
Alors que des voix se sont prononcées en faveur d'un "Patriot Act à la française" en réponse aux attaques de la semaine dernière, Manuel Valls doit annoncer mardi à l'Assemblée nationale les mesures envisagées pour répondre à la menace terroriste.
Le Premier ministre Manuel Valls doit annoncer à l’Assemblée nationale, mardi 13 janvier, des mesures pour répondre à la menace terroriste après les attaques qui ont fait 17 morts en France entre le 7 et le 9 janvier.
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Le chef du gouvernement a indiqué lundi matin sur BFMTV que deux pistes de réflexion étaient prioritaires : le renseignement et la prison, pour laquelle il est envisagé d'isoler les détenus radicalisés.
"On sépare un certain nombre d'individus qui présentent un danger pour d'autres qui arriveraient en prison, puisqu'ils souhaiteraient les radicaliser", a proposé Manuel Valls.
Le directeur de la prison de Fresnes (Val-de-Marne) teste depuis la mi-octobre un regroupement des islamistes radicaux, pour voir si un tel "découpage" peut juguler la contagion. La chancellerie, de son côté, a lancé un appel d'offres pour entraver le discours radical et accompagner ses victimes.
Ce travail irait de pair avec celui sur le renseignement, pour lequel le Premier ministre a promis "davantage de moyens" humains, ainsi que la prise en compte des "problèmes de lois ou des problèmes juridiques pour améliorer encore la possibilité des systèmes d'interception, d'écoutes".
"Il faut une réponse ferme et globale"
L’ancienne ministre du Budget et candidate UMP à la mairie de Paris, Valérie Pécresse, a ainsi lancé l’idée, dimanche, d’un "Patriot Act à la française", faisant référence à la législation américaine post-11-Septembre, qui visait notamment à faciliter la surveillance de suspects de terrorisme. "Il faut une réponse ferme et globale", a-t-elle tweeté.
Loi d’exception votée octobre 2001 pour quatre ans, le "Patriot Act" a été rendu permanent en 2005 par le Congrès américain. Certaines de ses dispositions ont été particulièrement critiquées par les associations de défense des libertés civiles, comme la possibilité donnée aux agences de renseignement de récupérer les informations personnelles des clients des opérateurs de télécommunication privés, de les mettre sur écoute sur simple soupçon, ou encore la création du statut juridique particulier d’"ennemi combattant".
Manuel Valls s'est toutefois montré réservé lundi sur cette idée d'un "Patriot Act à la française" proposé par la droite. "Attention à toutes les procédures d'exception", a-t-il mis en garde.
La proposition de Valérie Pécresse a par ailleurs également été mise à mal au sein de son propre parti. Le député juppéiste Edouard Philippe et l'ex-bras droit de Nicolas Sarkozy, Claude Guéant, se sont opposés mardi à l'idée d'un "Patriot Act à la française" réclamé dans leur camp.
"Hors de question de faire Guantanamo en France"
"Je crois normal que les Français réagissent d'abord par une forme d'émotion partagée", a déclaré Edouard Philippe sur LCI et Radio Classique. "Je suis plus dubitatif sur la réaction immédiate, spontanée et forcément émotive du législateur. Est-ce qu'il faut, dans la précipitation, dans l'émotion, répondre par un dispositif législatif ? Je ne suis pas sûr."
"La question des moyens me semble plus importante que la question des instruments législatifs", a commenté l'élu de Seine-Maritime. "Depuis des années, nous rognons progressivement sur nos capacités de défense, nous ne faisons pas l'effort budgétaire nécessaire pour faire en sorte que nos prisons fonctionnent dans de bonnes conditions", a déclaré ce proche du maire de Bordeaux.
Sur France Info, l'ex-ministre de l'Intérieur Claude Guéant a appelé à réfléchir "sereinement" à "des réponses respectueuses des principes de liberté. Il ne faut pas faire n'importe quoi".
"Certains ont évoqué l'éventualité d'un Patriot Act à la française. En caricaturant, je dirais qu'il est hors de question de faire Guantanamo en France (...) on ne va pas déroger à nos grands principes". Mais "il y a des procédures techniques à conduire", selon lui.
Avec AFP et Reuters