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L’organisation fondée par Julian Assange a décidé, ce vendredi, de publier les 251 287 câbles diplomatiques américains en sa possession. Sans les expurger des noms d’éventuels informateurs locaux des États-Unis : une décision controversée.

C’est un tweet qui fera date dans l’histoire de WikiLeaks : "Cablegate : mise en ligne de 251 287 câbles diplomatiques américains consultables à l’aide de mots-clefs". L’organisation fondée par Julian Assange a publié, ce vendredi, l’intégralité des télégrammes diplomatiques américains classifiés en sa possession, dans leur version non-expurgée des noms et détails permettant d’identifier les éventuels contacts locaux des ambassades des États-Unis.

Cette initiative a rapidement été condamnée par les principaux médias avec lesquels WikiLeaks travaillait jusqu’à présent. Dans un communiqué conjoint, ces derniers "déplorent la décision [de WikiLeaks, NDLR] de publier des câbles non édités, qui peut mettre des sources en danger".

Lors du lancement de l’opération "câblegate" en novembre dernier en effet, WikiLeaks et cinq journaux ("Le Monde", "El Pais", "Der Spiegel", "The Guardian" et "The New York Times") avaient épluché les télégrammes diplomatiques afin de les contextualiser et de les expurger des noms des informateurs des États-Unis.

Pour autant, la décision prise aujourd’hui par WikiLeaks ne l’a pas été sur un coup de tête. Le site réfléchissait en effet depuis plusieurs jours déjà à franchir le pas, une version intégrale des câbles diplomatiques circulant depuis plusieurs mois sur la Toile, à la suite d’une fuite que l’organisation attribue à une "négligence grossière" du "Guardian".

"Question de légitimité"

Le roi de la divulgation de documents secrets avait même lancé - toujours sur Twitter - un sondage sur une éventuelle mise en ligne de ces télégrammes sensibles dans leur version intégrale. Jeudi soir, les résultats indiquaient clairement (à 100 contre 1 selon WikiLeaks) que les internautes étaient favorables à ce grand saut dans l’inconnu…

"Ce n’est pas parce qu’il y a eu une fuite qu’il faut jeter aux oubliettes des principes aussi essentiels que la protection des sources et des personnes susceptibles d’être mises en danger", tempère toutefois Agnès Callamard, directrice d’Article 19, une ONG britannique spécialisée dans la défense de la liberté d’expression en contact avec WikiLeaks depuis juillet 2010. Prenant ses distances avec l’organisation de Julian Assange, celle-ci estime que WikiLeaks a commis "une erreur de jugement qui marque un tournant dans l’évolution de l’organisation".

"En prenant une telle initiative, WikiLeaks a perdu toute légitimité en tant que vecteur d’informations", reprend Agnès Callamard. Selon elle en effet, la décision prise par l’organisation apporte sur un plateau des arguments aux États pour condamner la démarche du site, alors que celui-ci "a souvent révélé des informations essentielles".