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Les chrétiens fuient Mossoul, "un crime contre l'humanité" selon l'ONU

La population chrétienne de Mossoul, dans le nord de l'Irak, a fui la ville le 19 juillet, après un ultimatum de l'État islamique en Irak et au Levant. Des faits qui, selon Ban Ki-moon, peuvent être qualifiés de crime contre l'humanité.

Présente depuis près de deux millénaires dans la région, la population chrétienne de Mossoul, dans le nord de l'Irak, a fui la ville, samedi 19 juillet, avant l’expiration de l’ultimatum de l'État islamique en Irak et au Levant (EIIL). Le groupe djihadiste, réputé pour sa brutalité, leur avait intimé l’ordre de se convertir à l'islam ou de payer l'impôt des non-musulmans, la "jizya", pour rester dans le "califat" qu’ils ont instauré, à défaut de quoi ils seraient exécutés par le glaive.

Les habitations des chrétiens avaient été marquées auparavant par la lettre "N", comme "Nazaréen", signifiant qu’elles étaient saisies et désormais "biens immobiliers propriétés de l'État islamique".

Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a affirmé dimanche que ce préjudice envers les chrétiens de Mossoul pouvait être considéré comme un crime contre l'humanité. Dans un communiqué, il a réaffirmé "que les attaques systématiques contre des civils en raison de leur origine ethnique ou de leur appartenance religieuse peuvent constituer un crime contre l'humanité dont les auteurs doivent rendre des comptes".

"Mossoul se vide de ses chrétiens"

Plusieurs centaines de familles ont pris le chemin de l’exil pour se réfugier entre Qaraqosh, Erbil, Dohouk et d'autres villes du nord de la zone autonome du Kurdistan irakien, qui a été en majorité épargnée par les violences qui sévissent dans le pays.
La communauté chrétienne de Mossoul, la première ville irakienne à tomber aux mains des insurgés de l’EIIL, il y a un mois, s'élevait à environ 60 000 personnes il y a dix ans. Selon le patriarche chaldéen Mgr Louis Sako, interrogé par l’AFP, il y avait encore 25 000 chrétiens présents dans Mossoul à la veille de l’expiration de l’ultimatum. "Pour la première fois dans l'histoire de l'Irak, Mossoul se vide de ses chrétiens", a-t-il déploré,
Des habitants sunnites de Mossoul, bravant leur peur de s'exprimer, ont signifié dimanche leur solidarité avec leurs concitoyens chrétiens. "Nous considérons que c'est injuste et contraire aux principes de l'islam", a déclaré l'un d'eux à l'AFP. "Des chrétiens ont vécu à Mossoul pendant plus de 1 000 ans", a-t-il souligné. "Leur départ est une grande perte". Par ailleurs, des responsables des villes saintes chiites de Kerbala et Najaf, accueillant déjà de très nombreux réfugiés chiites, ont déclaré que les portes de leurs cités étaient ouvertes aux chrétiens.
Appel à un front uni contre l 'EIIL
Incapable d’endiguer l’avancée des djihadistes, qui se sont emparés de pans entiers du territoire dans le nord, le centre et l'ouest du territoire irakien, le Premier ministre chiite Nouri al-Maliki a condamné dans un communiqué l'éviction des chrétiens. Les exactions commises envers les minorités religieuses révèlent selon lui  "la nature criminelle et terroriste de ce groupe et le danger qu'il représente".  Il a pressé la communauté internationale de faire front uni contre les radicaux et les extrémistes.
Toutefois, pour Ahmed Chalabi, une figure politique chiite et un des concurrents de Nouri al-Maliki pour le poste de Premier ministre, ce dernier ne peut se dégager de toute responsabilité. Dans un communiqué, il a en effet blâmé le gouvernement qui "a failli à sa tâche de protéger les citoyens irakiens" dont les chrétiens "font partie intégrante".
Le département d'État américain a également condamné "la persécution systématique des minorités" par l'EIIL, et à Rome, le pape François a dénoncé dimanche les persécutions des chrétiens d'Irak, "chassés de chez eux" et "dépouillés de tout".
Avec AFP et Reuters