
Interdit lors de la vague de décisions de justice répressives intervenues en début de semaine, le mouvement de jeunesse qui avait lancé la contestation contre l’ancien président Hosni Mubarak, fait appel et annonce de nouvelles manifestations.
Lors d’une conférence de presse mardi 29 avril au Caire, un porte-parole du Mouvement de jeunesse du 6-Avril a qualifié l’interdiction de ses activités par un tribunal de la capitale égyptienne la veille de "jugement politique".
"Le régime actuel veut monopoliser le pouvoir et faire taire toutes les voix de l'opposition réelle", a dénoncé Mohamed Kamal, promettant que le groupe poursuivrait ses activités. Le Mouvement du 6-Avril appelle sur sa page Facebook à une nouvelle manifestation mercredi soir.
L’avocat du groupe a annoncé le dépôt d’un recours contre le jugement du 28 avril, soulignant qu’il avait été rendu le même jour que la condamnation à mort de plusieurs centaines de membres des Frères musulmans, le parti du président déchu Mohamed Morsi.
Le politologue d’origine égyptienne Omar Ashour, qui enseigne à l’Institut d’études arabes et islamiques de l’université d’Exeter, souligne que les différents niveaux de répression qui ont visé les deux groupes d’opposition cette semaine reflètent leur influence dans le pays.
"Le Mouvement du 6-Avril est centré sur la jeunesse et les classes moyennes, ce n’est pas une organisation couvrant l’ensemble des villes du pays comme les Frères musulmans", explique-t-il à FRANCE 24. "Le nombre de leurs adhérents n’est pas comparable non plus."
Au cœur de la révolution contre Hosni Moubarak
Le Mouvement de jeunesse du 6-Avril, nommé d’après la date d’une grève considérée comme le début de la contestation contre le président Hosni Moubarak en 2008, est très actif sur internet. Regroupant en majorité de jeunes urbains aspirant à une démocratie laïque, il a joué un rôle important dans la révolution de 2011.
Ensuite impliqués dans l’opposition au président islamiste Mohamed Morsi, ses membres rejettent aujourd’hui les militaires qui l’ont renversé sous la direction d’Abdel Fattah al-Sissi, alors chef d’État-major. Ce dernier est candidat à l’élection présidentielle du mois prochain.
Risque de paralysie
Après l’arrestation de trois dirigeants du Mouvement du 6-Avril et leur condamnation à des peines de prison fin 2013, l’interdiction de l’organisation pour "atteinte à l’image de l’Égypte et intelligence avec l’étranger" lance un nouveau signal. "En s’attaquant à l’un de leurs anciens partenaires, les militaires montrent qu’ils ne tolèrent plus de mouvements qu’ils ne contrôlent pas", estime Omar Ashour.
Selon lui, la poursuite des activités du mouvement risque de se heurter au même type de répression que celle qui a frappé les Frères musulmans ces derniers mois. "Si les militaires attaquent leurs domiciles, les kidnappent et tirent sur leurs manifestants, ils se retrouveront paralysés", avertit l’universitaire.
Le correspondant de Radio France Internationale au Caire, Alexandre Buccianti, précise que le Mouvement du 6-Avril est également menacé par ses propres divisions depuis une scission interne sur l’attitude à adopter face au gouvernement des Frères musulmans sous la présidence Morsi.