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Le football italien veut prendre des mesures contre le racisme

Le racisme continue d'entacher la réputation du football italien. Des agressions antisémites à Rome en novembre dernier aux cris de singe contre Boateng en janvier, la Fédération et les forces de l'ordre tentent d’agir.

Tottenham a subi deux fois cette saison le racisme en Italie. Le club londonien connu pour compter un grand nombre de supporters issus de la communauté juive de la capitale britannique, "Yids Army", et dont le propriétaire est juif lui-même, a d'abord dû faire face à l'agression de supporters en novembre à Rome puis aux cris de singe en mars à Milan à l'encontre d'un de ses joueurs.

Des supporters des "Spurs" ont ainsi été blessés lors d'une attaque dans un pub de Rome par un groupe antisémite où figuraient des tifosi de la Lazio et de la Roma, les deux clubs de la Ville Éternelle.

À Milan, dans la même compétition, la Ligue Europa, des tifosi de l'Inter ont offensé tout au long du 8e de finale retour le Togolais de Tottenham, Emmanuel Adebayor. "On voulait s'en aller", a raconté le défenseur - noir - français de Tottenham, William Gallas.

"Assez de déclarations, il faut agir, a réagi le président du Maccabi Rome, organisation sportive hébraïque, Vittorio Pavoncello. Il faut aussi protéger et non punir la partie saine, majoritaire, des supporters laziali qui s'oppose à ces manifestations racistes et antisémites."

"Ces situations ont un effet dévastateur sur l'image du football italien, mais confondre 150 personnes avec tous les tifosi est facile, mais injuste, explique à l'AFP le président de la Fédération italienne de football, FIGC, Giancarlo Abete. Il ne faut pas faire de généralités."

"Le foot italien n'est pas raciste"

"Et le problème n'est pas propre à l'Italie mais mondial, le dernier conseil de l'UEFA a mis au centre des débats le racisme", ajoute M. Abete, vice-président du gouvernement européen du football. La FIGC et l'UEFA prônent "la prévention et les sanctions", ajoute-t-il.

Les incidents racistes dans le football italien cette saison

Avant Lazio-Tottenham (21/11/2012) - Coups de couteau

Des fans de Tottenham, club londonien dont les supporteurs revendiquent l'identité juive, même s'ils ne le sont pas forcément, sont attaqués dans un pub de Rome par un groupe où figuraient des tifosi de la Lazio et de la Roma, les deux clubs de la ville. L'agression antisémite fait plusieurs blessés et soulève un tollé au Royaume-Uni, où Rome est rebaptisée "Stab city" (la ville des coups de couteaux). En 2009, un supporteur d'Arsenal avait été poignardé sur le chemin du stade Olympique), et en 2007 13 fans de Manchester United avaient été blessés, les deux fois dans le cadre d'un match contre l'AS Rome.

AC Milan-Pro Patria (03/01/2013) - Cris de singe à Boateng

En match amical à Busto Arsizio, le joueur métis Kevin-Prince Boateng avait fini par quitter le terrain, exaspéré d'entendre des cris de singes dans la tribune. Son équipe, l'AC Milan, l'avait suivi, et la rencontre contre Pro Patria, une équipe de 4e division, avait été interrompue.

Lazio-Mönchengladbach (21/02/2013) - Salut fasciste

Ce 16e de finale de Ligue Europa a fait tomber le sursis qui planait sur la Lazio, qui doit jouer les deux matches suivants à huis clos. Quelque 300 tifosi ont effectué le salut fasciste et exposé une banderole commémorant le massacre d'une dizaine de milliers de nationalistes italiens par les communistes du Yougoslave Tito en Frioul et Vénétie à la fin de la Deuxième Guerre Mondiale.

Inter-Tottenham (14/03/2013) - Cris de singe à Adebayor

A San Siro, les tifosi de l'Inter ont insulté tout le match l'attaquant togolais Emmanuel Adebayor. L'UEFA a ouvert une enquête.  

Pour la prévention, "beaucoup d'enfants de l'immigration sont licenciés à la FIGC, nous participons à l'effort fondamental de l'intégration pour le pays que nous voulons construire", note le président.

Quant aux sanctions, il convient "surtout d'isoler ce groupe de personnes dont on se demande ce qu'elles font dans un stade. Le nombre de Daspo (acronyme pour les interdictions de stade) a fortement augmenté, la main a été plus ferme, grâce à la collaboration des forces de l'ordre".

Côté ministère de l'Intérieur, le vice-président de l'Observatoire nationale sur les manifestations sportives Roberto Massucci, considère que le nombre d'incidents réels est proche de zéro. "Soyons claire d'entrée: le foot italien n'est pas raciste", dit-il.

"Lancer l'alarme racisme quand il n'y en a pas fait le jeu des imbéciles, ajoute-t-il. S'ils sont 30 à faire le singe dans un stade, on ne peut pas dire que le racisme est un sentiment diffusé. Mais ces attitudes sont graves, il ne faut surtout pas les sous-estimer."

Isoler les responsables

Kevin-Prince Boateng, le milieu germano-ghanéen de l'AC Milan, avait quitté le terrain lors d'un amical en janvier, exaspéré par les cris de singe.

"Je pense qu'ils m'ont insulté parce que je n'ai pas la peau blanche, ça arrivait aussi en Allemagne. Pour moi il s'agit évidemment de racisme", a-t-il témoigné devant la justice italienne.

"Quelques fois les cris de singes ne sont même pas motivés par un sentiment raciste, mais juste lancés pour offenser, commente M. Massucci. C'est grave, mais ça tient plus de l'incivilité que du racisme, comme si on insultait quelqu'un qui n'a pas de cheveux (il est chauve)."

"Un petit nombre de personnes utilisent cette expression odieuse pour faire parler d'elles. Il faut les isoler, c'est ce que la police cherche à faire", conclut-il.

"Je me suis déjà trouvé dans la situation de Prince (Boateng), et je n'ai pas quitté le terrain, note la star noire de l'équipe d'Italie, Mario Balotelli. C'est difficile de combattre le racisme On en parle beaucoup, mais je ne sais pas ce qu'il faut faire pour lutter."

Samuel Eto'o a eu une idée. Victime sous le maillot de l'Inter des fameux "bouh" simiesques en 2011, le Camerounais avait marqué un but, avant de mimer le singe devant les tifosi sardes, mouchés.

Avec dépêches