
Les premières constatations des enquêteurs trois jours après le crash de la navette de tourisme spatial de Virgin Galactic pointent vers une responsabilité du copilote. Une experte de la sécurité spatiale évoque plutôt des problèmes de sécurité.
Après le choc de l’accident, les interrogations se multiplient sur les origines du crash, vendredi 31 octobre, de la navette de tourisme spatial de Virgin Galactic. Lundi 3 novembre, l’enquête commence à peine pour déterminer les responsabilités dans cet accident qui a coûté la vie à un pilote et mis à mal les rêves de tourisme spatial de Richard Branson, le propriétaire milliardaire de Virgin Galactic.
La National Transportation Safety Board (NTSB, le Bureau national de la sécurité des transports), en charge de l’enquête, a timidement évoqué, dimanche soir, une possible responsabilité humaine. D’autres, comme l’experte en sécurité spatiale Carolynne Campbelle, pointe du doigt la responsabiltié de Virgin Spatial.
Tous s’accordent sur le fait que l’enquête sera longue. Il faudra "probablement un an" pour connaître précisément les causes de l'accident, a même estimé la NTSB. Retour sur les deux thèses actuellement avancées.
Une erreur du co-pilote ? "Une erreur du pilote est une possibilité", a affirmé Christopher Hart, le président de la NTSB lors d’une conférence de presse organisée dans la nuit dimanche à lundi.
Les enquêteurs envoyés sur les lieux du crash, dans le désert du Mojave (ouest des États-Unis), ont constaté qu’une commande pour ralentir la descente de la navette en vue de son atterrissage avait été actionnée prématurément. Il s’agit d’un élément de la queue spécifique à SpaceShipTwo, qui ne doit être déployé que sous certaines conditions. Le co-pilote n’avait pas, selon les premières conclusions, respecté la procédure.
Les enquêteurs vont maintenant se pencher sur les raisons qui ont poussé le copilote à agir de la sorte. La NTSB va, notamment, s’intéresser à l’entraînement reçu par ce pilote et à la procédure de sécurité en vol mise en place par Virgin Galactic.
Christopher Hart a aussi indiqué qu’il était trop tôt pour affirmer que l’"erreur" de pilotage était la cause principale de l’accident. Cette thèse serait la moins pénible pour les affaires de Richard Branson : si l’erreur est humaine et qu’il n’y a pas de défaut de conception de sa navette, ses projets de tourisme spatial en pâtiraient moins.
Des avertissements de sécurité ignorés ? Il en va tout autrement avec les accusations de Carolynne Campbell. Cette experte en sécurité spatiale rattachée à l’Association internationale pour la promotion de la sécurité spatiale (IAASS) a affirmé, dimanche, que Virgin Galactic avait ignoré de multiples mises en garde concernant la sécurité de SpaceShipTwo.
"L'explosion [de la navette] n’est pas une surprise. Je suis désolé de le dire mais c’est exactement ce à quoi je m’attendais", a-t-elle affirmé au quotidien britannique "Daily Telegraph". Elle explique que depuis 2007, Virgin Galactic a été averti plusieurs fois des dangers du système de propulsion de la fusée. Elle soutient même avoir appelé directement la société en 2010 pour évoquer les problèmes de sécurité. Le groupe aurait ignoré toutes ces mises en garde.
Le danger, d’après Carolynne Campbell, viendrait du carburant utilisé par Virgin Galactic. Le combustible de propulsion, à base de plastique, ne serait pas stable, contrairement à ce qu’affirme depuis plusieurs années le groupe de tourisme spatial. L’utiliser serait comme faire une "partie de roulette russe", souligne cette experte qui rappelle que le même combustible avait déjà été mis en cause lors de l’explosion d’un prototype de fusée de Virgin Galactic en 2007. Trois personnes avaient alors trouvé la mort.
Carolynne Campbell a cependant reconnu ne pas avoir "tous les éléments" en sa possession pour émettre un avis définitif. Elle n’est pas la seule à évoquer des problèmes de sécurité au sein du programme spatial de Virgin Galactic. Tom Bower, le biographe de Richard Branson, a souligné, dimanche, que "tous les ingénieurs à qui [il] avait pu parler avaient reconnu que le projet était très dangereux".
Richard Branson a réagi à ces critiques, dimanche. "Je trouve légèrement irresponsables que des personnes qui ne savent pas de quoi elles parlent peuvent ainsi s’exprimer avant que la NTSB ne fasse ses déclarations".