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Une ancienne guérilla marxiste remporte la présidentielle

Mauricio Funes, candidat du parti de gauche FMLN, a revendiqué la victoire à la présidentielle. Il est crédité de 51% des suffrages face à Rodrigo Avila du parti conservateur ARENA après le dépouillement de 85% des bulletins de vote.

AFP - Mauricio Funes, candidat de l'ex-guérilla d'extrême gauche du Salvador, s'est déclaré dimanche soir président élu de ce pays d'Amérique centrale dirigé par la droite depuis 20 ans, alors que les derniers résultats officiels lui donnaient l'avantage après le dépouillement de plus de 90% des bulletins.

"Je suis le président élu de tous les Salvadoriens", a déclaré le candidat de l'ex-rébellion armée du Front Farabundo Marti pour la libération nationale (FMLN), lors d'une conférence de presse.

"Aujourd'hui, c'est la victoire des citoyens qui ont cru en l'espérance et ont vaincu la peur. C'est une victoire de tout le peuple du Salvador", a-t-il ajouté.

"A ce moment même, l'Arena (Alliance républicaine nationaliste, parti conservateur jusqu'ici au pouvoir, ndlr) passe dans l'opposition, et elle doit avoir la garantie qu'elle sera respectée et écoutée", a-t-il poursuivi.

M. Funes a proclamé sa victoire alors que les résultats officiels quasi-complets --sur plus de 90% des bulletins--, lui donnaient 51,2% des voix, contre 48,7% au candidat du parti conservateur au pouvoir, Rodrigo Avila.

A plus de 90% des suffrages exprimés, la victoire de M. Funes ne faisait plus de doute. C'est une défaite historique pour la droite, au pouvoir dans le pays depuis 20 ans. Le président sortant Elias Antonio Saca était absent du scrutin, car la Constitution lui interdit deux mandats successifs.

L'ancienne guérilla l'a finalement emporté par les urnes contre le camp conservateur qui l'avait vaincue en 1992, grâce à l'appui de Washington, après une guerre civile de douze ans qui a fait 75.000 morts.

Les Etats-Unis, très présents au Salvador, étaient aussi très attentifs au scrutin, d'autant que le FMLN avait déjà gagné les législatives de janvier dernier.

Les observateurs internationaux de l'Union européenne (UE) et de l'Organisation des Etats américains (OEA) ont souligné l'absence d'incidents notables dans ce scrutin. La campagne avait été émaillée d'incidents parfois violents entre les deux camps, qui avaient fait plusieurs blessés.

Des parlementaires américains avaient évoqué des "menaces potentielles" pour les "intérêts de sécurité nationale" dans le cas d'une victoire de l'ancienne rébellion, qui rapprocherait le Salvador de leur bête noire dans la région, le président vénézuélien Hugo Chavez.

Mais le responsable du Département d'Etat des Etats-Unis pour l'Amérique latine, Tom Shannon, a annoncé que Washington respecterait le résultat du scrutin et travaillerait avec le vainqueur, quelle que soit sa couleur politique.

Depuis l'intervention décisive de Washington contre la guérilla, le Salvador est "américanisé", avec une économie "dollarisée" au sens propre du terme, puisque le billet vert est devenu la monnaie nationale.

Le Salvador, qui vient de rapatrier d'Irak son contingent de 200 militaires, a été le seul pays d'Amérique latine à y être resté jusqu'à la fin du mandat de l'ONU, le 31 décembre dernier.

M. Funes, 49 ans, ancien journaliste vedette de la télévision et correspondant de la station américaine CNN, avait promis que, s'il l'emportait, le Salvador demeurerait un allié de Washington. Il avait ajouté qu'il ne voyait pas de raison de ne pas "s'entendre" avec le président Barack Obama, dont l'Amérique Latine attend un nouveau dialogue avec les Etats-Unis.

Le candidat du président Saca, son ancien directeur de la Police nationale, Rodrigo Avila, un ingénieur de 44 ans, avait martelé tout au long de sa campagne qu'une victoire de M. Funes ferait "basculer le Salvador dans le camp du Venezuela de Hugo Chavez", comme le Nicaragua de Daniel Ortega et le Honduras de Manuel Zelaya.

"La gauche que je représente est la gauche salvadorienne" et le FMLN a "évolué", avait répondu M. Funes. L'ex-guérilla tient compte des "exigences de l'époque" et a choisi pour slogan le "changement dans la sécurité", avait-il répété.

Le prochain président du Salvador, qui sera officiellement investi le 1er juin prochain, ne pourra gouverner seul: le FMLN, désormais première formation à l'Assemblée, n'y a pas la majorité absolue. Le vainqueur devra donc composer en nouant des alliances avec les partis minoritaires, comme le faisait déjà M. Saca.