
Depuis plusieurs années, Boko Haram sème la terreur au Nigeria. Et la secte islamiste a étendu sa zone d'action au Cameroun, au Niger, mais aussi au Tchad. Nos reporters ont suivi les forces de sécurité tchadiennes dans leur combat contre les islamistes. La menace, bien réelle, est prise très au sérieux par les autorités tchadiennes et bouleverse déjà la vie quotidienne de la population.
Quand le président tchadien accepte, à la demande de son homologue camerounais, d'impliquer son armée dans la guerre contre Boko Haram, Idriss Déby Itno sait qu’il expose son pays à des représailles. Mais peut-il laisser la région sous le feu de la secte islamiste nigériane sans réagir, lui qui dénonce depuis des mois la déstabilisation de la zone causée par les jihadistes ? Le 17 janvier, le Tchad est donc entré en guerre contre Boko Haram.
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La mission des soldats tchadiens consiste à épauler les armées déjà engagées : celle du Cameroun, qui subit depuis plusieurs années des attaques à répétition des combattants islamistes au nord de son territoire, et celle du Nigeria, qui subit les raids sanglants de Boko Haram depuis 2009 dans le nord-est.
Mais l’objectif des Tchadiens est aussi de sécuriser leurs propres frontières et de libérer les axes de circulation qui sont des artères commerciales vitales. Car depuis l’avancée des jihadistes dans l’extrême-nord du Cameroun, l’axe N’Djamena, Kousseri, Maroua, Douala qui donne sur la mer, n’est plus fréquenté. L'autre axe commercial majeur pour le Tchad, via le Nigeria, est également en proie aux violences. Les chauffeurs routiers sont donc contraints d'adopter un axe de contournement longeant la frontière ouest du Tchad. Un long parcours qui leur revient plus cher et qui a des conséquences sur le coût de la vie à N’Djamena. Les prix de certains produits ont flambé. Le panier de la ménagère est moins garni qu’avant, mais les Tchadiens espèrent vite retrouver leurs habitudes de consommation.
Gendarme régional
Depuis la première attaque sur leur sol, à Ngouboua, dans la région du lac Tchad, dans la nuit du 12 au 13 février, les autorités redoutent une nouvelle offensive de Boko Haram.
Sur leur sol, les forces de sécurité tchadiennes verrouillent la capitale et procèdent à des contrôles quotidiens. Depuis, la police, la gendarmerie et la garde nationale contrôlent régulièrement les quartiers à forte concentration d’étrangers pour identifier ceux qui se trouvent dans le pays. Désormais tous les résidents doivent avoir leurs papiers en règle. En attestent les longues files d'attente qui ne désemplissent pas devant les locaux de la direction de la police technique et scientifique et de l’identité civile. Tout le monde veut sa carte d’identité.
Engagés au Cameroun et au Nigeria, les militaires tchadiens sont également stationnés à Bosso, au Niger, où ils prêtent main forte à l’armée nationale. C’est par cette région sud du Niger, aux confins du lac Tchad, que Boko Haram a attaqué le pays pour la première fois début février. "Ce fut un carnage", raconte à France 24 le colonel Azem Bermendoa, porte-parole de l’armée tchadienne. Depuis, Boko Haram se cache en face, dans la ville nigeriane de Malam Fatoria, à 600 mètres de là. Les combattants islamistes sont scrutés par les Tchadiens et les Nigériens, lourdement armés.
En attendant la mise en place de la force multinationale régionale, le Tchad, déterminé, est devenu le grand gendarme régional. Pas question de laisser Boko Haram regagner du terrain ici au Niger, et dans la région. Et surtout pas sur son propre territoire.
>> Lisez le carnet de route au Tchad de notre grand reporter, Willy Bracciano en cliquant ici.