la situation humanitaire au Yémen ?

Vincent Taillandier : Ce pays est extrêmement fragile. Il fait partie des 25 derniers pays mondiaux en termes de développement humain [154e sur 187 au classement du Programme des Nations unies, NDLR].

Sur les 25 millions d’habitants, 16 millions sont dans un besoin humanitaire. Dix millions d’entre eux ont des problèmes d’accès à l’alimentation. La moitié de cette population – soit cinq millions de personnes – est considérée en ‘insécurité alimentaire sévère’. En ce qui concerne les enfants, quasiment un million d'entre eux sont en situation de sous-nutrition [61 % des enfants au Yémen souffrent de malnutrition, selon des données du ministère français des Affaires étrangères, NDLR].

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À ce constat catastrophique s’ajoute une guerre civile depuis plusieurs mois, qui a rendu le pays encore plus vulnérable. Les habitants rencontrent notamment des difficultés pour avoir accès aux soins de base (santé, eau, etc.). Avec l’intervention aérienne menée l’Arabie saoudite, le conflit a désormais pris une toute nouvelle dimension.

En quoi cette intervention aérienne menée par l’Arabie saoudite risque d’aggraver la situation ?

On constate que des habitants commencent à se déplacer pour fuir les violences. Si l’intensité des combats continue, il est probable que les populations fuient massivement Sanaa. Dans ce cas, une partie des gens vont aller se réfugier chez de la famille, et d’autres vont se rassembler dans des camps éloignés des villes. Cela dépend en général du milieu social des personnes.

Ce qui nous fait peur, c’est justement que les gens s’éloignent des villes et se retrouvent dans des endroits isolés, démunis de tout. C’est là qu’une assistance humanitaire devient cruciale. Or on ne sait jamais combien de temps un tel exode peut durer, quelques jours ou quelques années. On est dans le genre de schéma que l’on retrouve en Irak, en Syrie ou en Centrafrique.

Comment envisagez-vous la suite ?

Il va falloir observer les mouvements de population et agir très vite pour amener une aide. Mais pour ce faire, il faut que les belligérants acceptent le travail des humanitaires, nationaux ou internationaux, et s’engagent à le respecter. C’est un enjeu majeur car, depuis quelque temps, nous constatons que la sécurité des humanitaires est de plus en plus bafouée. Afin d’accélérer nos démarches, la communauté internationale doit reconnaître très rapidement la crise humanitaire en cours.

Nous allons également devoir mettre en place des appels aux dons mais, en ce qui concerne le Yémen, nous sommes confrontés à un problème : il est difficile de collecter des dons pour ce pays. C’est un État méconnu, loin et difficile à comprendre. Il est laissé de côté et peu présent sur la scène internationale. Preuve du peu de solidarité qu’inspire le Yémen : en 2014, seuls 50 % des besoins humanitaires identifiés pour le pays ont pu trouver un financement (via les fonds propres d’associations, les financements des bailleurs et les dons des particuliers).