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, correspondante à Berlin – Les athlètes victimes du dopage du temps de la République démocratique allemande (RDA) sont scandalisés par la réhabilitation de cinq entraîneurs, qui ont avoué leur participation au système mis en place par l'ancien régime.

"Nous avons de manière isolée participé au dopage". Dans une déclaration conjointe, cinq entraîneurs allemands d’athlétisme ont reconnu, lundi, leur participation au dopage à grande échelle pratiqué par le régime de la République démocratique allemande (RDA). Des aveux historiques dans l’histoire du sport allemand qui vont permettre aux cinq entraîneurs, toujours en activité, de conserver leur poste - comme le veut la politique de la deuxième chance qu’applique le Comité olympique allemand.

Une politique qui scandalise les victimes. Parmi les 10 000 à 12 000 anciens sportifs de l’ex-RDA qui ont subi ce dopage généralisé, un millier est aujourd’hui gravement malade. Seuls 200 ont été indemnisés au terme de longues procédures, mais rares sont ceux pour qui le chapitre est clos. Il y quelques jours, onze victimes avaient lancé un appel aux autorités, leur demandant de ne pas accorder d’amnistie aux entraineurs compromis.

Parmi eux, Ines Geipel, une ancienne sprinteuse dopée à son insu dans les années 1980. Elle est aujourd’hui professeur de littérature et milite pour la reconnaissance des victimes. Peu convaincue du mea culpa tardif des entraîneurs, elle envisage aujourd’hui de porter plainte contre cette réhabilitation. Interrogée par France 24, Geipel ne cache pas sa colère : "Cette amnistie est un signal désastreux pour la lutte contre le dopage. On réhabilite des entraîneurs qui n’ont même pas fait l’effort de reconnaître la grande souffrance des athlètes et qui n’ont jamais cherché à les rencontrer. C’est une honte pour le sport allemand qui, depuis dix ans, refuse de réagir à la détresse des victimes."

Mais les anciens athlètes, dopés malgré eux, ne sont pas les seuls à émettre des critiques. Les historiens du sport et les experts en matière de dopage regrettent que cette forme d’amnistie générale soit accordée contre de simples aveux,  alors que toute la lumière n’a pas été faite sur le dopage systématique en ex-Allemagne de l’Est.  Selon Werner Frank, biologiste moléculaire et spécialiste des produits dopants, qui s’exprimait à la télévision allemande, mardi soir : "ils [les entraîneurs] espèrent pouvoir tirer un trait sur le passé, qu’on en reste là et que plus personne n’en parle."

Le dopage du temps de la RDA reste une zone d’ombre dans l’histoire du sport allemand. Quant aux autorités sportives allemandes, elles ne semblent pas prêtes à employer tous les moyens disponibles pour lever le voile sur le sujet. Aussi, de nombreux entraîneurs soupçonnés d’avoir participé au système sont aujourd’hui encore actifs. “Cinquante entraîneurs pourraient profiter de cette amnistie, explique Ines Geipel. Mais les autorités sportives allemandes ne se sont même pas données la peine de contrôler leur passé. Tout comme elles n’ont jamais enquêté sur les médecins ayant contribué au dopage ou sur les laboratoires en RDA. Il y a une réelle volonté d’ignorer la dimension qu’avait pris le dopage en RDA.“