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Comment Nicolas Sarkozy veut relooker l’UMP

Nouveau nom, nouvelle organisation et nouvelles têtes… S’il redevient le patron de l’UMP samedi soir, l’ancien chef de l’État entend changer le parti du "sol au plafond". Détails de cette métamorphose annoncée.

"Si Nicolas Sarkozy est élu, il n'y aura plus d'UMP." Les propos tenus, jeudi 27 novembre, par Bruno Le Maire sur les ondes de RTL ne sont pas seulement une mise en garde destinée à effrayer les militants du parti. En réalité, le challenger de Nicolas Sarkozy dans la course à la présidence de l’UMP (avec Hervé Mariton) ne fait que résumer le projet défendu par l’ancien chef de l’État pour la refondation de la formation.

Car ce dernier ne s’en est jamais caché : s’il prend la tête de l’Union pour un mouvement populaire, c’est pour la changer "de fond en comble", l’objectif affiché par Nicolas Sarkozy étant de faire table rase d’un passé - encore récent - marqué par la bataille Copé-Fillon et la retentissante affaire Bygmalion. Mais aussi, soupçonnent ses détracteurs, de se doter d’une machine de guerre susceptible de le propulser aux portes de l’Élysée en 2017.

À quelques heures du vote où plus de 268 000 adhérents de l'UMP sont appelés à désigner par Internet leur nouveau patron, tour d’horizon des principaux changements que le favori du scrutin entend apporter au parti "de la droite et du centre" fondé en 2002 par Jacques Chirac et Alain Juppé.

-Un nouveau nom

"Je vais changer le nom du parti", indiquait dès septembre Nicolas Sarkozy dans les colonnes du "Journal du dimanche". Symboliquement, modifier l’appellation UMP scellerait les changements que l’ex-chef de l’État entend apporter aux statuts de la formation. Au risque d’occulter les débats de fond.

Cette opération est "une folie", estime Bruno Le Maire qui craint qu’elle ne prenne le pas sur la construction d’un projet politique. Plus sévère, Alain Juppé, a moqué, sur BFM TV, le peu d’ambition de cet engagement : "On peut aussi appeler ça le PMU à la place de l'UMP. Si c'est ça le changement, ça ne sera pas tout à fait fondamental".

>> À lire sur France 24 : "Sarkozy revient-il pour 'tout changer' ou 'se sauver' ?"

De son côté, François Baroin, le nouveau président de l’Association des maires de France et soutien de Nicolas Sarkozy, juge que la disparition de l'UMP "va dans le sens de l'Histoire".

"RPF, UNR, UDR, RPR, UMP, la droite gaulliste a déjà connu plusieurs identités depuis 1958", rappelle "Le Figaro". "Renommer sa formation politique a toujours été plus courant à droite, car, contrairement à la gauche, elle est davantage dans un rapport aux hommes providentiels qu'à l'idéologie fondatrice. Le Parti socialiste a, lui, un vrai rapport affectif à ses origines, à la SFIO", observe le communicant Philippe Moreau-Chevrolet, interrogé par le quotidien de droite.

Pour les adversaires de Nicolas Sarkozy, le changement de nom trahit ainsi davantage un désir d’asseoir son autorité qu’une volonté de définir une nouvelle ligne politique. S’imposer plutôt qu’imposer, en somme.

-Davantage de participation

"Ensemble, nous allons créer la grande force politique du XXIe siècle. Horizontale, numérique, moderne. Celle qui portera vos idées", a indiqué Nicolas Sarkozy dans une vidéo publiée sur Facebook le 23 novembre.

En clair, la base militante sera davantage mise à contribution par référendum. Y compris dans le projet présidentiel dont les points les plus sensibles, tel le mariage pour tous, seront soumis au vote – via Internet – des quelque 268 000 adhérents.

>> À lire sur France 24 : "Sarkozy prône l'abrogation de la loi sur le mariage homosexuel ?"

Plus largement, l’ancien chef de l’État ambitionne de décentraliser le parti. S’il est revenu sur son intention de vendre l’actuel siège de l’UMP, sis dans le XVe arrondissement de Paris, Nicolas Sarkozy est bien décidé à ne plus en faire le centre de décisions. Fini donc le temps où Paris dictait les investitures de candidats locaux au nez et à la barbe des fédérations.

Une révolution de palais au sein du parti de droite où, comme le rappelle "Le Monde", "la culture du chef a toujours dominé".

-Du sang neuf

"Il n’y aura pas de clan, pas de tendance, ni de chapelle dans la cathédrale", a lancé l’ancien locataire de l’Élysée lors d’un meeting organisé en octobre dans les Yvelines. En clair, s’il venait à être désigné à la tête de l’UMP, Nicolas Sarkozy, en chantre du "grand rassemblement", ne souhaite plus de courants satellites au sein du parti. Les mouvements tels la Droite populaire de Thierry Mariani ou encore la Droite forte des jeunes Guillaume Peltier et Geoffroy Didier n’auraient ainsi plus droit de cité.

Idéalement, Nicolas Sarkozy aimerait se débarrasser des bannières qui pourraient à l’avenir encombrer la ligne du parti. "Si jamais je devenais président de notre famille, il n’y aura pas de sarkozyste, pas de filloniste, pas de juppéiste, ni de lemairiste", a-t-il clairement annoncé dans les Yvelines.

>> À (re)voir dans l'émission Une comédie française : "Nicolas Sarkozy, toujours favori ?"

Exit donc les vieilles écoles et place au sang neuf. Alors qu’il a pris ses distances avec plusieurs éléments qui constituaient l’avant-garde de son mandat présidentiel - Nadine Morano et Rachida Dati en tête -, Nicolas Sarkozy se rapproche des jeunes forces vives de l’UMP qui, à l’instar de Gérald Darmanin, son porte-parole de campagne âgé de 31 ans, lui permettent d’incarner un certain renouveau. Ce sont d’ailleurs aux quadragénaires Nathalie Kosciusko-Morizet et Laurent Wauquiez qu’il a promis la direction du parti.

-Une primaire "ouverte"

"Je le redis : les primaires [pour la présidentielle de 2017] auront lieu, que personne n'en doute ou ne cherche à en faire un sujet de polémique", a précisé Nicolas Sarkozy au "Figaro" daté du 26 novembre. Reste que nombre de cadres au sein de l’UMP craignent que le prochain président annoncé de la formation n’essaie d’enterrer le processus figurant pourtant dans les statuts du parti. "Si nous ne travaillons pas sur l’organisation de la primaire dès l’élection à l’UMP, il sera impossible qu’elle se tienne comme prévu, à l’automne 2016, a prévenu Bruno Le Maire dans "Le Monde".

De son côté, Alain Juppé, l’un des trois candidats déclarés à la primaire (avec Xavier Bertrand et François Fillon) a demandé des "clarifications" sur le degré d'ouverture de la consultation. "Qui pourra voter et selon quelles modalités ? Le nouveau président de l'UMP devra dire ses intentions. Nous apprécierons alors si ses propositions sont acceptables ou pas", a-t-il écrit sur son blog. Le maire de Bordeaux souhaiterait en effet que la primaire soit ouverte aux sympathisants du centre, qui lui sont plus favorables.

Une hypothèse d’ouverture que Nicolas Sarkozy n’a pas exclue sauf si elle s’étend au Modem de François Bayrou, à qui il reproche le soutien à François Hollande lors du second tour de la présidentielle de 2012.