
Washington a classé mercredi les groupes islamistes armés nigérians Boko Haram et Ansaru comme organisations terroristes. Objectif : soutenir le Nigeria dans sa lutte contre ces formations accusées d'être liées à Al-Qaïda au Maghreb islamique.
Il a fallu des mois pour que le département d'État américain se décide. C'est désormais chose faite : la Maison blanche a inscrit, mercredi 13 novembre, le groupe armé islamiste Boko Haram et le mouvement djihadiste Ansaru, opérant tous deux au Nigeria, sur sa liste des organisations étrangères considérées comme terroristes. Un choix qui implique de facto le gel des avoirs de ces deux organisations dans les banques américaines et le blocage de toute transaction économique ou financière.
Selon les critères américains, une entité est considérée comme terroriste lorsqu'elle mène des actions terroristes contre les intérêts américains, qu'elle en est capable, ou qu'elle en manifeste l'intention. Les États-Unis s'inquiètent en fait d'une internationalisation de ces groupes nigérians.
Liens avec Aqmi
Si Boko Haram et Ansaru sont "des organisations terroristes centrées sur le Nigeria", elles entretiennent "des liens avec Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi)", constate le département d'État. Un responsable a évoqué "des entraînements et un financement limité" fournis par Aqmi à ces organisations, lesquelles regarderaient aujourd'hui au-delà de leurs frontières, vers le Niger et le Mali. Ces deux formations sont responsables de la mort de centaines de personnes lors d'attentats perpétrés dans le nord-est et le centre du Nigeria, y compris des attaques visant des églises et des mosquées, ainsi que le siège de l'antenne locale des Nations unies à Abuja en 2011.
En inscrivant ces deux formations sur leur liste noire du terrorisme, la Maison Blanche a voulu manifester son soutien au Nigeria, "un partenaire stratégique" selon les termes d'un responsable du département d'État. Les deux gouvernements "se battent ensemble" contre le "terrorisme" islamiste, a-t-il ajouté.
"Le Nigeria doit éradiquer l'extrêmisme religieux"
La Maison blanche a également rappelé aux autorités nigériannes ses exigences en matière de lutte antiterroriste, en les incitant à adopter, de leurs côtés, une stratégie plus large pour éradiquer l'extrémisme islamiste dans toute la région. "Nous encourageons le Nigeria à poursuivre son approche antiterroriste globale en utilisant efficacement les outils répressifs, en créant des conditions économiques favorables et en s'assurant que les droits de l'Homme sont protégés et respectés", a souligné Lisa Monaco, conseillère de Barack Obama pour les questions de sécurité intérieure et d'antiterrorisme. Washington a souvent critiqué Abuja pour des "violations des droits de l'Homme" lors d'offensives militaires depuis le mois de mai contre Boko Haram.
Abuja, par la voix de son ministre de la Justice, Mohammed Adoke, a "salué le gouvernement américain pour ses efforts menés avec le Nigeria pour éradiquer le terrorisme" et a dit "espérer que la menace Boko Haram appartienne bientôt au passé". Les attaques de ce groupe, qui prône un islam rigoriste et revendique la création d'un État islamique dans le nord du Nigeria, ont fait plusieurs milliers de victimes depuis 2009.
Pour mettre un terme à cette menace islamiste, les autorités nigérianes ont lancé des opérations au printemps dans les territoires contrôlés par Boko Haram dans le nord-est du pays. Mais les réfugiés ont commencé à gagner le Niger après des violences meurtrières en avril dans cette région.
"Un conflit régional"
Constatant que le Cameroun frontalier servait de refuge aux membres de Boko Haram, les autorités nigérianes ont demandé à Yaoundé de s'engager plus fermement dans la lutte contre cette sanglante insurrection. Mais la force multinationale chargée de faire respecter l'état d'urgence dans le nord-est du Nigeria ne compte pas de soldats camerounais et est composée de soldats nigérians, épaulés par des troupes du Niger et du Tchad. Le Nigeria, pays le plus peuplé d'Afrique, devra continuer à se battre en grande partie seul dans ce "conflit régional", déplorent de nombreux experts.
De son côté, l'ONU a annoncé mercredi que plus de 37 000 personnes fuyant les affrontements entre l'armée et les islamistes dans le nord du pays avaient trouvé refuge dans le sud-est du Niger.
(Avec dépêches)