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Stockholm a décidé de ne pas renouveler son accord de coopération militaire avec l'Arabie saoudite, son 3e client pour l'armement en dehors des pays occidentaux. Une partie de la classe politique dénonce le bilan de Riyad sur les droits de l'Homme.

L'accord de coopération militaire avec l'Arabie saoudite "sera rompu", a déclaré le Premier ministre suédois, Stefan Löfven, mardi 10 mars. La Suède avait signé en 2005 cet accord, qui a créé la controverse au sein du gouvernement de gauche à cause de la question du respect des droits de l'Homme par Riyad.

L'accord faisait de l'Arabie saoudite le troisième acheteur d'armement suédois en dehors des pays occidentaux. En 2014, Riyad en avait ainsi acheté pour 338 millions de couronnes (37 millions d'euros).

La coalition entre sociaux-démocrates et écologistes débattait en interne, depuis son accession au pouvoir en octobre, de l'opportunité de renouveler cet accord arrivant à échéance en mai. Les Verts militent traditionnellement contre la vente d'armes aux "dictatures" et considèrent que l'Arabie saoudite en est une. Quant aux sociaux-démocrates, même s'ils étaient seuls au pouvoir à l'époque où cet accord avait été paraphé, ils apparaissaient très divisés sur la question.

Ryad rappelle son ambassadeur

Cette décision a été rendue publique au lendemain d'un incident diplomatique entre les deux pays : l'Arabie saoudite a empêché lundi la ministre des Affaires étrangères suédoise, Margot Wallström, de prononcer un discours prévu lors d'une réunion de la Ligue arabe au Caire. La ministre, qui revendique une "politique étrangère féministe", avait irrité Riyad en dénonçant les "méthodes moyenâgeuses" de la justice saoudienne contre le blogueur Raïf Badawi, flagellé pour "insulte à l'islam".

Sans donner la raison de cette décision, le Premier ministre suèdois a cependant indiqué que les événements du Caire n'ont pas pesé, puisque la coopération militaire avait été arrêtée "depuis un certain temps", selon Stefan Löfven, qui se trouvait en déplacement à Kiev.

À la suite de ce différend diplomatique, l'Arabie saoudite a décidé de rappeler son ambassadeur à Stockholm. Erik Boman, porte-parole de Margot Wallström, a expliqué mercredi que Ryad avait motivé ce rappel par les critiques formulées envers la Suède.

Un consensus politique

Alors qu'il souhaitait publiquement la poursuite de la coopération militaire, le ministre de la Défense, le social-démocrate Peter Hultqvist, a affirmé que la discussion avait débouché sur un consensus. "Nous avons maintenant plusieurs partis au Parlement (...) qui ont réclamé qu'il [l'accord avec l'Arabie saoudite] soit rompu. (...) Nous n'avons pas eu non plus un quelconque désaccord là-dessus au sein du gouvernement", a-t-il déclaré au quotidien "Expressen".

>> À lire sur France 24 : "L'Arabie saoudite, premier importateur d'armes au monde"

La plupart des membres de l'opposition de centre-droit appelaient le gouvernement à prolonger l'accord militaire, soulignant le risque de miner la crédibilité de la Suède en tant que partenaire commercial.

L'un de ses plus fervents partisans, l'ancien ministre des Affaires étrangères conservateur Carl Bildt, a déploré les conséquences sur l'image de son pays. "La fiabilité est importante pour un pays relativement petit comme la Suède (...) Beaucoup de ce que la Suède exporte comme technologie de pointe nécessite divers types d'engagements de long terme. Cela ne concerne pas uniquement le matériel de défense", a-t-il estimé sur son blog.

Minoritaire au Parlement, le gouvernement suédois a été sauvé en décembre par un accord de non-agression avec le centre-droit, qui prévoyait une coopération entre les deux camps, entre autres sur les questions de défense, afin d'isoler l'extrême-droite. Les termes exacts de ce que recouvrait cette coopération n'ont jamais été rendus publics.

Avec AFP