L'accord sur la régulation du nucléaire iranien a été salué en Iran, où le ministre des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, a été accueilli en héros dimanche soir. Pour les Iraniens, la levée des sanctions suscite de vifs espoirs.
À Téhéran dimanche soir, les négociateurs de l’accord historique conclu à Genève ont été accueillis en héros. Selon Associated Press, des dizaines de personnes, essentiellement des étudiants, se sont déplacées, dimanche 24 novembre, pour accueillir la délégation, et en tête de file, Mohammad Javad Zarif, devenu pour l’occasion "l’ambassadeur de la paix".
Les supporters enthousiastes brandissaient des drapeaux de la République islamique, des fleurs, et des portraits du ministre iranien des Affaires étrangères, en scandant : "non à la guerre, aux sanctions, à la capitulation, aux insultes".
Sur
Facebook, près de 164 000 personnes ont cliqué sur la mention "j'aime" du commentaire du chef de la diplomatie, lorsqu'il a annoncé dimanche matin la conclusion d'un accord sur le
nucléaire, a rapporté le quotidien iranien Haft-e Sobh. Sur
Twitter, même déferlement de réactions enthousiastes après le tweet de Zarif : "nous avons conclu un accord", retweeté près de 6000 fois.
La presse unanime
Lundi, la quasi totalité des journaux iraniens saluait l'accord nucléaire avec les grandes puissances, en mettant l'accent sur le succès personnel du chef de la diplomatie Mohammad Javad Zarif.
"Ce qui s’est passé à Genève est une reddition" de Téhéran
Interrogé par FRANCE 24, Abolhassan Bani Sadr a décrit l'accord de Genève comme une reddition du régime iranien. Le premier président iranien élu au suffrage universel en 1980, contraint à l'exil, vit aujourd'hui en France sous protection policière.
"Le régime iranien n’avait pas d’autres choix que d’accepter cet accord, vu qu’il s’était lui-même mis dans une impasse. L’économie du pays est à bout de souffle, le régime est détesté par la population, de par la répression et la corruption insupportables qui le caractérisent, explique-t-il. Dans ce contexte, ce qui s’est passé à Genève est une reddition, puisque le régime a tout cédé, sans rien obtenir en échange. En acceptant un contrôle permanent sur son programme nucléaire, il a accepté un contrôle permanent de l’économie iranienne, via les sanctions, par l’économie dominante, c'est-à-dire l’Occident. Or tant que ce programme nucléaire existera, ce contrôle existera".
"Ici, en Iran, tout le monde est content", titre en une le quotidien réformateur
Etemad qui publie un reportage racontant, à partir de témoignages recueillis dans les rues de plusieurs villes, mais aussi des réseaux sociaux, l'impatience des Iraniens restés réveillés toute la nuit de samedi à dimanche pour attendre le résultat des négociations de Genève.
Pour le quotidien réformateur Arman, il faut décerner "une médaille d'or à Zarif". Le journal publie en une une grande photo de Zarif à son arrivée à Téhéran. Assis sur un fauteuil, il a pris sur ses genoux Armita, la petite fille de Dariush Rezaï-Nejad, un scientifique nucléaire, tué dans un attentat en 2011.
Plusieurs titres conservateurs jugeaient toutefois que les États-Unis n'étaient pas "dignes de confiance".
Un bol d’air frais pour les Iraniens
Dans un pays en récession, où la population subit de plein fouet les
sanctions économiques, l’accord, négocié dans la nuit de samedi à dimanche, suscite en effet de vifs espoirs. Cette mesure devrait considérablement soulager les Iraniens, qui pâtissent depuis trente ans de lourdes restrictions économiques et d’une pénurie de produits d’importation.
"Ils ont trouvé un accord : ils veulent alléger les sanctions, et nous pouvons poursuivre l'enrichissement d'uranium. Tout cela est positif et plein de promesse. Et cela soulage la population", estimait un autre habitant de Téhéran.
Les effets de l’accord se faisaient déjà sentir dimanche. Dans les banques et les bureaux de change, le Rial, la devise locale, reprenait de la valeur par rapport au dollar, selon
Europe 1, sur place, une première depuis sept ans dans le pays. Pour le reste, les Iraniens devront faire preuve d'un peu de patience.
Le ministre iranien des Affaires étrangères, qui s’est exprimé à la télévision d’État dimanche soir, depuis l’aéroport de Téhéran, a annoncé : "dans quelques semaines, sans doute à la fin de l'année - nous allons initier la première phase. Bien sûr il est impossible de mettre en œuvre tous les termes de l'accord en un jour. La première phase prendra six mois." Six mois de test durant lesquels les Iraniens seront observés au plus près.
Avec dépêches AP et AFP