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Le tribunal de Kiev a condamné mardi l'ancien Premier ministre ukrainien Ioulia Timochenko à sept ans de prison ferme pour abus de pouvoir. La principale opposante du président a dénoncé un procès politique de la part de son adversaire.

L'ancien Premier ministre Ioulia Timochenko a été reconnue coupable d'abus de pouvoir par la justice ukrainienne ce mardi, qui l’a condamnée à sept ans de prison. Elle était accusée d’avoir signé en 2009, sans l'autorisation de son gouvernement, des accords gaziers avec la Russie défavorables à son pays. "En janvier 2009, Ioulia Timochenko, étant Premier ministre (...) a utilisé son autorité et ses prérogatives légales à des fins criminelles, commettant des actes qui outrepassaient clairement ses droits et son autorité", a affirmé le juge Rodion Kireev dans l'énoncé du jugement à l'issue du procès, entamé le 24 juin. Outre une interdiction d'exercer des fonctions officielles pendant trois ans, elle a également été condamnée à rembourser quelque 190 millions de dollars à Naftogaz, l'entreprise publique des hydrocarbures ukrainienne.

En détention provisoire depuis le 5 août, l’égérie de la Révolution orange qui n’a cessé de dénoncer une machination politique de la part de son adversaire, l’actuel président Viktor Ianoukovitch, a indiqué qu'elle contesterait le jugement devant la justice européenne. "Nous allons nous battre pour défendre notre réputation devant les instances européennes. Nous devons être forts et protéger l'Ukraine de l'autoritarisme et de l'absence de liberté", a-t-elle déclaré après l'annonce du jugement. À l’extérieur du tribunal de Kiev, des militants de l'opposition au président Ianoukovitch criaient "Liberté pour Ioulia" ou "À bas les bandits".

Une condamnation aux lourdes conséquences diplomatiques

La condamnation de la "dame de fer" ukrainienne risque d’avoir des répercussions sur les relations internationales de Kiev. Ainsi, l’Union européenne par la voix de son chef de la diplomatie Catherine Ashton, s’est dite "profondément déçue", et a menacé l'Ukraine d'importantes "conséquences" si l'ex-Premier ministre Ioulia Timochenko ne bénéficie pas d'une procédure d'appel équitable après sa condamnation,. Et pour cause, l'UE avait prévenu à maintes reprises qu'une peine de prison contre l'ex-Premier ministre remettrait en question les négociations en cours sur un accord d'association et de libéralisation des échanges commerciaux avec l'Ukraine. Les Européens soupçonnent ce procès d'être une manœuvre destinée à écarter une concurrente gênante pour le pouvoir en place à l’aube des législatives de 2012.
 

"Beaucoup d’analystes et de diplomates ne croyaient pas qu’on en arriveraient là, car l’Europe a été assez claire sur les conséquences d’une condamnation éventuelle", souligne Gulliver Cragg, correspondant de FRANCE 24 en Pologne. Selon certains médias locaux cités par l’AFP, le régime ukrainien tient à obtenir la condamnation publique de Mme Timochenko, mais pourrait accepter par la suite de dépénaliser l'article sur la base duquel elle a été jugée et la remettre en liberté une fois le jugement prononcé, afin de ménager l'Union Européenne.
 

Par ailleurs, cette affaire qui polarise l'opinion publique ukrainienne aura aussi des retombées sur le puissant voisin russe. "La Russie est dans une position sensible, car l’accord dénoncé par le procès lui est très bénéfique. Si Timochenko est condamnée, le verdict fera apparaître la Russie comme le grand manipulateur de l’affaire", analyse Douglas Herbert, spécialiste de politique internationale à FRANCE 24.