![La pauvreté touche de plus en plus de Français La pauvreté touche de plus en plus de Français](/data/posts/2022/07/16/1657979731_La-pauvrete-touche-de-plus-en-plus-de-Francais.jpg)
Quelque 8,2 millions de Français vivent sous le seuil de pauvreté, selon un rapport publié ce mardi par l’Insee. Un chiffre en net progression qui s'expliquerait, en partie, par la crise de 2008. Décryptage.
En 2009, le France comptait 8,2 millions de pauvres, selon l’enquête sur les niveaux de vie publiée mardi par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee). Ce sont près de 340 000 personnes en plus par rapport à 2008 qui sont tombées sous le seuil de pauvreté, qui s’établit en 2009 à 954 euros mensuels, soit 60% du revenu médian français, selon l’Insee.
Pour la première fois depuis 2005, les foyers les plus modestes ont, en outre, enregistré une baisse de leur niveau de vie contrairement à celui des 60% de Français les plus aisés qui a continué à augmenter. Un constat accablant que l’Insee met sur le compte de la crise et de l’augmentation du chômage, qui a touché plus durement les populations les plus fragiles. Des explications qui ne manquent pas de soulever quelques questions.
La grande méchante crise ? Nul doute qu'en France la crise économique de 2008 a eu pour effet un accroissement du nombre de personnes sans emploi. Pour preuve, entre 2003 et 2008, le taux de chômage est passé de 8,5% à 7,4% avant d’atteindre 9,1% en 2009, selon les chiffres de l’Insee.
Pour autant, la crise ne peut à elle seule expliquer l’augmentation du nombre de pauvres en 2009. Les précédentes récessions que la France a traversées, à savoir les deux chocs pétroliers dans les années 70 et l’explosion de la bulle Internet en 2001, n’ont en rien été suivies par une augmentation du nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté. "Les effets de cette crise sont accentués par les politiques de réduction des impôts et de gel des prestations sociales menées depuis un dizaine d’années", déplore Noam Leandri, secrétaire général de l’Observatoire des inégalités, contacté par FRANCE 24.
Les inégalités en baisse ? Le rapport de l’Insee va à contre-courant d’une idée en vogue selon laquelle les inégalités se creuseraient entre les plus riches et les plus pauvres. Les écarts de revenus qui ont poussé le milliardaire américain Warren Buffet a lancé un cri du cœur dans les colonnes du New York Times ne correspondent pas à une réalité française. En 2009, les foyers français les plus aisés gagnaient en moyenne "seulement" 3,4 fois plus que les plus pauvres. Un écart qui a même légèrement baissé par rapport à 2000 (3,5 fois plus), selon l’Insee.
"En France, les inégalités de revenus sont plus faibles que dans les années 1970", confirme Noam Leandri. Mais, selon lui, cette relative égalité ne doit pas masquer des disparités grandissantes du pouvoir d’achat. "Le panier de consommation typique des plus pauvres a été davantage touché par l’inflation que celui des plus riches", souligne-t-il. En outre, les Français aisés épargnent davantage, jusqu’à 40% de leurs revenus, ce qui leur permet de mettre une plus grande partie de leur argent à l’abri de l’inflation.
Des chiffres trop alarmistes ? En 2008, l’Insee s’est aligné sur les autres pays européens pour calculer le seuil de pauvreté. Auparavant, une personne basculait dans la pauvreté lorsqu’elle gagnait moins de 50% du revenu médian français et non pas 60% comme aujourd'hui. Si l’ancien mode de calcul avait été maintenu, il n’y aurait que 4,5 millions de pauvres en France.
Un changement qui permet de mieux prendre en compte la réalité de la pauvreté. En apparence seulement. "Cela tend à décrédibiliser la notion de pauvreté car ceux qui sont juste sous le seuil de pauvreté ont un niveau de vie similaire à la majorité des Français dans les années 1970", explique Noam Leandri, qui estime qu'"en exagérant le nombre de pauvres, les politiques de lutte contre la pauvreté risquent de ne pas cibler convenablement les populations les plus fragiles."