Le président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, a déclaré au cours du conseil des gouverneurs jeudi que la BCE était prête à se porter au secours de la zone euro. Aucune mesure concrète n'a pourtant été annoncée.
AFP - La Banque centrale européenne (BCE), qui réunissait jeudi son conseil des gouverneurs, n'a annoncé aucune nouvelle mesure face à l'aggravation de la crise de la dette en zone euro, tout en réitérant son engagement à "tout faire" pour la protéger.
Cette position "a été prise à l'unanimité" des 23 gouverneurs, a déclaré lors d'une conférence de presse à Francfort (ouest) son président Mario Draghi, qui avait tenu les mêmes propos la semaine dernière à Londres, suscitant des espoirs d'action immédiate.
Or tel ne sera pas le cas.
La BCE "peut entreprendre des opérations sur le marché obligataire d'une taille
itadéquate pour atteindre son objectif", face aux taux d'emprunt "inacceptables" que doivent consentir certains pays de la zone euro, et qui empêchent la bonne transmission de sa politique monétaire, a-t-il dit.
Elle est aussi prête à prendre de nouvelles mesures exceptionnelles, a-t-il ajouté, sans préciser lesquelles.
Les modalités de ces mesures ne seront toutefois présentées qu'"au cours des prochaines semaines" et auparavant et il faudra que les dirigeants de la zone euro montrent patte blanche.
M. Draghi attend d'eux en premier lieu qu'ils poursuivent leurs efforts d'assainissement budgétaire et de réformes structurelles.
Des mesures qui peuvent prendre du temps, c'est pourquoi ils doivent se montrer prêts à faire intervenir les fonds de secours européens FESF et MES sur le marché obligataire, à des conditions strictes, a-t-il dit.
Ces déclarations ont déçu les marchés qui attendaient beaucoup de la réunion: les Bourse ont immédiatement plongé, avant de clôturer en nette baisse.
Les taux d'emprunt espagnols et italiens ont quant à eux repris leur envol.
"Clairement, la conférence de presse du jour a constitué une douche froide pour les attentes", a commenté Carsten Brzeski, économiste pour ING, estimant que M. Draghi s'était lui-même mis en mauvaise posture avec ses déclarations londoniennes relayées ensuite par des responsables politiques européens, dont la chancelière allemande ou le président français.
"Cependant, ses commentaires montrent aussi que la BCE ne laissera pas les gouvernements seuls sous l'orage", a-t-il ajouté.
itUn avis partagé par Holger Schmieding, de la banque Berenberg, qui a même estimé que M. Draghi a envoyé "un message fort", employant "un langage plus clair" que ce qu'il aurait pensé.
"Les annonces de la BCE aujourd'hui (jeudi) constituent un sérieux progrès, de notre point de vue", a-t-il ajouté.
S'il n'a pas annoncé de mesures à même de satisfaire les investisseurs, M. Draghi leur a signifié qu'il était "inutile" de spéculer contre l'euro en pensant qu'il allait disparaître.
"Il reste, il reste, il reste. Il est inutile de spéculer contre l'euro", a-t-il martelé après avoir un peu plus tôt souligné le caractère "irréversible" de la monnaie unique européenne.
La BCE, qui s'inquiète d'une croissance qui peine à redémarrer et du chiffre du chômage qui a atteint un niveau record en juin en zone euro, a laissé son taux directeur inchangé bien que l'éventualité de le baisser à nouveau ait été discutée. Ce qui laisse augurer d'une possible baisse en septembre, selon les analystes.
Il avait été réduit à 0,75% en juillet, soit son plus bas niveau historique.
L'hypothèse de porter son taux de dépôt, actuellement à 0%, à un niveau négatif a été également évoquée mais rejetée pour l'instant.
"Le conseil des gouverneurs a décidé à l'unanimité que ce n'était pas le moment", a-t-il déclaré car il s'agirait d'entrer dans "des eaux en grande partie inconnues".
Par ailleurs, M. Draghi a rejeté l'éventualité d'accorder une licence bancaire au FESF et au MES, dans leur structure actuelle.
Cette possibilité, qui aurait permis aux fonds de secours de venir, comme les établissements bancaires de la région, emprunter auprès de la BCE, et aurait ainsi considérablement accru leurs moyens, a été évoquée la semaine dernière par un membre du conseil des gouverneurs. Mais elle est fermement rejetée par le gouvernement allemand comme par sa banque centrale qui estime que cela reviendrait à faire financer les déficits publics par la BCE, ce qui lui est interdit.
La Bundesbank est aussi opposée aux rachats d'obligations de la BCE pour les mêmes raisons, et son président Jens Weidmann est apparemment le seul à s'être élevé contre la future réactivation de ce programme jeudi.