À quelques jours du premier tour de la présidentielle, plusieurs personnalités ont annoncé leur soutien à François Hollande. Si le candidat socialiste est ultra-favori, les jeux ne sont pas faits pour autant, estime le politologue Éric Bonnet.
La semaine commence bien pour François Hollande. À quelques jours du premier tour de la présidentielle, qui se tiendra le 22 avril, le candidat socialiste, qui revient en force dans les sondages face au président-candidat Nicolas Sarkozy, a engrangé le soutien de plusieurs personnalités issues des différents gouvernements Fillon.
C’est Martin Hirsch, ancien haut-commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté et la jeunesse (2007-2010) dans le gouvernement de Nicolas Sarkozy, qui a été le premier à apporter son soutien au candidat PS, lundi 16 avril. "J'ai l'intention de voter pour François Hollande, qui a bien voulu me demander régulièrement mon avis depuis un an sur les questions de jeunesse, de pauvreté, de lutte contre les conflits d'intérêts, de régulation des hauts revenus et sur une croissance accélérée du service civique, autant de sujets-clés à mes yeux", a indiqué dans les colonnes du "Monde" l’actuel président de l'Agence du service civique.
Le lendemain, c’était au tour de l’ex-secrétaire d'État chargée de la Politique de la ville (2007-2010) de Nicolas Sarkozy, Fadela Amara, d’annoncer sa volonté de voter pour le candidat PS, dans une interview à "Libération". La fondatrice de l'association Ni Putes ni Soumises, dont le ralliement à Nicolas Sarkozy après "23 ans au Parti socialiste" avait surpris il y a cinq ans, ne tarit pas d'éloges sur le candidat qui "a beaucoup d'humour" et qu’elle qualifie d’"humaniste", ce qui la "touche profondément"."Dans ses meetings ou réunions, dans sa manière de toucher les gens, on retrouve quelque chose qui est de l'ordre d'une humanité portée, affichée et assumée", ajoute-t-elle.
Soutien des chiraquiens
Dans le même temps, trois ex-ministres de Jacques Chirac ont annoncé publiquement qu'ils voteraient pour François Hollande, voire contre Nicolas Sarkozy. Corinne Lepage, ministre de l'Environnement (1995-97), a déclaré que son "vote personnel se portera sur François Hollande dès le premier tour, sans qu'il s'agisse d'un quelconque ralliement au candidat socialiste", ajoutant ne pas vouloir "la réélection de Nicolas Sarkozy". Azouz Begag, ancien ministre délégué à la promotion de l'égalité des chances (2005-2007) de Jacques Chirac, ensuite passé au MoDem, a également confirmé mercredi, sur l'antenne de la radio France Inter, soutenir le candidat PS, "l'anti bling-bling", pointant du doigt les "dégâts qui ont été causés à la République" depuis cinq ans par Nicolas Sarkozy. Puis l'ex-ministre de la Culture Jean-Jacques Aillagon (2002-2004) figurait derrière François Hollande, dimanche 15 avril, au meeting du candidat socialiste sur l'esplanade du château de Vincennes.
Quant à l'ancien chef de l'État Jacques Chirac, il aurait lui-même confirmé sa préférence pour le député de Corrèze. Un soutien que ce dernier avait déjà exprimé, de manière inattendue, lors d'une inauguration en Corrèze, en juin 2011, en présence de François Hollande. Cette fois-ci, Jacques Chirac s’est exprimé par le biais de sa plume, l'historien Jean-Luc Barré, co-auteur des "Mémoires" de l'ancien président (1995-2007). "Il y a une dizaine de jours quand je l'ai vu, il m'a dit qu'il voterait François Hollande", a-t-il indiqué sur la chaîne de télévision française BFMTV. Ce sera aussi le cas de sa fille Claude, qui a été aperçue en train de déjeuner avec la compagne de François Hollande, Valérie Trierveiler. En revanche, son épouse Bernadette Chirac, reste une fervente supportrice de Nicolas Sarkozy.
Enfin, une quarantaine d’économistes, dont Elie Cohen et Jean-Hervé Lorenzi, ont profité d’une tribune mardi 17 avril dans "Le Monde" pour déclarer leur soutien au socialiste. "Un candidat se dégage à nos yeux, le plus apte à redresser la France et rassembler les Français. Ce candidat, c'est François Hollande." Hasard du calendrier, ce même jour, l'équipe de campagne du candidat communiquait une liste de cent noms de sportifs supporters de Hollande, dont la sprinteuse Muriel Hurtis, l'ancien président de l'Olympique de Marseille Pape Diouf et le judoka Thierry Rey, père du petit-fils de Jacques Chirac.
"Peu d'influence sur les électeurs"
Aussi nombreux soient les soutiens, ils n’ont toutefois que peu d’influence sur les électeurs du premier tour, estime Eric Bonnet, directeur d’études à BVA. "Ils peuvent uniquement être rassurants aux yeux des électeurs centristes qui ont mauvaise conscience de vouloir voter pour la gauche, poursuit-il. "Cela peut les aider à franchir le pas". En revanche, durant l’entre-deux tours, ils pourraient s’avérer être un atout solide face à Nicolas Sarkozy. Le président-sortant va chercher à séduire l’électorat centriste en tentant de gauchiser l’image de François Hollande, commente le politologue. Mais avec le soutien des centristes, ce sera peine perdue".
Quoiqu’il en soit, cette vague de soutiens semble de bonne augure pour François Hollande. Surtout que les sondages de ces derniers jours le confortent dans le fauteuil d’ultra-favori : selon l'étude CSA publiée dans la soirée de mardi 17 avril, il progresse au premier tour de l'élection présidentielle avec 29 % d'intentions de vote, en hausse de deux points, et devance Nicolas Sarkozy (24 %).
"Le rapport de force peut encore évoluer"
Résultat : un avant-goût de victoire flotte dans le camp socialiste, même au-delà. Ce matin, le député européen écologiste Daniel Cohn-Bendit a estimé que le candidat socialiste avait d'ores et déjà "gagné" l'élection présidentielle. Pour sa part, Eric Bonnet refuse de dire que les jeux sont déjà faits. "Si Hollande fait figure d’ultra-favori, les rapports de force peuvent encore évoluer avant dimanche, indique-t-il, d'autant que si la victoire de la gauche semble déjà acquise, les électeurs pro-Hollande pourraient être démotivés pour aller voter".
C’est pourquoi François Hollande se garde de tout excès de confiance. "Gardez-vous de toute euphorie", a-t-il lancé mardi 17 avril devant 10 000 sympathisants réunis au Grand-Palais de Lille. Il a d'ailleurs conseillé mercredi matin sur France Inter une "bonne douche froide bien glacée" aux ténors socialistes qui sont déjà tentés de se partager les postes. Car la semaine n’est pas terminée…