Pour la première fois depuis le début de la révolte contre le régime de Bachar al-Assad, le pilote d'un avion de chasse a fait défection et a atterri avec son MiG-21 en Jordanie où il a demandé et obtenu l'asile politique.
AFP - Un pilote syrien a atterri jeudi à bord d'un MiG-21 en Jordanie voisine, où il a obtenu l'asile politique, pour la première défection du genre depuis le début il y a 15 mois d'une révolte populaire réprimée par le régime au prix de plus de 15.000 morts.
Dans une nouvelle journée sanglante, la répression et les combats entre soldats et déserteurs ont fait au moins 93 morts jeudi, l'armée bombardant toujours sans relâche des bastions rebelles comme Homs (centre) et Deraa (sud), selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH).
Face à cette spirale de violences, la communauté internationale reste impuissante en raison essentiellement de ses divisions, que Moscou a rappelée en douchant les espoirs sur son appui à un départ du président Bachar al-Assad et en défendant son droit de livrer des armes à Damas.
Pour la première fois depuis le début de la contestation le 15 mars 2011, un pilote de chasse syrien, le colonel Hassan Merhi al-Hamadé, a fait défection et a atterri sur une base de l'armée de l'air jordanienne, à bord d'un MiG-21 de fabrication russe.
Il a demandé l'asile politique à la Jordanie, qui le lui a accordé en quelques heures.
Pour échapper aux radars, "l'avion a décollé à basse altitude d'un aéroport militaire" dans le sud de la Syrie, selon le Conseil national syrien (CNS), principale coalition d'opposition.
"Le pilote est considéré comme un déserteur et un traître à la nation et à son honneur militaire. Il sera sanctionné en vertu des règles militaires en vigueur", a réagi le ministère syrien de la Défense en faisant état de "contacts" avec les autorités en Jordanie en vue de restituer le MiG-21.
Washington a salué cette désertion en estimant que ce pilote ne serait pas le dernier à abandonner le régime Assad, accusé par l'ONU et plusieurs pays occidentaux et ONG internationales de "crimes contre l'Humanité".
Nouvelle journée sanglante
Face à la répression brutale, la révolte marquée au départ par des manifestations pacifiques s'est militarisée avec la désertion de dizaines de milliers de soldats, dont des milliers ont rejoint les rangs de l'Armée syrienne libre (ASL), selon l'OSDH.
Depuis 15 mois, les violences ont fait au moins 15.026 morts, en majorité des civils, selon un nouveau bilan publié par cette organisation syrienne basée au Royaume-Uni et qui se base sur les témoignages de militants sur place.
Ces dernières semaines, l'OSDH a recensé plusieurs dizaines de victimes par jour, et jeudi encore, au moins 52 civils, 38 soldats et trois rebelles ont péri dans les violences.
Plusieurs villes de la province de Homs, où des rebelles sont retranchés, ont de nouveau été la cible de bombardements intenses et sont assiégées par l'armée et parfois survolées par des hélicoptères, tandis que des combats opposent soldats et déserteurs dans ces localités.
Jeudi, le pilonnage a également visé des localités de la province de Deraa, dont certaines, comme Inkhel, ont été prises d'assaut. A Douma, près de Damas, mais aussi dans les provinces d'Alep (nord) et d'Idleb (nord-ouest), l'OSDH a fait était de bombardements, de combats et d'attaques contre des soldats.
Se targuant du soutien d'une partie des Syriens, M. Assad s'est dit le mois dernier déterminé à en finir "à n'importe quel prix" avec l'insurrection, refusant toujours de reconnaître la contestation, qu'il assimile à du "terrorisme".
Divisions internationales persistantes
Face au risque de guerre civile, le n°2 de la Ligue arabe, Ahmed Ben Helli, a appelé la Russie à cesser de livrer des armes à Damas.
Mais le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a affirmé que son pays comptait continuer ses livraisons d'armes à la Syrie, les regards se focalisant sur un cargo russe soupçonné de transporter des hélicoptères d'attaque Mi-25 destinés au régime Assad et des batteries antiaériennes.
"Le schéma selon lequel le président Assad devrait partir avant que quelque chose ne se produise du point de vue de la fin des violences et d'un processus politique" est "irréalisable", a-t-il ajouté, alors que les Occidentaux réclament le départ du président syrien.
L'Occident et les Arabes souhaitent que le mandat de l'émissaire international Kofi Annan soit renforcé, avec un recours au Chapitre VII de l'ONU pour forcer régime et opposition à appliquer son plan de sortie de crise, officiellement accepté par les deux parties mais resté lettre morte.
M. Annan doit tenir vendredi une conférence de presse à Genève avec Robert Mood, chef des observateurs de l'ONU en Syrie qui ont suspendu leurs opérations en raison des violences.
Selon le New York Times, la CIA surveille en Turquie les livraisons d'armes aux rebelles pour s'assurer qu'elles ne tombent pas aux mains d'Al-Qaïda. Ces armes sont achetées par la Turquie, l'Arabie saoudite et le Qatar et acheminées via la frontière par un réseau de l'opposition syrienne.