À l'issue de leur entretien mardi, François Hollande et le PDG d'ArcelorMittal, Lakshmi Mittal, ont déclaré poursuivre les discussions sur une possible reprise du site sidérurgique de Florange.
Les discussions au sujet du site sidérurgique de Florange (Moselle), que l'Etat menace de nationaliser, vont se poursuivre jusqu'à la dernière minute, ont déclaré mardi soir l'Elysée et ArcelorMittal après une rencontre entre le président français et le patron du groupe.
François Hollande "a demandé que les discussions se poursuivent entre l'Etat et l'entreprise jusqu'au terme du délai (samedi) qui avait été convenu pour trouver un éventuel repreneur" du site, a déclaré la présidence dans un communiqué laconique.
"Les discussions se poursuivent", a confirmé une porte-parole du groupe sidérurgique à l'issue de la rencontre d'une heure, au cours de laquelle les deux hommes ont évoqué l'avenir de Florange.
ArcelorMittal veut fermer en partie le site, ce que refuse le gouvernement, qui menace d'en passer par la nationalisation.
La pression monte car samedi expire le délai accordé par le groupe pour trouver un repreneur. Après, ArcelorMittal entend commencer les procédures pour fermer les installations.
Peu avant la rencontre, le président avait affirmé que la nationalisation faisait "partie du sujet de la discussion". C'était la première fois qu'il faisait un commentaire public sur cette affaire.
L'hypothèse d'un passage forcé et temporaire dans le giron public du site sidérurgique lorrain pour in fine lui trouver un repreneur privé avait été évoqué la semaine dernière par le ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg, idée qui a reçu nombre de soutiens politiques.
"Il y a une sorte d'unité nationale qui se construit progressivement autour du projet de nationalisation temporaire", a déclaré M. Montebourg mardi à l'Assemblée nationale, égrenant la liste des soutiens à sa proposition dont le député UMP Henri Guaino, le président du MoDem, François Bayrou, ou le coprésident du Parti de Gauche, Jean-Luc Mélenchon.
Quarante députés PS ont même signé un appel de soutien à la proposition Montebourg. D'autres, d'accord sur le fond, regrettent cependant le ton virulent employé par M. Montebourg face à la direction d'ArcelorMittal.
M. Hollande et M. Mittal s'étaient déjà rencontrés au début de l'affaire, il y a un peu moins de deux mois.
Pour Edouard Martin, délégué CFDT de Florange, l'enjeu était d'"essayer de remporter le dernier bras de fer" et "convaincre" M. Mittal "de céder le site".
L'industriel veut fermer les hauts-fourneaux et toute la filière "liquide" (production d'acier brut), qui emploient 650 personnes, mais entend conserver "l'aval", c'est-à-dire la transformation d'acier en produits industriels élaborés.
Or, l'Etat a seulement trouvé des repreneurs intéressés par tout le site. Il veut donc forcer la main d'ArcelorMittal, qu'il accuse de ne pas avoir tenu ses engagements.
Le groupe a mis dans la balance ses 20.000 salariés en France, affirmant que nationaliser Florange serait de nature à remettre en cause la présence du numéro un mondial de l'acier dans l'Hexagone.
"Mittal, on le connaît très bien, il ne connaît que le rapport de force", a déclaré M. Martin.
Plusieurs voix ont toutefois appelé à la mesure dans les déclarations publiques.
La députée UMP de Moselle Anne Grommerch soutient la nationalisation mais a reproché les "propos offensants" de M. Montebourg à l'égard du groupe, qui "risque ainsi de compromettre toute possibilité de négociations". Les membres de la famille Mittal se sont dits "extrêmement choqués" par ces attaques.
Michel Delebarre, sénateur-maire de Dunkerque (Nord), où sont installés d'autres hauts-fourneaux d'ArcelorMittal, regrette des "déclarations à l'emporte-pièce".
Sur place, à Florange, "l'état d'esprit, c'est l'espoir quand même" chez les salariés interrogés par l'AFP.
Le porte-parole des députés UDI Jean-Christophe Lagarde, estime lui que le gouvernement finira par "baisser les bras" malgré des "déclarations fracassantes".
La tonalité était plus ironique outre-Manche. En déplacement en Inde, Boris Johnson, le maire de Londres, où réside Lakshmi Mittal, a raillé l'idée de nationalisation.
"Les +sans-culotte+ semblent s'être emparés du gouvernement à Paris (...), je n'ai aucune hésitation à dire ici: +Venez à Londres, mes amis+" (en français dans le texte, ndlr), a-t-il lancé devant des hommes d'affaires indiens. "Venez dans la capitale mondiale des affaires."
Le gouvernement français a assuré ne pas craindre d'éventuels départs d'investisseurs. Le ministre de l'Economie, Pierre Moscovici, a reçu mardi des représentants des grands fonds d'investissement anglo-saxons (BlackRock, Morgan Stanley, JPMorgan ou Pioneer). "J'attendais des questions" sur Florange et "la surprise a été qu'il n'y en a pas eu", a-t-il dit. "Chacun peut comprendre que ce dossier est un dossier particulier".
AFP