Une Ukrainienne qui chante pour la Russie, un duo israélien qui défraie la chronique, des Géorgiens interdits de concours... La 54e édition de l'Eurovision sera politique... ou ne sera pas. Heureusement, la musique adoucit les mœurs.
Le conflit israélo-palestinien s’invite à Moscou
Lorsque, à la fin de 2008, la juive Ahinoam Nini et l’Arabe Mira Awad ont annoncé qu'elles allaient se produire en duo lors du concours de l'Eurovision, les critiques n'ont pas tardé à fuser. Ces deux Israéliennes chantent pourtant la tolérance et la coexistence judéo-arabe. "Lorsque je pleure, je pleure pour nous deux", entonnent-elles en cœur. Un message qui n’a pas été compris en Israël. Il faut dire que l’ambiance nationale n’était pas, à l’époque, à la paix : l’annonce de leur nomination ayant été faite au lendemain du lancement de l'opération militaire israélienne dans la bande de Gaza… D’un côté, les artistes arabes dénoncent une "opération de propagande du gouvernement israélien". De l’autre, le député d’extrême-droite Arié Eldad qualifie le duo de "cinquième colonne au sein de l'Etat". Ambiance.
Les Européens adhèrent à la Turquie
L’Union européenne ne veut toujours pas de la Turquie. Qu’importe, les Européens en veulent bien. Tout du moins plébiscitent-ils sa chanteuse Hadise. Sa chanson "Dum Tek Tek" figure parmi les favorites de l’Eurovision. Sur le site Facebook, ses fans, toutes nationalités confondues, se comptent par dizaines de milliers. Et son clip fait un tabac sur les sites de vidéos en ligne. En Allemagne comme en Belgique, où elle est née, la jeune Turque aux formes généreuses remporte l’adhésion… du public.
Royaume-Uni : "Votre pays a besoin de vous"
Londres met les bouchées doubles pour tacler Moscou. En chanson du moins. Les relations diplomatiques entre le Royaume-Uni et la Russie sont tendues, notamment depuis l'affaire Litvinenko, du nom de cet ex-agent du KGB empoisonné, l’an dernier, dans la capitale britannique. Le royaume s'est alloué les services de lord Andrew Lloyd Webber, compositeur des opéras musicaux "Cats", "Evita" et "Le Fantôme de l'opéra" - rien que ça -, pour composer la sirupeuse ballade "It’s my time", interprétée par Jade Ewen. Prenant son nouveau rôle à cœur, l’homme n’a pas hésité à donner de sa personne pour aider sa pouliche. Dans un spot télévisé, le lord au lifting détonnant, calé dans un fauteuil Churchill, le drapeau britannique en toile de fond, s'en réfère à l’oncle Sam : " Il arrive un moment où chacun doit prendre ses responsabilités. Votre pays a besoin de vous !"
Sans doute les Géorgiens se joindront-ils à l’effort patriotique britannique, eux qui ont été interdits d’Eurovision pour avoir proposé une chanson intitulée "We don’t want put in" - référence à peine masquée au Premier ministre russe.
L’Eurovision souffle sur les braises du conflit entre Moscou et Kiev
La Russie sera, cette année, représentée par une Ukrainienne. Cette fois-ci, l’Eurovision souffle sur les braises toujours incandescentes du conflit gazier qui oppose Moscou et Kiev. Anastasia Prikhodko, qui portera, le 16 mai, les couleurs de la Fédération, s’était d’abord présentée dans son pays avec une chanson en russe. Tollé à Kiev. La chanteuse a alors tenté sa chance en Russie. Pari réussi. Aujourd'hui, c'est à Moscou qu'on crie au scandale : le refrain de sa chanson est en ukrainien !