
L'entreprise publique chinoise Chinalco va apporter quelque 19,5 milliards de dollars à la holding anglo-australienne Rio Tinto. Une participation qui permettra au troisième groupe minier mondial d'éponger une partie de ses dettes.
REUTERS - Le groupe public chinois Chinalco va apporter 19,5 milliards de dollars (15,1 milliards d'euros) au géant minier Rio Tinto, garantissant ainsi un approvisionnement en matières premières à la Chine et permettant au groupe anglo-saxon de se décharger d'une partie de sa dette.
Rio vendra pour 12,3 milliards de dollars de participations à Chinalco en échange de participations au sein de neuf de ses mines et recevra 7,2 milliards de dollars par l'émission d'obligations convertibles, ce qui lui permettra de réduire son énorme dette.
Le directeur financier a indiqué que l'accord devrait être finalisé à la fin du deuxième trimestre ou au début du troisième.
Au cas où Chinalco exercerait la conversion, la participation de Chinalco dans Rio Tinto serait doublée, à 18%, a précisé ce dernier dans un communiqué.
Chinalco nommera deux administrateurs non exécutifs au conseil d'administration de Rio.
Rio a dans le même temps annoncé ses résultats pour 2008. Le groupe a fait état d'une hausse de 38% de son bénéfice courant, à 10,3 milliards de dollars, un niveau supérieur aux attentes des analystes dont le consensus était ressorti à 9,8 milliards.
Les prix de l'aluminium ont depuis chuté de plus de 60%.
Par ailleurs, la presse australienne rapporte que BHP Billiton pourrait faire une contre-offre sur certains des actifs qui doivent être cédés à Chinalco.
Désaveu
Ce rachat par le groupe public chinois est un lourd désaveu pour le directeur général de Rio Tom Albanese et pour son conseil d'administration qui s'étaient opposés au rachat par son concurrent BHP Billiton, qui proposait pourtant une offre représentant le double de celle de Chinalco.
Depuis le rejet en novembre de l'offre de BHP, de près de 66 milliards de dollars, l'action de Rio a perdu près d'un tiers de sa valeur.
"Rio renonce petit à petit à son indépendance et modifie la donne sur le marché des matières premières afin de trouver une solution à court terme à un problème de liquidités qu'il a lui même provoqué" commente Alan Kohler de Business Spectator.
La dette totale du groupe atteint presque 39 milliards de dollars, en raison de l'acquisition du canadien Alcan spécialisé dans l'aluminium à la fin 2007, lorsque les marchés des matières premières semblaient être à l'abri de la crise financière mondiale.
"Les dirigeants ont sans doute honte d'avoir dû faire cela. Leur gestion du calendrier est plutôt malheureuse. Acheter au plus haut du marché et vendre au plus bas (...)", déclare Mark Pervan d'ANZ Bank.
Dans un communiqué, Rio précise que les deux groupes "conserveraient leur distance".
Ce rachat semblait inéluctable après le retrait de Jim Leng, qui devait prendre la tête de Rio, en raison de son opposition à une montée du chinois dans le capital du groupe anglo-saxon.
L'opération doit encore recevoir l'approbation des actionnaires de Rio et des autorités australiennes de régulation des investissements étrangers.
"Cet accord est loin d'être un fait accompli. Il lui faudra à la fois l'accord des actionnaires et celui du gouvernement australien", rappelle Kohler.
Canberra, qui cherche à se prémunir contre des investissements étrangers qui seraient dictés par des considérations politiques, a immédiatement annoncé un durcissement de sa législation en la matière.
Le rapprochement Chinalco-Rio suscite de nombreuses critiques en Australie où l'on voit d'un mauvais oeil l'entrée d'un groupe public étranger au sein d'une société qui reçoit de nombreuses aides d'Etat.
Dans la foulée de l'annonce du rapprochement de ces deux groupes, l'aluminier américain Alcoa a annoncé qu'il allait examiner la possibilité de créer des sociétés stratégiques avec Chinalco avec lequel il souhaite tisser des liens commerciaux plus étroits.
Vers 10h30 GMT, le titre Rio prenait 1,83% à la Bourse de Londres, surperformant l'indice Dow Jones du secteur <.SXPP> qui fléchissait de 2,13%.