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Médecin attitré de la course depuis des années, Jean-Yves Chauve est disponible 24h sur 24 pour les coureurs dont il connait le dossier médical par cœur. Son rôle consiste à intervenir par téléphone ou internet pour aider les skippers à se soigner.

Aux antipodes des skippers du Vendée Globe, qui croisent dans les solitudes glacées du Grand Sud, un homme veille nuit et jour sur leur santé: le médecin de la course Jean-Yves Chauve, qui s'impose "une vie monacale" pour être réactif "immédiatement".

"Je dois pouvoir être accessible en permanence, instantanément, parce que lorsqu'un skipper va appeler, il va être angoissé et s'il doit appeler plusieurs fois, ça va ajouter à son stress", explique-t-il à l'AFP.

"Pas d'alcool, pas de soirée et je ne bouge pas de chez moi: c'est une vie monacale", reconnaît le Dr Chauve, à l'écoute des soucis physiques et éventuels coups de "blues" des coureurs du Vendée Globe depuis la première édition en 1989-1990.

Dans son appartement de Pornichet (Loire-Atlantique), face à la mer, il vit avec deux téléphones portables à portée de la main, 24 heures sur 24, depuis le départ de la course le 10 novembre des Sables-d'Olonne (Vendée). Il en sera ainsi jusqu'à l'arrivée du dernier des 13 navigateurs encore en course, dans plus de deux mois.

"Mon appartement, c'est mon carré. Un peu plus grand tout de même qu'une cabine de 60 pieds (ndlr: les bateaux de la course autour du monde en solitaire et sans escale, longs de 18,28 m)... Et puis, j'ai de la chance, c'est stable et ça ne bouge pas", plaisante-t-il.

"S'ils appellent, c'est que c'est urgent, qu'il y a un problème. Il faut être hyper réactif, ajoute le Dr Chauve. C'est la raison pour laquelle je reste chez moi, pour avoir tous les moyens de liaison instantanément disponibles (téléphone, internet) et recevoir les images du bateau, des blessures éventuelles pour proposer les soins les plus adaptés".

"Je connais les dossiers médicaux de tous les skippers, c'est ma Bible, précise-t-il. Avant de leur proposer un traitement, je révise mes dossiers...

La dent de Bernard Stamm

"Je regarde régulièrement les positions des concurrents, souligne le Dr Chauve. Ca commence vers 07h00 et se termine vers 22h00. Je ne suis pas beaucoup intervenu depuis le départ", note-t-il, citant "un problème respiratoire, des petites blessures aux mains et au visage, quelques contusions".

"Et puis évidemment la dent de Bernard" Stamm, le skipper suisse de Cheminées Poujoulat, qui -après l'avoir consulté au téléphone- s'est improvisé dentiste le 11 décembre pour soigner une molaire cassée. Le tout dans un bateau transformé en shaker et avec des instruments très sommaires!

"Il y a eu des éditions (du Vendée Globe) beaucoup plus dures, affirme le Dr Chauve. Celle de 1996-1997, par exemple, avec les chavirages de Raphaël Dinelli, Thierry Dubois et Tony Bullimore".

Mais "mon pire souvenir, poursuit-il, ça été en 2008 avec Yann Eliès, parce qu'il a fallu attendre 48 heures les secours. Deux jours très difficiles, avec beaucoup de stress. On appelait le bateau mais personne ne répondait" parce que le skipper, gravement blessé à une jambe et en hypothermie, tentait de se reposer.

"Ils ont tous des personnalités différentes mais tous ont la capacité à se prendre en charge, à être autonome, observe le Dr Chauve. Et certains vont masquer leurs problèmes pour qu'on ne leur dise pas d'arrêter la course".

Evoquant le formidable mano a mano auquel se livrent depuis plusieurs jours en tête de course François Gabart (1er) et Armel Le Cléac'h (2e), il met en garde contre les risques de surrégime. "Le Vendée Globe est devenu une Solitaire du Figaro. Grâce à l'AIS (ndlr: système permettant le repérage et l'identification des bateaux), ils se voient en permanence: si l'un ralentit, l'autre reprend ses réglages pour le dépasser..."

AFP