, envoyé spécial aux États-Unis – Selon plusieurs sondages, les électeurs américains arabo-musulmans auraient, en grande majorité, l'intention de voter pour le président sortant, comme en 2008. Reportage dans le Michigan, un des principaux foyers de cette communauté.
Dearborn, petite ville de la banlieue de Detroit, dans le Michigan, abrite l'une des plus importantes communautés arabo-musulmanes des États-Unis, un musée national arabo-américain ainsi que la plus grande mosquée d’Amérique du Nord. Un particularisme idéal pour prendre le pouls de ces 2 millions d’électeurs appartenant à cette communauté ayant massivement accordé leurs suffrages à Barack Obama en 2008.
Obama "nous a tourné le dos"
Quatre ans plus tard, la donne pourrait toutefois changer. C’est l’opinion d’Ali, un étudiant d'origine libanaise âgé de 26 ans, qui confie vouloir boycotter la présidentielle du 6 novembre, alors qu’il s’était enthousiasmé pour la candidature d’Obama en 2008.
Selon lui, le premier président noir de l’histoire des États-Unis n'a pas respecté toutes ses promesses de campagne et n’a guère montré "d’attention particulière à l’encontre des Arabes" au point de s’adjuger de nouveau leurs votes. "Le président a exploité les voix des citoyens de confession musulmane en se faisant passer pour l'un d'entre nous, au final, une fois élu, il nous a tourné le dos, et n’a fait qu’appliquer la politique américaine habituelle", peste-t-il.
Visiblement très déçu par le premier mandat du locataire de la Maison Blanche, Ali affirme que ses coreligionnaires ne tomberont pas dans le même piège cette année. "Je pense que ma communauté va plutôt voter en faveur de son rival républicain Mitt Romney, ou s'abstenir de voter pour le candidat démocrate", espère-t-il.
Toujours est-il qu’un récent sondage publié par les médias américains avance que près de 75 % de l’électorat arabo-musulman s’apprête à voter en faveur du président-candidat démocrate.
Faire barrage aux républicains
Hussein, un Américain d'origine irakienne âgé de 35 ans, employé dans un restaurant arabe de Dearborn, affirme de son côté que l’élection présidentielle intéresse peu les musulmans américains, du moins ceux de sa ville. Car, explique-t-il, Barack Obama a perdu une partie de sa crédibilité auprès d’eux, et ce, alors même qu’il a tenu ses promesses de retirer les troupes US d'Irak et d'Afghanistan. "Cependant, la guerre contre la Libye, la partialité en faveur de l’État d’Israël, le processus de paix au Moyen-Orient au point mort, la menace d'intervention militaire en Syrie pour renverser le régime de Bachar al-Assad et l'armement de l'opposition syrienne sont autant de facteurs qui pourraient convaincre les Arabes de ne pas voter pour lui cette fois-ci", argumente Hussein.
Ce réquisitoire axé sur la politique internationale de l’administration Obama ne l’empêchera pas, à titre personnel, de voter pour le camp démocrate. "Après mûre réflexion, je voterai à nouveau pour Obama, ne serait-ce que pour faire barrage aux républicains que je ne veux pas voir prendre la Maison Blanche", conclut-il.
Hoda (photo ci-dessus), professeur de biologie d'origine libanaise, affirme de son côté qu'elle n’hésitera pas à voter en faveur du président Obama. "Il a fait ce qu’il a pu au cours de son premier mandat, dans un contexte politique et économique très difficile, dit-elle. Il lui était impossible de tout changer pour le mieux dans un délai aussi court". Elle espère qu’il bénéficiera de quatre nouvelles années de mandat afin de poursuivre ses réformes.
"Je vais voter pour lui car son programme électoral est convaincant, il est bien plus réaliste et transparent que celui de Romney", précise-t-elle.
Enfin, Hoda estime que le candidat républicain s’égare en croyant encore en la supériorité des Américains et que les États-Unis sont toujours le centre du monde. "Pourtant, un certain nombre de mes amis, impressionnés par l'idée de reconstruire le pays ou tentés simplement de changer de président, s’apprêtent à voter pour le ticket Romney-Ryan", conclut-elle.