
Dans un argumentaire de 21 pages publié ce vendredi, le PS s'indigne de la politique de rigueur imposée à l'Europe par la chancelière allemande. Un discours "germanophobe" susceptible de durcir la relation entre les deux pays, accuse la droite.
La tension monte entre Paris et Berlin. Le Parti socialiste (PS) français a dénoncé, ce vendredi 26 avril, "l'intransigeance égoïste" d’Angela Merkel et a appelé à "l'affrontement démocratique" contre l'Allemagne dans un texte publié sur le site Lemonde.fr. L’argumentaire de 21 pages lance une virulente charge contre la politique de rigueur menée par la chancelière allemande.
"Les marchés avant les peuples"
"Le projet communautaire est aujourd'hui meurtri par une alliance de circonstance entre les accents thatchériens de l'actuel Premier ministre britannique - qui ne conçoit l'Europe qu'à la carte et au rabais - et l'intransigeance égoïste de la chancelière Merkel - qui ne songe à rien d'autre qu'à l'épargne des déposants outre-Rhin, à la balance commerciale
enregistrée par Berlin et à son avenir électoral", peut-on ainsi lire dans le document. "Les marchés avant les peuples", est-il également mentionné.
Le texte, coordonné par le député Jean-Christophe Cambadélis, vice-président du Parti socialiste européen (PSE), sera soumis aux militants à l’occasion de la Convention du parti sur l'Europe, prévue le 16 juin.
Les ténors du PS sonnent la charge
Les membres du Parti socialiste n’ont pas attendu la publication de ce "document de travail" pour exprimer les griefs qu’ils ont à l'égard de la politique d’austérité de Berlin. Claude Bartolone, le président de l'Assemblée nationale, a fait savoir, jeudi 25 avril dans le journal Le Monde, qu’il souhaitait une position politique plus ferme vis-à-vis de l’Allemagne. "Il [François Hollande] appelle ça la 'tension amicale'. Pour moi, c'est la tension tout court et, s'il le faut, la confrontation", affirme-t-il dans cet entretien, reprenant ainsi des thèmes chers au Front de gauche. Le socialiste craint que la poursuite d'une politique de rigueur n'entraîne le triomphe des partis populistes dans toute l'Europe lors des élections européennes de 2014 et, en France, lors des élections municipales, qui auront également lieu l'an prochain.
Un peu plus tôt dans la semaine déjà, le président du groupe socialiste au Sénat, François Rebsamen, avait lui aussi accusé Angela Merkel d’avoir "appauvri les travailleurs allemands", souhaitant que l’Allemagne se montre "plus solidaire" de l’Europe.
Au PS, on se défend toutefois de vouloir casser l’amitié franco-allemande. "Le texte rédigé par le PS ainsi que les critiques portées contre la politique d’Angela Merkel n’ont rien de germanophobes, assure un membre du parti à FRANCE 24. "Il s’agit de critiques purement amicales", précise t-il.
"Cette germanophobie est outrancière et dangereuse"
À l’UMP, on ne manque évidemment pas de déplorer ces attaques socialistes
anti-allemandes. "Les déclarations agressives du PS s’apparentent à une forme de germanophobie", s’inquiète ainsi le député de l'Yonne et secrétaire national de l'UMP, Guillaume Larrivé, dans un entretien accordé à FRANCE 24. "À l’heure où la France connaît un taux d’endettement record, on devrait s’inspirer des vertus du système allemand plutôt que d’insulter ce pays", fulmine l’élu de droite. "Cette germanophobie outrancière est très dangereuse pour la France", conclut-il.
François Fillon, en visite à Berlin ce vendredi, s'est également exprimé sur le sujet. L’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy s'est ainsi inquiété du fait que le ton entre les dirigeants français et allemands pourrait se durcir davantage encore après les élections législatives qui doivent avoir lieu en septembre outre Rhin si Angela Merkel est reconduite dans ses fonctions. Et celui-ci d'ajouter que la relation franco-allemande a "rarement" été aussi mauvaise. François Fillon, qui s'est notamment entretenu avec le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, a estimé que ses interlocuteurs s'étaient montrés "inquiets sur la relation (franco-allemande), inquiets sur les perspectives économiques françaises et inquiets sur le risque de voir la France tentée par une politique anti-allemande".
L'Élysée prend du recul
Du côté de l’Élysée, on préfère relativiser. "C'est le PS qui s'exprime" et non les autorités françaises, nuance l’entourage de François Hollande. C'est le "jeu politique" normal, les conservateurs allemands ne sont pas en reste pour critiquer la politique de François Hollande, assurent, de leur côté, des proches du président.
CONVENTION EUROPE DU PARTI SOCIALISTE – AVRIL 2013