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, envoyé spécial en Italie – Les Italiens sont appelés aux urnes lundi 25 février, pour la seconde journée consécutive des élections générales. Un vote déjà marqué par un taux de participation à la hauteur de la désillusion des électeurs.

Alors que s’ouvre le second jour de vote pour des élections législatives, sénatoriales et régionales en Italie, l’ambiance est au ressentiment général face aux mesures d’austérité et à une classe politique salie par de multiples scandales. Les bureaux de vote, peu fréquentés, fermeront à 15 h et les premiers résultats officiels devraient être annoncés en début de soirée.

Une loi électorale complexe

L’actuelle loi électorale en Italie est si complexe qu’elle a été surnommée "Porcellum", (porcherie). La Chambre des députés, Chambre basse, compte 630 sièges tandis que le Sénat en compte 315 (plus quatre sénateurs nommés à vie). Tous les sièges seront pourvus à l’issue des élections générales du 24 et 25 février. Les sièges dans les deux chambres sont répartis de façon proportionnelle, dans le respect de certaines limites visant à encourager les partis à former des coalitions. Celle qui arrive en tête se voit décerner le "prix de la majorité" à la Chambre des députés qui lui garantit au moins 340 des 630 sièges. " Le prix de la majorité" s'applique également au Sénat, mais sur une base régionale, ce qui rend plus difficile pour une coalition d’obtenir une majorité de sièges dans les deux chambres.

Selon les dernières estimations, la coalition de centre gauche de Pier Luigi Bersani est donnée gagnante de justesse face au Peuple de la Liberté (PDL) de centre droit de Silvio Berluconi, alors que les centristes du chef du gouvernement sortant, Mario Monti, arriveraient loin derrière. Surfant sur une vague de mécontentement populaire, le mouvement "anti-establishment" de Beppe Grillo devrait, quant à lui, supplanter la coalition de Monti et pourrait même menacer les deux principaux partis.

À Milan, dimanche, alors que Berlusconi arrivait à un bureau de vote, deux militantes de Femen l’ont accueilli, dévoilant un "Basta Berlusconi" (Berlusconi ça suffit) inscrit sur leur poitrine. Dans tout le reste du pays, il semble que le slogan "ça suffit" pourrait d’ailleurs s’adresser à la classe politique dans son ensemble.

Un pays en déclin

La campagne pour ces élections générales a été assombrie par une série de scandales de corruption impliquant tous les grands partis, nourrissant la colère des électeurs éprouvés par des mesures d’austérité drastiques et un chômage croissant. Ainsi, même dans une Italie où l’auto-dénigrement est de règle, la frustation et le désespoir étaient palpables dans les bureaux de vote.

"Nous vivons un déclin économique, culturel et moral. Ce n’est donc pas surprenant que la politique suive la même voie", affirme un électeur au bureau de vote de Liceo Machiavelli, à Florence.
Pour Sabina Borgone, une votante dans le bureau voisin, les hommes politiques n’ont rien appris pendant le gouvernement technocratique de Mario Monti. "L’Italie est un beau pays pour passer des vacances au bord de la mer, rien de plus."

Alors que la majorité des électeurs estiment que l’Italie est dans une situation grave, peu d’entre eux estiment qu’un quelconque candidat détienne les solutions aux problèmes du pays.

La carte "anti-establishment" de Beppe Grillo

Face au sentiment "anti-establishment", le MouVement cinq étoiles de Beppe Grillo, devrait donc faire un score très honorable. Le blogueur et humouriste a fait campagne à bord d’un camping-car dans tout le pays, attirant les foules de Palerme à Trieste et appelant les Italiens à renvoyer tous les hommes politiques "a casa" (chez eux).

Antonella Chini, une céramisten âgée de 79 ans, de Florence s’inquiète de cette poussée. "J’ai croisé beaucoup de Grillo tout au long de ma vie, confie-t-elle. Ils incarnent une forme de défaitisme typiquement italien. C’est facile de cultiver cette colère et ce mécontentement ; Ce qui est dur, c’est de trouver des solutions, et Grillo n’en propose aucune."

La menace d’un blocage

L'avenir reste incertain. Si Bersani, homme politique fade mais respecté, qui a promis de poursuivre la discipline budgétaire de Monti tout en promettant des emplois, reste le favori, il n’est pas évident qu’il parvienne à former une coalition stable. D’autant plus que Beppe Grillo a déjà écarté l’idée de former une alliance avec les principaux partis.

La perspective d’une instabilité politique dans le troisème pays de la zone euro suscite donc des craintes en Europe. Un vote sanction face aux mesures anti-austérité pourrait effrayer les marchés et raviver une fois de plus la crise de la dette européenne.

Or, durant la campagne, Grillo appelait déjà à un référendum sur la sortie de l’euro, tandis que Berlusconi pestait contre "l’Europe allemande" de la chancelière Angela Merkel. Soutenu par son empire médiatique, le Cavaliere a une fois encore dominé la course en promettant de baisser les impôts et même de rembourser aux Italiens une taxe d’habitation très impopulaire.

Il semble cependant loin de pouvoir l’emporter. Même s’il n’y a qu’une seule leçon à retenir de la scène politique italienne ces vingt dernières années : il est toujours dangereux de considérer Berlusconi hors-jeu.