
Les représentants musulmans du CFCM ont boycotté le 30e dîner annuel du Crif, en raison des propos polémiques de son président. La soirée a été marquée par l'annonce de François Hollande d'un plan contre le racisme et l'antisémitisme.
Les représentants du Conseil français du culte musulman (CFCM) auront brillé par leur absence, lors du 30e dîner annuel du Crif lundi 23 février. Ce boycott survient après les propos jugés choquants du président du Conseil représentatif des institutions juives, Roger Cukierman.
C'est la première fois que Dalil Boubakeur, président du CFCM et recteur de la grande mosquée de Paris, fait faux-bond à ce rendez-vous œcuménique religieux et politique.
À l’origine de ce boycott, les propos équivoques de Roger Cukierman, tenus sur Europe 1, à quelques heures du dîner du Crif, selon lesquels "toutes les violences [antisémites, NDLR] aujourd'hui sont commises par des jeunes musulmans". Le président du Crif a aussi créé la polémique au sein-même de de la communauté juive, jugeant Marine Le Pen "irréprochable", à la différence de son père.
Cukierman se reprend
Roger Cukierman a tenté de rectifier le tir en précisant lors du dîner qu’il n’a fait que "mettre l'éclairage sur le fait que tous les terroristes qui ont commis des meurtres dans la période récente se réclamaient de l'islam, et que les premières victimes de ces terroristes, ce sont les musulmans".
Pour faire retomber la pression, il a également exprimé son "vif regret" de l'absence du CFCM. "Juifs et musulmans, nous sommes sur le même bateau, j'espère que le contact sera rapidement rétabli", a déclaré le président du Crif, rappelant son amitié "ancienne et sincère" avec Dalil Boubakeur.
Il a réitéré sa mise au point sur la présidente du Front national, qui n'est "ni fréquentable ni irréprochable" tant qu'elle ne se désolidarisera pas des propos de son père. "Nous continuerons à ne pas inviter Mme Le Pen au dîner du Crif et à ne pas conseiller de voter pour le Front national".
Ce dérapage contrôlé a néanmoins embarrassé plusieurs convives. "Heureusement qu'il y a des gens dans la communauté (juive) qui tiennent des propos sensés", a confié l'ancien président Nicolas Sarkozy à Serge et Arno Klarsfeld, qui avaient condamné les premiers les propos de Cukierman sur Marine Le Pen. "C'est très embêtant (...) Là, il fait la totale, l'ami Cukierman", a lâché pour sa part Jean-Paul Huchon, président PS de la région Île-de-France.
Un plan pour mieux réprimer "tout propos de haine"
Le dîner du Crif a été également l’occasion pour François Hollande d’annoncer un renforcement de l'arsenal répressif contre "tout propos de haine" raciste ou antisémite. "Il n'y a pas d'antisémitisme ordinaire", a déclaré le chef de l'État parlant d'une "lèpre" qui est "toujours là 70 ans après la Shoah" et que "la France combattra sans faiblesse".
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Manuel Valls présentera "dans les prochains jours" un plan "aussi complet que concret", a précisé le président. Des "sanctions plus rapides et plus efficaces" vont être prises, a précisé le président, qui souhaite que "tout propos de haine, raciste, antisémite ou homophobe ne relève plus du droit de la presse mais du droit pénal". Ainsi le caractère aggravant de la connotation antisémite d’un délit sera renforcé.
François Hollande a également annoncé, dans le cadre de la lutte contre le jihadisme, la présentation en conseil des ministres à la mi-mars d’un projet de loi sur le renseignement. Le président de la République s'est également félicité de l'application "d'ici la fin de l'année" du PNR, la communication des données des passagers aériens.
Avec AFP