Par la voix de son ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé (à dr.), la France a proposé d'instaurer des "corridors humanitaires" en Syrie. Paris exclut toutefois toute intervention militaire dans le pays.
AFP - La France a avancé mercredi pour la première fois l'idée de "corridors humanitaires" en Syrie, soumise à ses partenaires européens et américains, et fait un pas supplémentaire vers la reconnaissance de l'opposition, considérée comme "l'interlocuteur légitime".
"Les corridors humanitaires, c'est un point que nous avons examiné et je demanderai à la prochaine réunion du conseil des ministres européens de le mettre à l'ordre du jour", a indiqué le chef de la diplomatie, Alain Juppé, à l'issue d'une rencontre avec Burhan Ghalioun, dirigeant du Conseil national syrien (CNS, opposition).
"S'il peut y avoir une dimension humanitaire, des zones qui pourraient être sécurisées, protéger des populations, c'est une question qu'il faut étudier" avec l'UE et la Ligue arabe, a ajouté le ministre devant la presse.
Selon Paris, le ministre a également évoqué cette question avec la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton, lors d'un entretien téléphonique.
Les deux ministres sont "convenus de travailler ensemble et avec leurs partenaires sur la possibilité de corridors humanitaires", a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Bernard Valero.
Ils se sont inquiétés de "la détérioration de la situation humanitaire en Syrie, et tout particulièrement dans la ville de Homs, littéralement assiégée par les forces du régime", a-t-il ajouté.
Le ministre et les responsables n'ont à ce stade donné aucun détail sur la manière dont pourraient être mis en place de tels corridors. Alain Juppé a toutefois de nouveau écarté le recours à "une option militaire" qui, a-t-il dit, "n'est pas à l'ordre du jour".
Cette analyse vaut également, selon lui, pour la possibilité d'établir une zone tampon, à l'intérieur de la Syrie, à la frontière avec la Turquie, qui a été envisagée dans les médias turcs pour protéger les populations civiles.
La France a également avancé mercredi vers la reconnaissance du CNS. "Le Conseil national syrien est l'interlocuteur légitime avec lequel nous allons continuer à travailler", a déclaré Alain Juppé.
Soulignant la nécessité que le CNS soit "inclusif", c'est-à-dire regroupe le maximum de tendances, le ministre français a ajouté qu'une reconnaissance formelle viendrait plus tard. "Nous travaillons (à) la reconnaissance plus formelle avec la Ligue arabe et l'ensemble de nos alliés", a-t-il affirmé.
De son côté, Burhan Ghalioun a appelé à une "meilleure coordination internationale face à un régime qui va vers la fuite en avant".
"Nous avons discuté de notre feuille de route vers une transition démocratique et pacifique (pour) éviter à la Syrie la guerre civile et l'intervention militaire que tout le monde veut éviter", a-t-il ajouté.
Né fin août à Istanbul, le CNS apparaît comme le plus large et le plus représentatif des mouvements d'opposition, avec la participation de représentants d'opposants en exil et d'opposants de l'intérieur du pays.
La France avait été le premier pays à reconnaître le Conseil national de transition (CNT) libyen au tout début de la contestation contre Mouammar Kadhafi. Cette reconnaissance avait enclenché les initiatives diplomatiques et militaires internationales qui ont largement contribué à la chute de l'ancien régime de Tripoli.
Burhan Ghalioun a évoqué avec prudence la montée en puissance de l'Armée syrienne libre (ASL), force fondée par un colonel déserteur.
"Nous souhaitons que cette +armée+ (agisse) dans les missions défensives pour protéger les soldats qui ont quitté l'armée, et les manifestations pacifiques. Mais pas d'actes, d'actions offensives contre les positions de l'armée" régulière, a-t-il déclaré.
La France, de son côté, a affirmé mercredi n'avoir aucun contact avec l'ASL.