logo

Nord-Kivu : cinq condamnations à mort pour le meurtre du colonel congolais Ndala

Un officier congolais et quatre rebelles ougandais ont été condamnés à mort, lundi, pour l’assassinat du colonel Mamadou Ndala. En janvier 2014, la mort du colonel congolais, héros de la guerre contre les rebelles du M23, avait suscité l'indignation.

Fin d’un procès très suivi à Béni, dans l’est de la République démocratique du Congo. Lundi 17 novembre, le lieutenant-colonel congolais Birocho Nzanzu et quatre rebelles ougandais ont été condamnés à mort pour l'assassinat du colonel Mamadou Ndala. La cour opérationnelle militaire du Nord-Kivu est arrivée à la conclusion que la mort de Ndala avait été planifiée par des militaires congolais et exécutée par des rebelles ougandais des Forces démocratiques alliées (ADF-Nalu), installés en RDC depuis 1995.

Nzanzu "aurait servi d’intermédiaire entre l’armée congolaise et les rebelles ougandais"

Mamadou Ndala, jeune chef militaire très apprécié par ses hommes et fort de plusieurs victoires contre la rébellion du M23, avait été tué le 2 janvier par un tir de roquette ayant visé son véhicule dans les environs de Béni, alors que l'armée congolaise se préparait à lancer une opération contre les ADF. Il a été élevé au grade de général à titre posthume.

>> À voir sur France 24 : "Vidéo : en RD Congo, Beni pleure ses morts après une attaque meurtrière"

Le lieutenant-colonel Birocho Nzanzu, arrêté durant le procès après avoir été mis en cause par un témoin clé, a été condamné à mort et radié de l’armée. "Il a été reconnu coupable de terrorisme, d’appartenance à un mouvement insurrectionnel ainsi que de trahison. (…) Cet officier aurait servi d’intermédiaire entre l’armée congolaise et les rebelles ougandais des ADF-Nalu dans l’organisation de l’attentat qui a coûté la vie à ce héros de la guerre menée contre les rebelles du M23", explique Mehdi Meddeb, envoyé spécial de France 24 à Béni. Quatre rebelles ougandais, dont le chef des ADF-Nalu, Jamil Mukulu, ont eux aussi été condamnés à mort, par contumace.

Au total, 26 personnes étaient poursuivies. "Les autres peines ont suivi plus ou moins les réquisitions du ministère public : entre un et vingt ans de prison ferme pour neuf personnes dont sept militaires, tous des gradés", explique notre envoyé spécial. Peu après l’énoncé du verdict, les condamnés ont été transférés par avion vers Kinshasa.

Un verdict qui soulève de nombreuses questions

Les condamnations à mort prononcées lundi devraient être commuées en réclusion à perpétuité, la RD Congo observant un moratoire sur la peine capitale. "C’est une peine avant tout symbolique", résume Mehdi Meddeb. La loi congolaise ne prévoit pas de procédure d’appel. Les coupables pourront toutefois déposer un recours devant la Cour africaine des droits de l’Homme et des peuples, basée à Addis-Abeba, en Éthiopie. Les avocats du lieutenant-colonel Birocho Nzanzu ont évoqué cette possibilité.

Le procès étant public, de nombreux habitants de Béni ont pu assister aux audiences. "À l’annonce du verdict, les réactions ont été très contrastées entre soulagement et scepticisme puisque ce procès mené tambour battant en à peine un mois et demi laisse en suspens de nombreuses questions", explique notre envoyé spécial. En effet, beaucoup d’observateurs s’interrogent sur la teneur du procès, notamment sur la question des auteurs de l’attentat. "Sur près de 30 prévenus, le ministère public n’a pu fournir des preuves matérielles que pour trois prévenus qualifiés par leurs avocats de boucs-émissaires", explique Mehdi Meddeb.

Ces condamnations laissent une partie de l’opinion publique insatisfaite. "Beaucoup s’interrogent (…) pour savoir si les trahisons au sein de l’armée congolaise ne dépasseraient pas le seul cadre de la condamnation de ces deux officiers congolais", ajoute-t-il. Mamadou Ndala, 35 ans, avait réconcilié de nombreux habitants du Nord-Kivu avec une armée nationale généralement réputée pour son inefficacité, son indiscipline et les mauvais traitements infligés à la population civile.

L’armée congolaise, appuyée par la force d’intervention rapide de l’ONU, continue son combat au Nord-Kivu contre les nombreux groupes rebelles qui évoluent dans cette région riche en ressources minières frontalière de l’Ouganda, du Rwanda et proche du Burundi.

Avec AFP, Reuters et AP