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La justice égyptienne ouvre une enquête après de nouveaux cas de viols

Plusieurs femmes ont été victimes d’agressions sexuelles place Tahrir, dimanche soir, alors que la foule célébrait l’investiture du président al-Sissi. Pour la première fois, des suspects ont été arrêtés sur place et une enquête a été ouverte.

Le procureur général égyptien a ouvert, lundi 9 juin, une enquête à la suite des dernières agressions sexuelles collectives visant des femmes, dimanche 8 juin, sur la place Tahrir, lors des célébrations de l’investiture du maréchal Sissi à la tête de l’État.

Sept suspects ont été arrêtés le jour-même et sont actuellement interrogés par la police, a annoncé le ministère de l’Intérieur égyptien. C’est la première fois que les forces de l'ordre interviennent et arrêtent des suspects sur les lieux de l’attaque.

Les sept hommes arrêtés par la police, âgés de 16 à 49 ans, sont soupçonnés d'être impliqués dans trois attaques contre des femmes, qui ont eu lieu dimanche soir.

Couverte de bleus et de sang

Une vidéo, abondamment partagée sur les réseaux sociaux depuis dimanche soir, est l’un des points de départ de l’enquête. Sur les images, qui semblent avoir été filmées avec un téléphone portable, on voit une jeune femme quasiment nue, couverte de bleus et de sang, escortée vers une ambulance par un policier et quelques hommes qui tentent de la protéger de la foule des agresseurs.

La victime est une étudiante de 19 ans, ont annoncé les autorités. Elle a été transportée dans un hôpital après avoir été évacuée de la place, et était dimanche soir "dans un état critique", d’après la police.

D’après le groupe de lutte contre le harcèlement sexuel "Shouft Taharoush" ("J'ai vu du harcèlement"), au moins cinq femmes ont été attaquées sexuellement par des foules d’hommes sur la place Tahrir dimanche soir. Plusieurs autres cas d’attaques contre des femmes ont également été recensés samedi soir, toujours en marge de rassemblements célébrant l’investiture d’al-Sissi.

"Le harcèlement sexuel sur Tahrir est absolument dégoûtant. Je n'ai pas d'autres mots. Si choqué et honteux", déclarait lundi un Égyptien sur Twitter, où la vidéo a été partagée à de très nombreuses reprises.

"Entre novembre 2012 et juin 2013, environ 250 cas de harcèlement, d'agression sexuelle ou de viols sous la menace d'armes lors de manifestations au Caire ont été recensés", a rappelé Fathi Farid, un militant de l'association.

De nouvelles mesures contre les violences sexuelles

Depuis le soulèvement de 2011 contre le régime d’Hosni Moubarak, les attaques collectives contre des femmes sont en effet devenues régulières lors des grands rassemblements, que ce soit lorsque les militaires géraient la transition ou sous la présidence de Mohamed Morsi.

Les agressions sexuelles collectives ont commencé à être médiatisées, après que des femmes journalistes étrangères ont été attaquées sur la place Tahrir. Près de 100 femmes ont notamment été agressées sexuellement lors des quatre jours de manifestations monstre de juin et juillet 2013 réclamant la destitution du président islamiste Mohamed Morsi, selon Human Rights Watch.

Le harcèlement sexuel, plus souvent verbal que physique, est par ailleurs omniprésent en Égypte. Selon une étude de l'ONU, parue en 2013, plus de 90 % des Égyptiennes affirment en avoir été victime, qu'elles soient voilées ou non.

Les organisations de défense des droits de l’Homme ont demandé à plusieurs reprises aux autorités de prendre des mesures pour prévenir les attaques sexuelles sur la place Tahrir, jusque-là sans succès. La police est en général absente des manifestations qui ont lieu sur la place.

La présidence égyptienne a cependant annoncé le 5 juin qu’une série de nouvelles sanctions pour punir le harcèlement sexuel, allant de l'amende à la prison ferme, venaient d’être adoptées.

Avec AFP