
Le Premier ministre irlandais Enda Kenny a assuré vendredi qu’il y avait "une dynamique propre" à Dublin qui attire de plus en plus de sociétés de l’Internet. Une manière de répondre au président français qui a critiqué le choix irlandais de Yahoo!.
Le déménagement des activités européennes de Yahoo! en Irlande continue à faire des vagues. Cette fois-ci, c’est le Premier ministre irlandais Enda Kenny qui a ajouté son grain de sel à cette affaire. “Notre impôt sur les sociétés [12,5 % contre 33,33 % en France, ndlr] a été un critère d’attractivité pour les sociétés, mais ce n’est pas la seule raison d’investir en Irlande”, a affirmé Enda Kenny, vendredi 7 février lors d’une conférence de presse à l’OCDE. Il a ajouté qu’avec “toutes ses sociétés qui s’implantent chez nous, cela crée une dynamique, une énergie et une structure propre”.
Une manière pour le chef du gouvernement de répondre indirectement aux critiques du président français. François Hollande avait, en effet, regretté la décision de Yahoo! de s’installer en Irlande en marge d’une visite surprise au site vente-privée.com, jeudi 6 février. “Au niveau européen comme au niveau mondial, on doit faire en sorte que l'optimisation fiscale, c'est-à-dire la tentation de certains grands groupes [...] de s'installer là où l'on paie moins d'impôts, puisse être remise en cause”, a estimé le chef de l’État. Sans jamais citer nommément Yahoo, il a promis, en outre, d’aborder cette question lors de sa rencontre avec le président américain Barack Obama, le 11 février.
Reste qu’officiellement, il n’y a pas de motif fiscal à la réorganisation “made in Dublin” de Yahoo. Il s’agirait, en fait, de suivre un mouvement mondial voulu par Marissa Mayer, la PDG du portail américain. Lors de sa prise de fonction en 2012, la transfuge de Google avait annoncé son intention de rationaliser la structure du groupe. Elle voulait que chaque zone géographique soit gérée par une seule entité. Pour l’Europe, mais aussi l’Afrique et le Moyen-Orient, Yahoo Mail, Meteo, Finances et Flickr (le site d’hébergement de photos), dépendront donc de Dublin, dès le 21 mars prochain.
Et les données personnelles ?
Une manière de rentrer dans les rangs. Jusqu’à présent, Yahoo! était le seul des géants américains du Net à préférer la “territorialité” de ses activités. En clair, le site disposait d’un bureau dans chaque pays pour s’occuper des affaires locales. Mais la tentation irlandaise, une destination permettant aux Google et consorts d’économiser beaucoup d’argent, a dû être trop forte pour Marissa Meyer, qui cherche depuis plus d’un an à redresser les comptes de Yahoo!.
Mais ce choix pouvait difficilement intervenir à un pire moment. Depuis plusieurs mois, le choix irlandais des principaux géants du Web (Google, Facebook, Apple, Amazon) agace au plus haut point plusieurs pays européens, dont la France. Mardi 5 février, le site du magazine “Le Point” assurait, ainsi, que Paris venait de réclamer un milliard d’euros de redressement fiscal à Google pour avoir, notamment, choisi Dublin comme principal plaque tournante d’un montage lui permettant de payer très peu d’impôts en France. Si l’information n’a été confirmée ni par Google, ni par Bercy, elle rappelle, néanmoins, l’importance fiscale de l’Irlande pour les bons comptes de ces multinationales.
En outre, le déménagement en Irlande aura aussi un effet sur la gestion de données personnelles. Yahoo! change, à cette occasion, les conditions d’utilisation de ses services et précise que, dorénavant, le portail est “susceptible d'accéder, de conserver et de divulguer vos informations et votre contenu [...] notamment à ses sociétés affiliées dans le monde entier afin de vous fournir les services Yahoo! de manière efficace”. Ceux qui ne seraient pas d’accord avec les nouvelles règles du jeu ont toujours le choix, d’après Yahoo!, de fermer leur compte.