Lors d'une conférence de presse très attendue, la Banque centrale européenne (BCE) a annoncé, par la voix de son président Mario Draghi (photo), son intention d'intervenir pour un montant illimité sur le marché de la dette publique de la zone euro.
Marchés financiers et responsables politiques européens retenaient leur souffle. Ce jeudi 6 septembre, la Banque centrale européenne (BCE) a levé le voile sur les mesures qu’elle compte adopter pour aider les pays de la zone euro frappés par la crise et sauvegarder l’union monétaire. Sans surprise, l'institution va intervenir sur le marché de la dette des États de la zone euro face aux primes de risques élevées réclamées à certains pays, a annoncé son président, l'Italien Mario Draghi.
La BCE va lancer un nouveau programme baptisé "Outright monetary transactions" (OMT) en raison "des perturbations graves observées sur le marché des obligations publiques qui proviennent de craintes infondées de la part des investisseurs sur la réversibilité de l'euro", a-t-il affirmé de Francfort, siège de la BCE.
itLa Banque centrale européenne "fera tout pour sauvegarder l'euro, qui est irréversible", a-t-il ajouté Mario Draghi, réitérant ainsi les propos tenus en juillet dans un discours scruté à la loupe par les marchés.
Cette fermeté venant d’un homme très respecté des milieux financiers avait alors eu pour effet immédiat d’apaiser les marchés, au moment même où les taux d’emprunt de l’Espagne et de l’Italie atteignaient des seuils critiques. Le mois d’août qui, selon les prédictions de nombreux analystes économiques, s’annonçait catastrophique sur les marchés, s’est finalement déroulé sans trop d’accros.
Rassurer les banques
Aujourd’hui, alors que l’institution de Francfort vient de réviser à la baisse ses prévisions de croissance (un recul de 0,4% du produit intérieur brut (PIB) en 2012), nombreux sont ceux qui se demandent si les décisions de la BCE seront suivies d'effets. L'objectif étant de donner aux banques l’assurance que leurs prêts seront remboursés et ainsi les encourager à abaisser les taux d’emprunt qu’ils imposent aux États (plus l’emprunt est risqué, plus il coûte cher). Parmi les pays les plus exposées par cette crise de confiance : l’Italie et l’Espagne, qui a déjà sollicité une aide de 100 milliards d’euros pour recapitaliser ses banques.
itAlors, le rachat des dettes publiques, une solution miracle ? Pas tout à fait. Certains pays, en particulier l’Allemagne, s’opposent farouchement à tout programme d'acquisition d’obligations souveraines. Berlin craint, d’une part, que certains pays en difficulté relâchent leurs efforts fiscaux et économiques – bien que la BCE exige un assainissement accru des finances publiques, en contrepartie du rachat des dettes – et, d’autre part, que cet engagement provoque de l'inflation dans toute la zone euro. Le sujet est si sensible outre-Rhin qu’à en croire le quotidien allemand "Bild", il a failli provoquer la démission de Jens Weidmann, le très orthodoxe président de la Bundesbank, la banque centrale allemande. La chancelière, Angela Merkel, l’en a dissuadé, mais la tension reste vive.
Rebond des Bourses européennes
La levée de boucliers de l’Allemagne avait d’ailleurs poussé Mario Draghi à monter au créneau pour défendre sa politique par voie de presse, fait inhabituel pour lui. La politique monétaire "nécessite parfois des mesures exceptionnelles", notamment "quand les marchés sont fragmentés ou influencés par des craintes irrationnelles", avait-il expliqué dans une tribune publiée le 29 août dans l’hebdomadaire allemand "Die Zelt".
Les marchés ont en tout cas bien réagi aux annonces de Mario Draghi. À Francfort, l'indice Dax grimpait au-dessus des 2 % tandis que les Bourses de Milan et de Madrid bondissaient de 3 %.