
L’armée congolaise a repris des mains des rebelles du M23 la ville-clé de Bunagana. Le mouvement n’est pour autant pas hors d’état de nuire. La communauté internationale presse les deux parties à se rasseoir à la table des négociations.
Les rebelles du M23 avaient fait de cette ville leur capitale politique et leur poumon économique. Bunagana, carrefour de marchandises entre l’Ouganda et la RDC, était une source importante de revenus pour les rebelles qui, à en croire les habitants de la ville, taxaient tout ce qui passait par la frontière.
"C’est une prise particulièrement symbolique [pour l’armée régulière] car il y a un an et demi, c’est dans cette même ville que le M23 fêtait sa première victoire importante sur l’armée congolaise en s’emparant de cette commune frontalière", explique Léa-Lisa Westerhoff, l’envoyée spéciale de RFI dans le pays.
Les soldats congolais ont été accueillis par les cris de joie des habitants de la ville. "Hier, les gens dansaient, chantaient. Pour eux, la guerre est finie, poursuit la journaliste. Depuis hier, des centaines de réfugiés passés du côté ougandais traversent de nouveau la frontière avec leurs ballots d’affaires pour rentrer chez eux."
Réfugiés dans les collines
Désormais chassés de Bunagana, les rebelles du M23 sont-ils hors d’état de nuire ? Pas tout à fait. Le groupe est aujourd’hui très affaibli par les pertes et les défections qu’il a subies, mais il n’est pas dissous. De nombreux insurgés se sont réfugiés dans les collines avoisinant Bunagana.
"C’est toute la complexité de la situation : réussir à sécuriser et ratisser toutes les collines pour s’assurer que plus aucun membre du M23 ne reste sur le territoire congolais, explique Léa-Lisa Westerhoff. C’est une tâche particulièrement compliquée dans ces zones rurales recouvertes de forêt très dense. Une offensive est en cours depuis hier contre le dernier réduit où sont retranchés les rebelles, à une vingtaine de kilomètres plus au sud."
"Revenir à la table des négociations"
Parallèlement, la communauté internationale maintient la pression pour que les autorités congolaises et le M23 reprennent les pourparlers. "Il faut maintenant revenir à la table des négociations à Kampala [en Ouganda] parce que la victoire militaire doit être impérativement accompagnée par un processus politique", martèle Martin Klober, le chef de la Monusco, force onusienne pour la stabilisation en RDC.
Les négociations entre le gouvernement congolais et les rebelles, qui avaient difficilement renoué le dialogue le 10 septembre après plusieurs mois d’arrêt, ont brutalement cessé le 21 octobre dernier. Le M23 exigeait l’amnistie totale pour ses combattants en échange du dépôt de leurs armes, une condition que Kinshasa a refusée, accusant les rebelles de "mettre sur la table de nouvelles revendications". L’armée congolaise a lancé l’assaut contre Bunagana peu après la suspension des pourparlers.
S i les deux parties parviennent un jour à un accord, la bataille du pouvoir congolais pour imposer son autorité sur l’ensemble du territoire ne sera pas pour autant terminée, comme le rappelle Léa-Misa Westerhoff. "Quoi qu’il en soit, après le M23, le gouvernement congolais aura encore à se battre contre une vingtaine de mouvements rebelles qui sont toujours actifs sur son territoire".