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L'armée impose un couvre-feu partiel après les manifestations au Caire

De nouvelles violences ont éclaté au Caire ce vendredi, en marge d'une manifestation hostile à l'armée au pouvoir, faisant au moins un mort et 373 blessés. Le régime militaire a imposé un couvre-feu dans le quartier du ministère de la Défense.

REUTERS - A moins de trois semaines de l'élection présidentielle en Egypte, de nouvelles échauffourées entre des manifestants venus dénoncer les violences du pouvoir et les forces de l'ordre ont coûté la vie vendredi à un militaire et fait 373 blessés aux abords du ministère de la Défense au Caire, a déclaré le ministère de la Santé.

Un appelé a succombé à une blessure par balle à l'abdomen tandis que les blessés souffrent dans l'ensemble d'intoxication aux gaz lacrymogènes, de coupures ou d'hématomes, précise le ministère, cité par l'agence de presse égyptienne Mena.

Les autorités ont procédé à plus de 170 arrestations pour agression contre les forces de l'ordre, rapporte le quotidien Al Ahram sur son site internet. Le parquet a ordonné l'arrestation de personnes soupçonnées d'être les organisateurs d'un rassemblement devant le ministère de la Défense, parmi lesquelles figurent des personnalités bien connues dont l'identité n'est pas précisée, ajoute Al Ahram.

Les dirigeants militaires du pays ont imposé un couvre-feu dans le quartier du ministère de la Défense, qui doit rester en vigueur de vendredi 23h00 à 07h00 samedi. Dans un communiqué lu à la télévision nationale, l'armée "appelle tous les citoyens à le respecter, sans quoi l'armée s'opposera avec détermination à tout contrevenant".

Dans la journée, les militaires déployés autour du bâtiment après les affrontements qui ont fait onze morts mercredi ont été copieusement insultés. La foule a réclamé le départ du maréchal Hussein Tantaoui, président du Conseil suprême des forces armées (CSFA), au pouvoir depuis l'éviction d'Hosni Moubarak par la rue en février 2011.

"Tantaoui, bonjour, voici ton dernier jour!", a scandé la foule. "Maréchal, dégage, le peuple est dangereux!"

Des manifestants ont ensuite lancé des pierres en direction des forces de l'ordre, qui ont riposté au canon à eau.

A la tombée de la nuit, des coups de feu ont été entendus près d'une mosquée du centre du Caire.

Certains contestataires ont démoli la clôture métallique d'un chantier pour en faire une barricade. "Dieu est le plus grand !", criaient certains, tandis que des hélicoptères de la police survolaient la scène.

"A bas le régime militaire"

"La foule vient ici avec des armes dangereuses. Nous avons des matraques, un canon à eau et des grenades lacrymogènes pour les disperser", a expliqué un officier. "Certains pensent qu'ils iront au paradis s'ils tuent un soldat. Qu'est-ce que vous voulez qu'on fasse ?"

Outre l'exclusion de certains des prétendants les plus sérieux, la campagne pour le scrutin présidentiel, dont le premier tour aura lieu les 23 et 24 mai, s'est déroulée sur fond de divergences au sujet de la nouvelle Constitution et de doutes quant aux intentions des militaires au pouvoir.

Le CSFA s'est engagé à céder la place à une administration civile à l'issue de la présidentielle, mais une partie de l'opinion soupçonne les généraux de vouloir continuer à tirer les ficelles en coulisse.

Mercredi, les manifestants rassemblés aux abords du ministère de la Défense ont été agressés par des inconnus. Dans la foule se trouvaient de nombreux partisans du salafiste Hazem Abou Ismaïl, dont la candidature a été invalidée. Beaucoup parlent depuis d'une manipulation des partisans de l'ancien régime.

Khaïrat al Chater, candidat des Frères musulmans qui sont majoritaires au Parlement, a également été déclaré inéligible en raison d'une condamnation datant de l'ère Moubarak.

Le mouvement islamiste a dû se rabattre sur Mohamed Morsi, ce qui pourrait avantager les prétendants issus de l'ancien régime, tels qu'Amr Moussa, qui fut longtemps chef de la diplomatie de Moubarak, et l'ex-Premier ministre Ahmed Chafik.

A la mi-journée, des milliers de militants islamistes, libéraux et progressistes s'étaient rassemblés place Tahrir, épicentre de la "révolution du Nil".

"A bas le régime militaire !", a scandé un animateur du mouvement.

Une banderole réclamant l'abrogation du texte qui interdit de faire appel de l'invalidation des candidatures avait été déroulée entre les podiums. D'autres demandaient la dissolution de la commission électorale et la promulgation de la loi sur l'inéligibilité des caciques de l'ancien régime.