logo

Université d’été : le Front national se prépare à peser aux municipales

Le parti d’extrême droite français cherche à prouver qu’il est prêt à remporter des victoires aux prochaines élections municipales. Temps fort de cette déferlante médiatique : l'université d'été ce week-end à Marseille.

L’heure est à la démonstration de force pour le Front national. L’université d’été du parti s’apprête à ouvrir ses portes à Marseille, les 14 et 15 septembre, dans une ambiance où le parti de Marine Le Pen espère que ses cartes politiques se transformeront en victoire électorale, lors des municipales de mars 2014.

L’emballement médiatique autour du Front national s’est accéléré ces derniers jours : un sondage, publié dimanche dernier, donne le parti d’extrême droite à 16 % des intentions de vote, soit une progression de quatre points par rapport à un sondage réalisé six mois auparavant par le même institut de sondage CSA.

Le même jour, l’ancien Premier ministre François Fillon tendait la main vers le parti d’extrême-droite, en estimant qu'il faudrait voter pour "le moins sectaire" des candidats en cas de duel PS-Front national au second tour d'une élection municipale en 2014. Prié de préciser, lors de cette interview pour Europe 1, Le Monde et i>Télé, si un candidat PS pouvait être plus "sectaire" qu'un FN, François Fillon avait répondu : "Ça peut arriver, je ne dis pas que c'est toujours le cas, mais ça peut arriver."

Conjoncture inédite

Terreau favorable à Marseille

L'université d'été du Front national se tient à Marseille, ville-test pour le parti. Selon un sondage paru dans "Le Journal du Dimanche" du 8 septembre, le parti lepéniste recueillerait 25 % des voix au premier tour, derrière une liste UMP à 34 % conduite par le sortant UMP Jean-Claude Gaudin et devant une liste PS (21 %). Si ces pronostics se confirmaient dans les urnes, le Front national serait en position de "faiseur de roi". Le délégué départemental du FN, Stéphane Ravier, se montre conquérant : "Je ne me bats pas pour grapiller un poste de conseiller municipal. Même si nous n'emportons pas la mairie, nous devrions avoir un groupe important. Ceux qui auront la majorité devront composer avec nous. Finies les réunions entre-soi !", promet-il.

De son côté, le Front national s'est engouffré mercredi dans la brèche ouverte par François Fillon, en publiant une "charte d’action municipale", adoptée par le bureau politique du parti frontiste le 2 septembre, et qui fixe le cadre politique pour d’éventuels accords et alliances.

"Cette charte est une main tendue adressée à tous les candidats ou futurs candidats désireux de servir l'intérêt général et souhaitant coopérer avec le Front national et ses représentants à l'échelon municipal", a expliqué le secrétaire général adjoint du FN Nicolas Bay dans un communiqué.

Cette conjoncture politique est inédite, reconnaît Gaël Brustier, politologue, auteur de "Voyage au bout de la droite" (éditions Mille et une nuit, 2011). "La donnée nouvelle ne provient pas tant du Front national que de l’UMP. Nous assistons à une radicalisation d’une partie de la droite traditionnelle, déboussolée par l’échec de Nicolas Sarkozy à la présidentielle", note-t-il dans une interview à FRANCE 24.

Un rapport de la fondation Jean Jaurès, publié ce vendredi 13 septembre, analyse en profondeur les multiples signes d’une droitisation de la base électorale et militante de l’UMP. Il prend pour preuve notamment la forte propension des électeurs UMP qui désirent nouer des accords avec le Front national lors des élections locales (47 % des sympathisants UMP).

Candidats jeunes et motivés

Sentant que les circonstances leur sont favorables, les cadres dirigeants du Front national communiquent à tout-va sur leurs préparatifs. Ils insistent particulièrement sur le renouvellement de leurs candidats et leur capacité à gérer des municipalités.

Pour prouver qu’il se prépare bel et bien à gouverner, le parti a ainsi annoncé, jeudi dernier, la création d'un Comité de gestion et de suivi des administrations (CGSA), qui sera animé par Steeve Briois, son secrétaire général. "La création de cette cellule atteste de la volonté du Front national de ne rien laisser au hasard, d'anticiper notre arrivée aux commandes dans certaines municipalités et d'y assurer une bonne gestion", indique-t-il dans un communiqué.

Côté candidats : le directeur de campagne des municipales, Nicolas Bay, a dressé le profil des 623 têtes de liste déjà investies, dont 514 dans des communes comptant plus de 3 500 habitants, et 33 dans les 39 plus grandes villes de France. Son message : le FN a étendu son maillage électoral, avec des candidats jeunes et motivés.

Il précise ainsi que 14 % des candidats ont moins de 30 ans et 26 % moins de 40 ans, conformément à la volonté du parti de présenter de jeunes profils – sur le modèle d’Etienne Bousquet-Cassagne, porte-drapeau de 23 ans arrivé en seconde position lors de la législative partielle de Villeneuve-sur-Lot, ancien fief de Jérôme Cahuzac, en juin dernier. Ainsi, près d’un tiers des têtes de liste sont des "primo-candidats" n'ayant jamais été candidat titulaire ou tête de liste à une élection.

Autre raison pour le Front national de montrer les muscles : parmi les candidats investis figurent de nombreuses personnes issues d'autres formations politiques. Quelque 49 têtes de liste sont des anciens militants, candidats ou élus locaux de l'UMP, de l'UDF ou du MoDem ; 18 sont issus de mouvements souverainistes ; et 27 sont des transfuges du PS, du PCF ou même du Nouveau parti anticapitaliste.

Il faut cependant relativiser cette démonstration de force, tempère Gaël Brustier. "Ce sont ces moments médiatiques à l’approche des élections, où un sondage sort, les médias s’emballent autour de l’objet FN, et une question émerge : le FN est-il à l’offensive ? Je ne pense personnellement pas que le parti frontiste soit plus à l’offensive hier qu’aujourd’hui. Le travail mené actuellement est le même que sous Bruno Mégret [ancien cadre du FN, fondateur du Mouvement national républicain] ou sous Marie-France Stirbois : rendre le parti plus présentable, plus apte à gouverner. Il faut prendre du recul par rapport à la petite musique qu’entonne Marine Le Pen."