Des élus républicains déplorent qu'il ait fallu relâcher cinq détenus de Guantanamo pour obtenir la libération du sergent Bowe Bergdahl, par ailleurs considéré comme un déserteur. Barack Obama, lui, tente de mettre un terme à la controverse.
Depuis Varsovie, où il effectue une visite officielle, le président américain Barack Obama, s’est employé, mardi 3 juin, à couper court à la controverse soulevée par l’échange de prisonniers effectué avec des Taliban afghans pour la libération du sergent américain Bowe Bergdahl. "Les États-Unis ont toujours eu une règle sacrée : nous ne laissons pas derrière nous nos hommes et femmes en uniforme, a-t-il insisté lors d’un entretien télévisé. Si un Américain est en captivité, nous devons le ramener. Point. Point final."
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Jusqu’alors seul soldat américain encore détenu par les Taliban, Bowe Bergdahl a été libéré samedi 31 mai aux termes d'un accord d’échange avec cinq cadres talibans détenus dans la prison américaine de Guantanamo. Cet arrangement a fait l'objet de longues négociations sous l'égide du Qatar, qui a servi d'intermédiaire.
"Ne pas rater cette occasion"
Mais l’euphorie suscitée par l’annonce de la libération du sergent a rapidement fait place à la polémique. Dès dimanche 1er juin, le sénateur républicain John McCain a critiqué un accord ayant abouti à la libération de dangereux Taliban qui risquaient de retourner au combat. "D’autres Taliban qui ont été libérés sont retournés au combat, nous en avons la preuve", a indiqué le sénateur de l’Arizona. "Je suis perturbé par le fait que les Taliban aient désigné eux-mêmes les prisonniers qui devaient être libérés."
Sur ce point, Barack Obama a assuré que les États-Unis "garderaient un œil sur eux". Avant de se défendre : "Je ne le ferais pas si je pensais que c'était contraire à la sécurité nationale de l'Amérique".
Plusieurs élus républicains au Congrès s'insurgent, quant à eux, de ne pas avoir été mis officiellement au courant de l’opération 30 jours avant son exécution, comme la procédure constitutionnelle l'exige. Deux sénateurs ont fait savoir au "New York Times", qu’un conseiller sur les questions de sécurité à la Maison Blanche les avait appelés pour s’excuser de ne pas nous les avoir tenus au courant de l'accord. "Le processus a été écourté parce que nous voulions être sûrs de ne pas rater cette occasion", s'est justifié, mardi 3 juin, le président américain.
"Bergdahl était un déserteur"
Une autre polémique concerne la personnalité même de Bowe Bergdahl. Certains militaires, dont des membres de son unité, ont affirmé sur la chaîne d’information CCN que le soldat avait abandonné son poste lorsqu’il a été capturé le 30 juin 2009, dans la province de Paktika (est de l'Afghanistan). Plusieurs de ses anciens frères d’armes l’accusent même d’avoir tenté de déserter pour fuir en Inde.
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Dans une tribune publié sur le site "Daily Beast", Nathan Bradley Bethea, un ancien officier qui a participé aux opérations de recherche, affirme que Bowe Bergdahl, alors âgé de 23 ans, avait quitté la base à pied, sans son casque ni son fusil, mais avec une boussole. "Il est en sécurité et il est maintenant temps de dire la vérité, écrit-il. Et la vérité est que Bergdahl était un déserteur et que des soldats de son unité sont morts en tentant de le retrouver." Selon Nathan Bradley Bethea, six soldats américains sont morts en 2009 alors qu’ils tentaient de retrouver le sergent.
De son côté, le général Martin Dempsey, le chef d'état-major interarmées, préfère rester prudent. "Les questions relatives au comportement de ce soldat en particulier sont à distinguer de nos efforts pour retrouver n'importe quel Américain en service détenu par l'ennemi". Et de conclure : "Concernant les circonstances de sa capture [...] nous regarderons les faits. Comme tout Américain, il est innocent tant qu'il n'est pas déclaré coupable".
Avec AFP