Deux ans après le quadruple meurtre de Chevaline, les enquêteurs ont exploré deux nouvelles pistes : un contrat avec un Irakien qui aurait été engagé pour tuer la famille Al-Hilli et la mort suspecte de l'ex-mari de la mère assassinée.
La tuerie de Chevaline n’a pas encore fini de dévoiler tous ses mystères. Presque deux ans après le quadruple meurtre en Haute-Savoie, les questions restent encore en suspens : un contrat a-t-il été passé pour commanditer le meurtre des Al-Hilli ? Quels sont les secrets de la famille ? Qui est vraiment Iqbal, l’épouse assassinée ? Des interrogations auxquelles tente de répondre la gendarmerie d’Annecy, qui vient d’explorer deux nouvelles pistes : celle d’un Irakien de 45 ans suspecté d'avoir été engagé comme tueur à gages et la mort suspecte de l'ex-mari caché d'Iqbal al-Hilli.
Le 5 septembre 2012, la famille britannique d’origine irakienne était retrouvée sur le bord d'une route, à Chevaline, en Haute-Savoie. Le corps de Saad al-Hilli, de sa femme, Iqbal, et de sa belle-mère gisaient sans vie dans la voiture, plusieurs balles nichées dans la tête. Celui d'un cycliste français, Sylvain Mollier, était retrouvé à côté du véhicule. Seules les deux
filles du couple ont miraculeusement survécu au drame.
L’hypothèse d’un contrat
Les gendarmes de la section de recherches de Chambéry, qui enquêtent sur l'affaire depuis un an et demi, ont multiplié les hypothèses et placé trois personnes en garde-à-vue :
Zaid al-Hilli, frère de Saad, en juin 2013, un ancien
policier municipal haut-savoyard en février 2014, et dernièrement un Irakien de 35 ans, tous trois mis hors de cause.
Ce dernier était déjà connu des services de police et avait écopé d’u ne peine de prison pour violences, aide au séjour irrégulier et association de malfaiteurs. C’est en cellule qu’il aurait mentionné à son co-détenu qu'il s'était vu "proposer un contrat visant un Irakien vivant à Londres pour la somme de 100 000 euros", selon le procureur de Chambéry, Eric Maillaud.
Placé en garde-à-vue à Lille pendant trois jours, l’homme a finalement été mis hors de cause. Les enquêteurs ont pu établir qu’il était en Suisse au moment des faits. "Il a nié toute participation à quelque contrat que ce soit", a indiqué Eric Maillaud. En outre, "on n’a pas pu établir de lien avec la famille Al-Hilli", a ajouté le magistrat.
Une mort suspecte
Est-ce alors dans le passé d’Iqbal al-Hilli que les enquêteurs trouveront des réponses ? L’épouse de l’ingénieur avait dissimulé à sa famille un séjour aux États-Unis, effectué entre février 1999 et décembre 2000. Elle avait encore moins évoqué le mariage éclair qu’elle y avait contracté dans le Mississipi avec un Américain, Jim Thompson.
Ironie du sort ou coïncidence troublante, ce dernier est mort le 5 septembre 2012… le même jour que la famille al-Hilli. Officiellement, il a été victime d’une crise cardiaque, mais sa famille a rapidement émis des doutes sur les causes du décès. Un proche affirme qu’il a été tué par une flèche empoisonnée, sans donner plus de détails.
Interviewée par les médias britanniques, Joy Martinolich, la fille du défunt, évoque un acte de malveillance, voire une conspiration : "Si vous vouliez tuer quelqu’un et ne pas être attrapé, vous feriez quelque chose qui pourrait passer pour une crise cardiaque. C’est plausible vu qu’il était légèrement en surpoids, qu’il était assez stressé et qu’il allait sur ses 60 ans".
"Les étrangetés du dossier"
Entre l’Anglo-Irakienne et l’Américain, c'était une union de circonstance. Iqbal, chirurgien-dentiste très éduquée, avait convaincu Jim Thompson, amateur de motos et de gros cigares, de 13 ans son aîné, de l’épouser pour obtenir sa carte verte. Rapidement divorcée, Iqbal a quitté les États-Unis en 2001 pour les Émirats arabes unis. C'est là qu'elle a rencontré Saad, puis l'a épousé au Royaume-Uni en 2004. Le père de ses deux filles n’était pas au courant de ce mariage blanc. Pas plus que leurs proches.
La police française, elle, a découvert le pot-aux-roses. "Ça fait partie de ces étrangetés que révèle ce dossier", a affirmé à
France 3 Eric Maillaud, selon qui rien ne permet, à ce jour, de faire le lien entre les deux événements. "À force de creuser la vie des victimes dans tous les sens, on met au jour des événements parfois étranges qui ne sont pas nécessairement en lien direct avec l’enquête", a-t-il poursuivi.
Les enquêteurs s’orientent aujourd’hui vers la piste d'un tueur local, sans néanmoins faire l’impasse sur les mystères de la famille. Une vingtaine de gendarmes travaillent encore à plein temps sur l'affaire côté français.
Avec AFP