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Les propos de Noah sur le dopage des sportifs espagnols provoquent un tollé

En liant les exploits des sportifs espagnols ces dernières années à une "potion magique" digne d'Astérix et Obélix, l’ex-tennisman français Yannick Noah s’est attiré les foudres de plusieurs personnalités du sport des deux pays.

Dernier tennisman français à avoir soulevé un trophée d’un tournoi du Grand Chelem en 1983, Yannick Noah, converti depuis à la chanson, a, cette fois, soulevé une vague de critiques à son encontre. 

Accoutumé des propos incendiaires – "Ça pue du cul", avait-il dit à propos du soutien de Zinedine Zidane à la candidature qatarie pour l’organisation du Mondial de football 2022 – la personnalité préférée des Français s’en est pris cette fois, dans un édito dans le journal le Monde –datant de samedi (lire la tribune), au supposé dopage des sportifs espagnols.

"Potion magique" et "propos d’enfants"

"Une question me taraude : comment une nation peut-elle du jour au lendemain dominer le sport à ce point ? […] Aujourd'hui, le sport c'est un peu comme Astérix aux Jeux olympiques : si tu n'as pas la potion magique, c'est difficile de gagner." L’ex-tennisman en conclut donc que pour atteindre le niveau des sportifs espagnols, les Français n’auraient pas d’autres choix que d’autoriser le dopage.

Le monde sportif n'a pas tardé à réagir. À commencer par  le président du Comité olympique espagnol, Alejandro Blanco, qui s'est manifesté sur le site internet du quotidien sportif espagnol "Marca" : "Il est très difficile pour des ignorants de comprendre le boom du sport espagnol. C'est le travail qui a été la clé du succès", affirme-t-il.

Pour le président de la Fédération espagnole de basket-ball, José Luis Saez, cité par le quotidien "AS", le vainqueur de Roland-Garros 1983 est "irresponsable" et "jaloux". Une allusion à peine voilée à son son fils, Joakim Noah, finaliste malheureux contre l'Espagne avec l'équipe de France lors de l'Euro de basket-ball en Lituanie, au mois de septembre.

L'entraîneur du FC Barcelone Pep Guardiola, interrogé samedi, a incité l'ancien joueur de tennis à "présenter des preuves" ou à "se taire". "Que ce monsieur présente des preuves, ou quiconque d'ailleurs. Si non, qu'il se taise", a lâché de façon lapidaire Pep Guardiola en conférence de presse samedi après la victoire du Barça sur Saragosse (4-0) en Liga.

Depuis les Masters de Londres, Rafael Nadal n’a pas manqué de tacler l’ex-capitaine de l’équipe de France de Coupe Davis. "C'est stupide car on sait le nombre de contrôles antidopage que nous subissons dans le sport aujourd'hui. Selon moi, ce sont des propos dignes d'un petit enfant", surenchérissait le numéro deux mondial.

Pas de preuves mais des suspicions

En France aussi ses propos ont fait jaser. Invité samedi sur le plateau du journal télévisé de 20 h sur France 2, David Douillet, ministre des Sports, s’est dit consterné par "des propos graves et irresponsables". "Il faut amener des preuves quand on affirme quelque chose", a-t-il ajouté avant de défendre la politique antidopage de la France où sera "institué, et rapidement, un délit pénal pour ceux qui se dopent, à la fois pour protéger les sportifs propres et pour permettre aux enquêteurs d'aller plus loin".

"Je trouve très drôle la véhémence des réactions sur ce sujet", explique Pierre Ballester, expert sur la question du dopage dans le cyclisme à France24.com. "On isole Yannick Noah pour sauver les relations entre la France et l’Espagne en le critiquant de n’avoir de preuves de ce qu’il avance. Mais personne ne peut prouver qu’il a tort. Les Espagnols ont 10 ans de retard dans la lutte antidopage et trustent les meilleures places dans beaucoup de disciplines. Comme pour l’Allemagne de l’Est et l'URSS dans les années 1980, on a le droit de poser la question du dopage en Espagne," ajoute-t-il. "Avec la crise économique que traverse l’Espagne en ce moment, aucun homme politique ne peut se permettre de créer une autre crise quand le sport joue un véritable opium du peuple en ces moments difficiles. Quant à sa proposition de légaliser le dopage, je pense qu’il s’agit ici de provocations qui ont eu le mérite d’ouvrir un débat," conclut-il.