
L’armée a lancé un assaut de grande envergure contre Deraa, berceau de la contestation anti-gouvernementale dans le sud de la Syrie, quelques heures avant le vote de l’Assemblée générale de l’ONU d’un projet de résolution non contraignante.
REUTERS - Les forces de Bachar al Assad ont lancé un assaut jeudi contre les rebelles de l’Armée syrienne libre à Deraa, berceau du mouvement de contestation né en mars 2011, et poursuivi leur offensive sur Hama et Homs, selon des habitants et opposants.
A Vienne, le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, a condamné de possibles crimes contre l’humanité en Syrie, citant « des quartiers bombardés à l’aveugle, des hôpitaux utilisés comme centres de torture ou des enfants de dix ans emprisonnés et abusés ».
L’attaque de Deraa intervient au lendemain de l’annonce par le président syrien de l’organisation le 26 février d’un référendum sur une nouvelle Constitution instaurant le multipartisme puis d’élections législatives dans les 90 jours en cas d’approbation. (voir )
L’opposition syrienne de même que les Etats-Unis n’ont pas pris cette proposition au sérieux. En levant l’état d’urgence l’an dernier, le président syrien avait également promis des élections législatives pluralistes pour ce mois-ci.
Un projet de résolution proposant d’exprimer le soutien de l’Onu au plan de la Ligue arabe, qui prévoit la mise à l’écart du président Bachar al Assad, devrait être mis aux voix jeudi à l’Assemblée générale de l’Onu, dont les résolutions ne sont pas contraignantes. ( )
Compromis possible avec Moscou
Après le double veto de la Russie et de la Chine le 4 février à une résolution similaire du Conseil de sécurité appelant à la démission d’Assad, le ministre français des Affaires étrangères, Alain Juppé, a par ailleurs jugé possible un compromis à court terme avec la Russie afin de mettre un terme aux « massacres » en Syrie.
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S’exprimant à l’issue d’un entretien à Vienne avec son homologue russe, Sergueï Lavrov, Alain Juppé a précisé jeudi que la communauté internationale travaillait à une nouvelle résolution du Conseil visant, avec l’appui de Moscou, à la fin des violences en Syrie et à l’octroi d’une aide humanitaire.
La répression violente du soulèvement contre le régime de Bachar al Assad a fait plus de 5.000 morts depuis près d’un an, selon l’Onu, dont le dernier décompte date de plusieurs semaines. Damas déclare combattre des « groupes terroristes » ayant tué 2.000 membres des forces de sécurité.
Les Russes ont toutefois fait savoir qu’ils s’opposeraient à ce que le Conseil de sécurité « contribue à légitimer » un changement de régime à Damas. ( )
La Chine a pour sa part mis en garde l’instance suprême des Nations unies contre les conséquences de « mauvaises initiatives ». Pékin a annoncé parallèlement l’envoi en Syrie du vice-ministre Zhai Jun, qui sera en Syrie vendredi et samedi, pour continuer à « promouvoir une solution pacifique et adaptée ».
Hama et Homs bombardées
A Deraa, près de la frontière jordanienne, des explosions et des tirs de mitrailleuses ont retenti dans les quartiers de Balad, Mahatta et Sad. Les rebelles ont riposté en visant des barrages militaires et des bâtiments abritant des policiers et des miliciens. ( )
Les autorités syriennes, qui réduisent très fortement l’accès du pays à la presse, n’ont pas évoqué cet assaut.
Une précédente offensive, en avril, avait mis fin aux grandes manifestations de Deraa, lesquelles avaient été déclenchées par l’arrestation de plusieurs femmes militant pour la démocratie et d’écoliers ayant écrit sur les murs des slogans en faveur de la liberté.
L’armée de Bachar al Assad a également lancé une nouvelle offensive contre Hama, dont des quartiers résidentiels sont sous le feu de batteries anti-aériennes montées sur des blindés, rapportent des opposants au président syrien.
Au moins 14 personnes ont été tuées jeudi par les forces syriennes dans la ville de Kfar Nubouzeh non loin de Hama, ville située à 240 km au nord de Damas, ont annoncé des militants.
Des quartiers sunnites de Homs, pilonnée depuis le 3 février, ont été encore bombardés. D’après les Comités locaux de coordination, qui regroupent des opposants, au moins quatre personnes sont mortes mercredi dans ces bombardements principalement dirigés contre le quartier de Bab Amro.
Arrestation d'un opposant
A Damas, l’armée a tué au moins deux jeunes en procédant à des fouilles et à des arrestations dans le quartier de Barzeh, ont rapporté des témoins.
Selon l’opposition, les forces de sécurité syriennes ont arrêté jeudi le militant des droits de l’homme Mazen Darouiche et plusieurs autres opposants dans leur bureau du centre de Damas. Darouiche, qui dirige le Centre syrien pour les médias et la liberté d’expression, a dénoncé les violations des droits de l’homme commises par le régime depuis le début de la révolte.
Le Parlement européen a appelé tous les pays de l’Union européenne à rappeler leur ambassadeur en poste en Syrie et à geler les contacts avec les ambassadeurs de Damas présents en Europe pour protester contre la poursuite des violences. ( ) La Suisse a annoncé la fermeture temporaire de son ambassade dans la capitale pour des raisons de sécurité.
A contrecourant des sanctions imposées par la communauté internationale, une cargaison de carburant vénézuélien est attendue cette semaine dans le port syrien de Banias, selon des sources proches du transport maritime.