
À Moscou ce mardi, le chef de la diplomatie française tente de convaincre son homologue russe d'accepter le principe d'une résolution contraignante en cas de non respect des engagements de Damas sur les armes chimiques.
Un voyage pour convaincre. Au lendemain de la publication du rapport de l’ONU sur le massacre du 21 août en Syrie, le chef de la diplomatie française, Laurent Fabius, se rend mardi 17 septembre à Moscou pour défendre le principe d’une résolution "forte et contraignante" à l’ONU sur les armes chimiques. Il y rencontrera son homologue russe Sergueï Lavrov.
La Russie, alliée de Damas, s’oppose à tout texte aux Nations unies qui menacerait le régime syrien de "conséquences" - c'est-à-dire de sanctions pouvant aller jusqu'au recours à la force - s'il ne respecte pas ses obligations. Ces dernières ont été définies samedi à Genève, selon l’accord conclu par Moscou et Washington sur le démantèlement de l’arsenal chimique syrien. Un éventuel usage de la force figurait dans un projet de résolution élaboré par Paris la semaine dernière mais que la Russie avait jugé "inacceptable".
Dans cette bataille pour une résolution contraignante, Washington cherche aussi à convaincre. Le secrétaire d'État américain John Kerry doit, lui, accueillir dans la semaine son homologue chinois Wang Yi dont le pays a opposé son veto à trois reprises à des résolutions du Conseil de sécurité contre la Syrie.
"Preuves flagrantes"
Lundi, Paris et Londres ont proclamé que le rapport de l'ONU ne laissait "aucun doute" quant à la "responsabilité extrêmement claire" du régime de Bachar al-Assad dans l'attaque aux armes chimiques perpétrée dans la banlieue de Damas le 21 août. Laurent Fabius a même parlé d’un document au "contenu accablant".
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Sans désigner explicitement les autorités syriennes, le texte dresse des "preuves flagrantes et convaincantes" sur le recours au gaz sarin. Et d'après ce document, "des armes chimiques ont été utilisées sur une échelle relativement grande" au cours du conflit syrien "contre des civils, y compris des enfants".
Ban Ki-moon ne les a pas nommés, mais il a réclamé que les responsables "rendent des comptes". Il a aussi demandé au Conseil de sécurité de prévoir des "conséquences" dans "une résolution claire" si Damas ne respecte pas le plan de démantèlement de son arsenal chimique. Le secrétaire général n'a toutefois pas parlé de frappes militaires, contrairement aux États-Unis.
"Graves conséquences"
En effet, l'option armée "reste sur la table" pour Washington, a assuré une porte-parole du département d'État, Marie Harf, plaidant pour une résolution à l'ONU prévoyant des "mécanismes d'exécution les plus forts possibles". Le secrétaire d’État John Kerry et son homologue Britannique William Hague ont prôné lundi midi des "conséquences" si Damas faillit à ses engagements. Le Français Laurent Fabius est allé plus loin en réclamant de "graves conséquences".
Les alliés américain, français et britannique sont tombés d'accord pour parvenir à une résolution "forte et contraignante" à l'ONU et obliger Damas, selon un "calendrier précis", à dresser l'inventaire de son arsenal chimique et à le faire vérifier jusqu'à son démantèlement d'ici la mi-2014, a expliqué Paris.
Moscou a vivement réagi en affirmant compter sur Washington pour ne pas aller plus loin que l'accord agréé à Genève. "Si quelqu'un veut menacer, chercher des prétextes pour des frappes, c'est une voie (...) qui peut saper définitivement la perspective de Genève 2", la conférence de paix qu'Américains et Russes tentent d'organiser depuis trois mois, a prévenu M. Lavrov.
Divergences sur l'accord américano-russe
Et les deux anciens ennemis de la guerre froide, aux relations glaciales depuis un an, ont déjà des interprétations divergentes de leur accord de samedi. Pour Sergueï Lavrov, le texte de Genève ne prévoit pas qu'une résolution mentionne le chapitre 7 de la charte des Nations unies, qui autorise la force en dernier ressort.
Aux yeux de John Kerry au contraire, "l'accord engage totalement les États-Unis et la Russie à imposer des mesures sous le chapitre 7 en cas de non application". La Syrie a de son côté répliqué que toute action armée était "une menace pour toute la région" et avait "un parfum d'agression".
Avec dépêches