Le réseau de microblogging a rendu publiques les données clefs de son activité, avant son arrivée sur les marchés financiers. Twitter espère lever un milliard de dollars, et éviter les erreurs qui ont entaché l’entrée en bourse de Facebook.
Objectif : un milliard de dollars. Twitter espère lever cette somme lors de son introduction en Bourse, prévue avant la fin de l’année. C’est ce que révèle le document transmis, jeudi 3 octobre, par le site de microblogging à la Security and Exchange Commission (SEC, le gendarme américain des marchés financiers).
"Notre document S-1 [le nom donné à la note d'information financière fournie en vue d'une introduction en bourse, NDLR] va être rendu public dans quelques moments. Ce tweet ne constitue pas une offre de vente d'action"
Une communication très attendue, car c’est la première fois que Twitter rend publics des chiffres-clés de son activité. Aussi apprend-on, que six ans après s'être lancé à la conquête du monde des 140 caractères, il ne dégage toujours pas de bénéfices. En 2012, le réseau social a perdu 78 millions de dollars pour un chiffre d’affaires de 317 millions de dollars.
La lecture du document permet également de connaître le nombre exact d’utilisateurs du service : ils sont actuellement 218 millions à utiliser activement Twitter chaque mois dans le monde. Sur ce nombre, seulement 49 millions résident aux États-Unis. Ce sont, cependant, ces Américains qui fournissent l’essentiel des revenus de Twitter puisqu'ils assurent 75 % du chiffre d’affaires.
Tout sauf le chaos
Mais l’essentiel de cette publication n’est pas dans les chiffres. L’ensemble du document, et plus généralement la manière dont le groupe prépare son entrée en Bourse, révèle à quel point “Twitter veut se positionner comme l’anti-Facebook”, explique Pandodaily, un site américain spécialisé dans l’actualité de la Silicon Valley. En clair, le réseau de microblogging fait tout pour éviter le chaos généré par l’arrivée au Nasdaq, en mai 2012, de son frère ennemi, et roi des médias sociaux.
Déjà, Twitter, qui avait reconnu le 12 septembre vouloir entrer en bourse, a tout fait pour retarder la publication des documents fournis à la SEC. Pour ce faire, la société a pu bénéficier d’une récente loi de juin 2012, qui permet aux entreprises avec un chiffre d'affaires inférieur à 1 milliard de dollars, de garder un temps leurs chiffres clés secrets, même après avoir annoncé leur intention d'être côté au Nasdaq.
Un luxe dont n’a pas bénéficié Facebook, puisque ladite loi n’était pas encore en vigueur. Conséquence : les investisseurs ont eu plus de quatre mois entre la publication des documents financiers et l’entrée en Bourse pour disséquer les points forts et faibles du groupe. Un livre a même été publié sur l’action Facebook, avant son arrivée au Nasdaq. Des spéculations qui n’avaient alors pas fait beaucoup de bien au réseau social. Twitter minimise ce risque, car son arrivée sur les marchés financiers, d’après les dernières rumeurs sur la toile, pourrait intervenir dans un peu plus d’un mois.
Dans sa lettre à la SEC, Twitter a en outre pris soin de ne pas répéter les envolées et atermoiements de Marc Zuckerberg, le PDG de Facebook. Ce dernier s’était longuement attardé sur les valeurs qui régissaient son action à la tête du groupe, et avait même insisté sur le fait que Facebook n’avait pas par essence vocation à entrer en Bourse. “C’est mignon, mais pas franchement le genre de message que des investisseurs en costume trois pièces veulent entendre avant de mettre leur argent dans une entreprise”, note Pandodaily.
Ode aux smartphones
Dans le même esprit, Twitter a décidé qu’il n’existerait qu’un type d’actions. En clair : les titres des dirigeants n’auront pas plus de poids que celles achetées par les investisseurs. “En n’émettant qu’un seul type d’actions, Twitter dit qu’il prendra l’avis des actionnaires au sérieux”, précise le site spécialisé dans les nouvelles technologies AllThingsDigital. Mark Zuckerberg, et les autres responsables de Facebook s'étaient alors gardés, quant à eux, des actions “premium” qui comptent davantage lors des votes. Une manière de s’assurer qu’ils sont bien aux manettes de la société, ce qui a pu être perçu comme un signe de défiance à l’égard des investisseurs extérieurs.
En outre, Twitter insiste à dessein sur le fait que 65 % des utilisateurs de son service passent par leur smartphone pour gazouiller. Le réseau de microblogging veut ainsi couper court à une polémique, qui avait entaché le processus d’entrée en bourse de Facebook : à la lecture de la lettre fournie, en son temps, par le réseau social à la SEC, les investisseurs s’étaient inquiétés du fait que Mark Zuckerberg reconnaisse les faiblesses de son groupe sur les téléphones portables, comme l’une de ses principales failles. À l’heure du smartphone roi, c’est un handicap qui avait lourdement pesé sur l’attractivité de l’action Facebook à ses débuts.
Enfin, Twitter ne s’est toujours pas décidé entre le Nasdaq et le NYSE (New York Stock Exchange). Un silence à ce propos particulièrement révélateur. Facebook, comme la plupart des sociétés des nouvelles technologies, avait opté pour le Nasdaq. Un choix, dans ce cas précis, pour le moins malheureux. Le jour de l’introduction en Bourse, et devant l’activité générée par l’événement, la place financière avait connu une série de problèmes techniques, qui avaient coûté cher à certains investisseurs. Ces derniers n’avaient même pas pu passer leurs ordres d’achats ou de ventes. Le Nasdaq est-il prêt, cette fois, à supporter techniquement la nouvelle frénésie boursière, que ne manquera pas d’entraîner la cotation de Twitter ? C’est une question que le réseau social doit sûrement se poser, malgré les assurances des responsables du Nasdaq à ce sujet.