
Les Grecs votent ce dimanche à l'occasion de législatives anticipées. Alors que les partis de la coalition au pouvoir sont en perte de vitesse dans les sondages, les formations opposées au plan d’austérité devraient faire le plein de voix.
La Grèce s’apprête à jouer, dimanche 6 mai, une partie électorale capitale. Onze millions d’électeurs sont appelés aux urnes pour des élections législatives anticipées, suite à la dissolution du Parlement le 11 avril dernier. Alors que le pays connaît un éclatement politique inédit depuis la chute de la dictature des généraux en 1974, une tâche ardue attend la majorité qui se dessinera à l’issue du scrutin : constituer un nouveau gouvernement capable de donner suite aux tentatives de sortir la Grèce de la crise.
"Beaucoup de gens s'inquiètent de la possibilité de former un nouveau gouvernement après les élections", souligne le politologue Ilas Nikolakopoulos interrogé par l'AFP. Les deux formations principales de la coalition au pouvoir depuis près de six mois, les socialistes du Pasok et les conservateurs de la Nouvelle Démocratie (ND), s’effondrent dans les sondages au profit d’une foule de petits partis politiques opposés à l’austérité. En tout, 32 formations sont en lice pour les législatives.
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Multitude de petits partis extrémistes
Selon les sondages, une dizaine d’entre eux dépasseront les 3 % de voix nécessaires à leur entrée au Parlement, actuellement composé de cinq partis. La chute vertigineuse du Pasok et de la Nouvelle Démocratie profite aux extrêmes tant à gauche, notamment le Parti communiste staliniste KKE, qu'à droite, à l’instar de Chryssi Avhi (Aube dorée) un parti xénophobe exprimant ouvertement des positions néo-nazies. "L’Aube dorée pourrait dépasser les 5 % de voix, et le Parti communiste grec, qui fait normalement 8 %, est crédité de 12 % des voix. L’ensemble des petites formations opposées à l’austérité participant aux législatives pourraient rassembler en tout 60 % des voix", explique Fabio Liberti, directeur de recherche à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris) et spécialiste de l’Union européenne.
Le Pasok et la Nouvelle Démocratie, qui cumulent traditionnellement 80 % des voix, rassemblent aujourd’hui à eux deux moins de 40 % des intentions de vote. Les sondages accordent une légère avance aux conservateurs, avec 21,9 % des voix selon les projections de l’Institut Marc, contre 17,8 % en faveur des socialistes. Même si la loi électorale grecque instaure un système proportionnel "renforcé", accordant 50 sièges de députés supplémentaires de plus au parti arrivé en tête, former un gouvernement dans ce contexte est une gageure.
Des créanciers qui veillent au grain
Mais pour Fabio Liberti, l’enjeu n’est pas tant de savoir qui va gagner que de savoir si la Grèce va ou non sortir de l’euro. "Deux plans d’aide ont été accordés à la Grèce en contrepartie de concessions très importantes, indique-t-il. Si les conditions ne sont plus remplies, le versement des plans d’aide peut être mis en échec. Ce qui signifierait une rapide faillite de la Grèce." Aujourd'hui, les deux partis traditionnels qui se sont engagés à respecter les engagements européens rassemblent désormais moins de voix que ceux qui s’y opposent.
Les créanciers de la Grèce, l’Union européenne (UE) et le Fonds monétaire européen (FMI), ont mis Athènes en garde : le versement du deuxième prêt accordé en mars ne sera versé que si les nouvelles coupes budgétaires, prévues par la Troïka (UE, FMI et Banque centrale européenne), sont mises en œuvre. "Ce sera le test crucial du nouveau gouvernement", estime Panayotis Petrakis, professeur d'économie financière à l'université d'Athènes, interrogé par l’AFP. Le parti au pouvoir "verra probablement sa popularité s’effrondrer après ces mesures, qui devront être prises en juin", renchérit Théodoros Pelagidis, professeur de macroéconomie à l’université du Pirée. Et d'ajouter à propos de la situation post-électorale : "Le risque d’une instabilité gouvernementale est patente".