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"Jihadi John" : les services secrets britanniques critiqués

Après les révélations sur l'identité de "Jihadi John", la presse anglaise accuse les services secrets britanniques d'avoir commis des erreurs. Le MI5 était entré en contact avec le jihadiste de l'EI plusieurs fois et avait tenté d'en faire une taupe.

Le MI5 et la police britannique ont été en contact au moins une douzaine de fois depuis 2009 avec Mohammed Emwazi alias "Jihadi John", avant qu'il ne réussisse à rejoindre la Syrie en 2012 et devienne l'un des bourreaux de l'organisation de l'État islamique, a révélé vendredi 27 février le "Daily Telegraph".

Le quotidien a dénoncé des "erreurs stupides" de la part des services britanniques, qui ont soupçonné l'homme de vouloir rejoindre le groupe terroriste des shebab somaliens, et ont même tenté - sans succès - d'en faire une taupe après l'avoir intercepté en 2009 en Tanzanie. 

>> À lire sur France 24 : Le bourreau de l'EI "Jihadi John" identifié

En juin 2010, "Jihadi John" a été arrêté une nouvelle fois par des officiers du contre-terrorisme alors qu'il s'apprêtait à partir au Koweït et a été placé sur une liste de personnes susceptibles de commettre un acte terroriste. Il lui est alors interdit de quitter le pays, ce qu'il réussira pourtant à faire.

Cameron prend la défense des services

Face à la montée des critiques, le gouvernement britannique a tenu à défendre l'action des services de renseignement et de police qui "font un excellent travail au jour le jour".

"Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir, avec le concours de la police et des services de sécurité (...) pour trouver et mettre hors d'état de nuire ceux qui commettent des crimes révulsants et haineux, où que ce soit dans le monde, à l'encontre de citoyens britanniques. C'est notre priorité numéro un", a assuré le Premier ministre David Cameron, en déplacement au Pays de Galles.

Manque de moyens

Pourtant selon Olivier Guitta, consultant en sécurité et risques géopolitiques à Londres, les moyens humains disponibles ne sont pas à la hauteur des défis posés par la menace terroriste, que ce soit au Royaume-Uni, en France ou aux États-Unis : "Pour surveiller une personne, il faut 30 officiers. Mettons qu'il y ait 1 000 personnes à surveiller en Angleterre, vous avez besoin de 30 000 officiers. Nous ne les avons pas."

Et comme dans le cas des frères Kouachi, auteurs des attaques contre "Charlie Hebdo" début janvier en France, Mohammed Emwazi a été rapidement repéré comme pouvant représenter une menace. Mais c'est le suivi qui a péché. "Vous pouvez suivre quelqu'un pendant un an, deux ans, sans qu'il fasse quoi que ce soit, et alors vous arrêtez", souligne l'expert.

Visage doux et timide

Outre les manquements du MI5, le profil de "Jihadi John" interpelle les Britanniques. En une du "Sun", vendredi, le visage doux et timide d'Emwazi, photographié à l'école lorsqu'il avait dix ans, sourit aux lecteurs. Un responsable d'association, interrogé par le quotidien, le décrit comme "un jeune homme beau, extrêmement gentil et aimable".

"Il n'a pas été dans des territoires en guerre, il n'a pas été en prison. Très probablement il a été radicalisé par un prêcheur ou des personnes dans son entourage à l'université", observe Olivier Guitta, qui estime que les gouvernements ne font pas assez pour lutter contre la présence de prédicateurs sur leur territoire. Il compare leur activité à celle de "dealers de drogue".

L'association de défense des droits des musulmans Cage a de son côté mis en cause un acharnement contre Emwazi pour expliquer sa radicalisation. Selon elle, il était prêt à recommencer une nouvelle vie au Koweït, son pays d'origine où il est né en 1988, mais en a été empêché.

Des propos que le maire de Londres Boris Johnson a dénoncés comme s'apparentant à une "apologie du terrorisme".

Avec AFP