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Présidentielle égyptienne : victoire sans surprise ni ferveur pour al-Sissi

Sans surprise, l'ancien chef de l’armée égyptienne, Abdel Fattah al-Sissi, a très largement remporté l'élection présidentielle avec plus de 90 % des voix, malgré une faible participation qui risque d'entamer sa légitimité.

La victoire du maréchal retraité Abdel Fattah al-Sissi à la présidentielle égyptienne ne présente aucune surprise. Selon des sources judiciaires, l'ex-chef de l'armée a recueilli 93,3 % des suffrages exprimés lors du scrutin qui s'est étalé sur les trois derniers jours.

Le candidat de gauche Hamdine Sabahi, son unique adversaire, n’obtiendrait quant à lui que 3 % et les bulletins nuls représenteraient 3,7 %, selon les calculs du mercredi 28 mai, alors que les opérations de dépouillement étaient quasiment terminées.

Les partisans de l'ancien chef de l'armée n’ont pas caché leur enthousiasme dès que les premiers résultats ont commencé à circuler dans les rues du Caire. Ces derniers ont lancé des feux d'artifice, brandi des drapeaux égyptiens et fêté la victoire de leur candidat en klaxonnant dans les rues bondées de la capitale. Un millier de personnes ont ainsi convergé vers la place Tahrir, symbole de la "révolution du Nil" en 2011 qui avait fait souffler un vent démocratique et abouti à la chute d'Hosni Moubarak.

Sur la place, des vendeurs proposaient des figurines en habits militaires, rappellant la forte influence de l'armée dans le pays. "Nous sommes joyeux car Sissi a recueilli tellement de voix, nous sommes ici pour célébrer la victoire", a déclaré Kawther Mohamed, venu place Tahrir avec ses deux filles.

Une faible participation qui affaiblit Al-Sisi

Malgré cette écrasante victoire, le faible taux de participation, estimé à 44,4 %, pourrait peser sur la légitimité du maréchal, artisan du coup d'État qui a renversé en juillet dernier le premier président démocratiquement élu, l'islamiste Mohamed Morsi. Une légitimité indispensable pour remettre le pays sur la voie de la croissance et lutter contre la pauvreté et le chômage dans le pays le plus peuplé de la région.

Soucieux d'un soutien populaire massif, Abdel Fattah al-Sissi avait appelé les Égyptiens à voter. Mais les Égyptiens n'ont guère montré d'empressement mercredi à se rendre aux urnes lors de la troisième journée de scrutin rajoutée au dernier moment pour tenter de convaincre les abstentionnistes et donner une légitimité accrue au favori.

Dans un pays divisé depuis la révolution populaire qui a renversé Hosni Moubarak en 2011, l'abstention est imputée à un mélange d'indifférence politique et d'opposition à revoir un militaire au pouvoir. Le mécontentement des jeunes face à la restriction des libertés publiques est également cité, de même que les appels au boycott des islamistes, cibles d'une vaste opération de répression.

L'abstention peut aussi s'expliquer par le fait qu'Abdel Fattah al-Sissi n'a pas clairement précisé comment il comptait résoudre les différents défis auxquels le pays est confronté.

Des soupçons de fraude

Interrogé sur la légitimité du scrutin, le directeur de campagne d'Hamdine Sabahi a déclaré qu'il y avait eu des fraudes. "Jusqu'à hier le taux de participation était bien plus bas que ce qui a été annoncé aujourd'hui. Et d'un seul coup, le taux de participation atteint 46 % ?", s'est interrogé Hossam Moanes.

L'organisation Human Rights Watch estime que la répression qui a suivi la déposition de Mohamed Morsi n'a pas créé le climat serein nécessaire au bon déroulement du scrutin. "Les interpellations massives de milliers d'opposants politiques, qu'ils soient islamistes ou non, a verrouillé la scène politique et ôter tout leur sens à ses élections", a estimé Sarah Leah Whitson, directrice de HRW pour le Proche-Orient et l'Afrique du Nord.

Avec AFP et REUTERS