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Pierre Gattaz à la tête du Medef : le changement dans la continuité

Pierre Gattaz a été élu mercredi à la tête de l'organisation patronale du Medef, après huit années de présidence de Laurence Parisot. Très offensif dans ses propos, le nouveau patron suscite l’inquiétude des syndicats. Explications.

Le Medef a changé de visage. Sans surprise, le favori Pierre Gattaz a été élu mercredi 3 juillet à la tête du Mouvement des entreprises de France (Medef) avec 95% des voix lors de l’assemblée générale. Il succède ainsi à Laurence Parisot, qui a passé huit ans à la présidence de l'organisation patronale.

Inconnu des médias il y a quelques mois encore, Pierre Gattaz, s’est fait remarquer  mi-janvier en dénonçant les pratiques hasardeuses de Laurence Parisot, qui souhaitait alors réviser les statuts du Medef pour briguer un troisième mandat.

"Combat du Medef"

Son avènement à la présidence de l’organisation patronale ne doit pourtant rien au hasard. Contrairement à son principal adversaire, le très médiatique Geoffroy Roux de Bézieux, le nouveau patron des patrons "est un homme de l’appareil installé depuis une quinzaine d’années au sein du Medef", explique Michel Offerlé, professeur à l’École normale supérieure et auteur du livre, "Les patrons des patrons : histoire du Medef". Pierre Gattaz a su, en outre, "patiemment organiser une coalition avec les très grands patrons et les dirigeants de PME quand son challenger n’avait que quelques soutiens", précise-t-il.

Pour se démarquer de ses concurrents durant la campagne interne du Medef, le patron a multiplié les provocations. Se définissant comme un "homme de terrain" qui "fait ce qu’il dit", Gattaz s’est montré très offensif dans son "combat du Medef" contre les 35 heures, pour la baisse de la fiscalité des entreprises et de la dépense publique. Le nouveau patron n’a pas caché non plus ses positions concernant l’épineuse question de la réforme des retraites. Le Boulonnais prône un allongement de la durée de cotisation, le relèvement de l’âge légal de départ et s’oppose à une hausse des cotisations.

Ses propos suscitent l’inquiétude des syndicats craignant un durcissement des positions du Medef et un manque d’ouverture au dialogue social.

Pierre Gattaz, un ultralibéral ?

Les liens étroits qu’il entretient avec Denis Kessler, l’ancien vice-président du Medef, souvent jugé très libéral, et la réputation rigide de son père, Yvon Gattaz, à la tête du CNPF, l’ancêtre de l’organisation patronale, de 1981 à 1986 font craindre au gouvernement et aux syndicats un dialogue social difficile.

"Si les priorités de Pierre Gattaz sont surtout d’ordre économique, alors que celles de Laurence Parisot étaient plus sociales, ses positions ne sont pas très différentes de son prédécesseur féminin", nuance toutefois Michel Offerlé à FRANCE 24. "Pierre Gattaz a beaucoup adouci son discours après la campagne interne en affirmant qu’il était avant tout un ‘fervent partisan’ du dialogue social", précise le spécialiste du Medef.

L’industriel de 53 ans, natif de Boulogne-Billancourt, patron du Groupe des fédérations industrielles (GFI) et de Radiall, une entreprise de taille moyenne produisant des composants pour l’aéronautique, l’espace et l’électronique, est un patron raisonnable, selon Michel Offerée. "Pas de Ferrari, ni de train de vie outrancier, Pierre Gattaz mène une existence bourgeoise, et déclare un revenu annuel de 300 000 euros par an, ce qui n’est pas énorme comparé à certains autres patrons", explique-t-il.

Première semaine test

Peut-on imaginer que les relations entre le gouvernement socialiste et le Medef se tendront dans les semaines à venir ? Michel Offerlé n’y croit pas vraiment. "Le discours sur la compétitivité des entreprises et la croissance nécessaire tenu par François Hollande le 16 juin sur M6, n’est pas très éloigné des revendications du Medef ", assure-t-il.

Le gouvernement et les syndicats seront rapidement fixés sur ses intentions. Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault recevra jeudi à Matignon patronat et syndicats pour entendre leurs positions sur la réforme des retraites.

Le tout nouveau patron des patrons Pierre Gattaz a d’ores-et-déjà demandé mercredi, peu après son élection à la présidence du Medef, une économie de 100 milliards d'euros sur cinq ans pour les entreprises, en baisse des cotisations sociales et baisse des impôts.

Le nouveau patron ne manquera de défis à relever durant son mandat. En plus des relations avec les syndicats et le gouvernement, il devra également "rassembler les fédérations adhérentes au Medef, en proie aux luttes de principautés", souligne Michel Offerlé. Une vaste entreprise...